Édition du 21 janvier 2025

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Le Monde

Libérez, délivrez, régularisez nos places handicapées !

Aller et venir est un plaisir, c’est aussi une liberté reconnue parmi les droits fondamentaux. L’État et les collectivités publiques ont donc l’obligation de réaliser tous les travaux et aménagements favorisant la libre circulation.

Tiré de Entre les lignes et les mots
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/12/27/liberez-delivrez-regularisez-nos-places-handicapees/?jetpack_skip_subscription_popup

En ville, des millions de personnes en fauteuil, appuyées sur des cannes, béquilles, déambulateurs… se heurtent à des difficultés majeures. Car des municipalités compliquent sciemment le quotidien de leurs administrés handicapés.

Aller et venir, se déplacer librement est un plaisir, c’est aussi une liberté reconnue parmi les droits fondamentaux. L’État et les collectivités publiques ont donc l’obligation de réaliser tous les travaux et aménagements favorisant la libre circulation. Pour des millions de personnes en situation de handicap, moteur notamment, la voiture est indispensable pour aller d’un point à un autre. On connaît les difficultés majeures auxquelles se heurtent, en ville, ces personnes en fauteuil, appuyées sur des cannes, béquilles, déambulateurs… Les politiques nous ont habitués à leurs discours contrits et leurs promesses de fumée. Mais des municipalités compliquent sciemment le quotidien de leurs administrés handicapés. Par cette tribune, Droit Pluriel veut rendre publiques ces pratiques qui nuisent à des contribuables qui ne savent plus vers qui se tourner.

Tout d’abord, il y a le handi-washing entretenu par ces villes qui affichent leur prétendue volonté de faciliter le déplacement des personnes en situation de handicap. Ainsi, Hazebrouck se vante de ses 15% de places réservées aux personnes à mobilité réduite au lieu des 2% réglementaires. De son côté, Toulon fanfaronne avec 181 nouvelles places PMR. Formidable ! les rues de ces communes sont notoirement colorées d’emplacements bleus marqués du personnage en fauteuil roulant. Voilà une ville inclusive, serait-on tenté de penser. Voilà d’ailleurs ce que veulent laisser croire des équipes municipales peu scrupuleuses car il ne s’agit là que d’un cynique jeu de trompe-l’œil. Notre enquête nous a montré que de très nombreuses municipalités usent du même procédé : elles conçoivent des places inférieures à la taille nécessaire pour le véhicule d’une personne en fauteuil. Ou encore, elles omettent volontairement de planter sur ces places bleues le panneau signalétique imposé par la loi. Résultat : n’importe qui peut s’y garer sans être verbalisé. Les habitants le savent. Il s’agit de fausses « places handicapés », pure démagogie à visée électorale. Si on peut se faire quelques voix sur le dos des handicapés…

Autre bâton dans les roues : le système de lecture automatisée des plaques d’immatriculation (LAPI). Ce dispositif remplace progressivement les pervenches traditionnelles qui verbalisaient manuellement. De quoi s’agit-il ? Des voitures équipées de caméras sillonnent la ville et photographient les plaques d’immatriculation des personnes mal garées, et l’amende est automatiquement envoyée au propriétaire du véhicule. Sauf que la Carte mobilité inclusion (reconnaissance administrative du handicap) permet de se garer gratuitement sur toutes les places dès lors qu’elle porte la mention « stationnement ». Il suffisait naguère de mettre en évidence la carte sur le tableau de bord pour que l’agent ne verbalise pas. Ce système que certaines villes ont conservé n’était pas sans faille puisque des amendes tombaient malgré tout, mais la démarche répondait à l’objectif : ne pas créer d’obstacle supplémentaire pour des personnes déjà bien entravées par le handicap. Dorénavant, avec le système LAPI, les titulaires de la CMI doivent s’enregistrer sur le logiciel dédié avant de venir. Il ne suffit pas de le faire une fois pour toutes : chaque mairie a son propre logiciel, parfois il y a un délai d’inscription, il faut se réinscrire régulièrement… Adieu l’impro ! Parfois, seule une voiture peut être enregistrée, tant pis pour les parents d’enfants handicapés qui ont chacun leur véhicule. Tant pis aussi pour les personnes empêchées par le handicap d’accéder au numérique. Et dans les cas où la municipalité a conservé le système du bon vieux ticket, tant pis pour celles et ceux qui n’accèdent pas aux horodateurs trop hauts, trop loin ou à l’écran illisible… La loi oblige à faciliter le déplacement : on voudrait enfermer chez elles ces milliers de personnes qu’on ne s’y prendrait pas autrement.

Enfin, dernier obstacle : le forfait post-stationnement (FPS). Habituellement, les amendes sont des contraventions de droit pénal qui s’inscrivent dans un cadre strict pour ne pas punir à la légère. Mais en matière de stationnement payant, les amendes ont une nature administrative, et les conséquences sont importantes. Auparavant, il fallait obligatoirement payer la somme réclamée pour pouvoir contester devant la Commission du contentieux du stationnement payant, une juridiction… qui ne siège qu’à Limoges. En 2020, le Conseil constitutionnel a abrogé cette règle injuste. Cependant, aucune nouvelle loi n’est venue se substituer à l’ancien système, si bien que certaines municipalités comme Arles continuent d’envoyer des FPS aux personnes en situation de handicap. Et, ultime aberration, les amendes peuvent se cumuler, jusqu’à plus de mille euros… Est-ce acceptable pour une personne qui a acquis ce droit de stationner gratuitement et reçoit une Allocation aux adultes handicapés de 1016 euros par mois ? Le Conseil d’État a rendu une décision complètement lunaire arguant qu’il ne s’agissait que de « litiges portant, la plupart du temps, sur de faibles sommes ».

Il n’est pas possible de battre des mains devant les athlètes paralympiques et empêcher ces mêmes personnes, dès lors qu’elles ont laissé leur maillot au vestiaire, de se rendre au travail, chercher leurs enfants à la sortie de l’école ou aller au supermarché… Stationnement ou pas, quand accepterez-vous de nous laisser une place ? La France ne peut pas aimer que les handicapés médaillés !

Anne-Sarah Kertudo et Romain Dubos
Droit Pluriel
Association nationale de défense des droits des personnes en situation de handicap
https://blogs.mediapart.fr/droit-pluriel/blog/171224/liberez-delivrez-regularisez-nos-places-handicapees

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