À partir de là, une question : en matière religieuse, qu’est-ce qui est ostentatoire ? Le voile, bien sûr, tout le monde l’aura compris, une bonne partie de la charte péquiste est écrite spécifiquement pour limiter la vue du voile : « Cachez ce voile que je ne saurais voir ! »
La kippa que l’on remarque à peine ? Une croix, oui mais de quelle taille ? Et que fait-on des barbes portées par des musulmans conservateurs ? Des papillotes hassidiques ? Des cheveux rasta ?
Parce que de deux choses l’une : ou bien l’idée est de s’assurer que l’usager des services publics n’a aucune idée de la religion pratiquée par le ou la fonctionnaire, et si c’est le cas, il faudra bien s’occuper des cheveux, barbes, croix et kippas… Ou bien on cesse de tourner autour du pot et on convient que ce qui nous dérange, c’est le voile, point. Dans les deux cas, on est mal pris.
Je suggère donc que l’on abandonne l’idée d’interdire le port de signes religieux à moins que ceux-ci nuisent véritablement à la communication entre personnel des services publics et usagers, par exemple, le nikab ou la burka qui cachent le visage. On doit aussi se soucier de santé-sécurité et s’entendre sur le fait que le port d’un turban est difficilement compatible avec un casque de construction. Ou bien qu’une personne représente l’État dans sa fonction répressive et que cela nécessite une neutralité à toute épreuve, en fait et en apparence.
En dehors de cela, si nous passions à des sujets plus structurants en matière de laïcité : financement étatique des écoles privées religieuses, par exemple.
Un débat générationnel
Une remarque en terminant ce texte : je suis de plus en plus frappée par l’absence de la jeunesse québécoise dans ce débat qui dure depuis 6 mois. À quelques exceptions près, le débat se déroule, sur la place publique et à la commission parlementaire, entre gens d’un certain âge, professeurs, chercheurs, gestionnaires, citoyennes et citoyens, représentants-es d’organismes.
Je fais partie de ces personnes d’âge mûr. Je comprends l’intérêt des gens de ma génération, et un peu plus jeunes, pour un débat qui s’appuie sur l’histoire récente du Québec. Je comprends aussi les malaises, les incertitudes et la recherche d’un vivre-ensemble fondé sur des valeurs communes.
Mais tout de même…est-il normal que la jeunesse se montre si discrète dans un débat national qui la concerne ? Cette jeunesse, si mobilisée en 2012 n’a-t-elle rien à proposer en matière de laïcité des institutions publiques ? Se sent-elle peu concernée ? Pourquoi ?
J’adorerais que des jeunes s’expriment, indiquent aux plus âgés-es comment ils et elles vivent désormais dans une diversité plutôt nouvelle. Je voudrais qu’ils partagent leurs espoirs et leur vision du Québec du 21e siècle.