Édition du 26 novembre 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Environnement

Intervention de Manon Massé, députée de Québec solidaire,...

Les gouvernements, les uns après les autres, ont une certaine complaisance face à l’industrie pétrolifère.

Intervention de la députée de Québec solidaire, Manon Massé sur la motion du député de Terrobonne, Mathieu Traversy, du Parti québécois. Elle explique les fondements de son accord avec cette motion.Cette motion a été rejetée par le Parti libéral du Québec et la CAQ, le jeudi 12 novembre 2015.

Voici le texte de la motion :

« Que l’Assemblée nationale rappelle qu’elle a adopté une motion unanime exigeant notamment que le gouvernement du Québec assume sa compétence en environnement et renonce à déléguer ses évaluations environnementales à l’Office national de l’énergie ;
« Qu’elle rappelle au gouvernement du Québec sa liste de sept conditions pour accepter ou non le projet Énergie Est de TransCanada ;
« Qu’elle souligne que 87 % des Québécois désirent que le gouvernement du Québec ait le dernier mot pour autoriser ou non le projet d’exportation de pétrole des sables bitumineux ;
« Que l’Assemblée nationale demande au gouvernement d’exercer ses compétences pleines et entières en matière d’environnement, et exige qu’il refuse le projet Énergie Est de TransCanada. »

... J’entends beaucoup, ici, parler d’économie et pourtant je n’entends pas la voix de la science s’exprimer. Je veux bien, l’économie joue un rôle, mais, quand on parle, au sens de la loi de l’environnement, de l’économie, on ne peut pas la dissocier de l’écologie puis on ne peut surtout pas la dissocier du social.

En ce sens, la motion qui est devant nous, aujourd’hui, nous rappelle que, comme élus, et dans le cas qui nous concerne comme gouvernement, on doit assumer des responsabilités, et on ne peut pas regarder ça juste par un bout de la lorgnette.

Ce qui est impressionnant, c’est que - je n’entends pas faire de partisanerie là-dessus - M. le Président, tout choix économique est un choix politique. Je ne comprends pas cette affaire-là, sinon que de vouloir faire un show de boucane. Bien sûr qu’il faut qu’on s’en préoccupe, c’est majeur. Parce que, un, ça considère l’avenir de la planète, parce que ce n’est pas... TransCanada, ce n’est pas un pipeline qui transporte de l’eau claire de la Saskatchewan, ça transporte des sables bitumineux, le pétrole le plus sale qu’il n’y a pas encore sur la planète. Alors, on ne peut pas se décrocher de ça, M. le Président. Et, dans ce sens-là, vous comprendrez - et vous le savez « anyway » depuis le début - que nous, on est en accord avec cette motion-là.

Ce qu’elle nous permet de faire, cette motion-là, aujourd’hui, c’est, d’une part, de nous rappeler que comme gouvernement québécois, au sens de notre loi sur l’environnement, nous avons des pouvoirs et, ces pouvoirs-là, on peut les utiliser lorsqu’on pense qu’il est sain de le faire, notamment pour la qualité de l’environnement qui nous entoure, qui est la nôtre. Mais, dans le cas des sables bitumineux, dans le cas du pétrole, ce qui est problématique, c’est que ce n’est pas rien que notre avenir qui est en jeu, M. le Président, c’est l’avenir de la planète. Les scientifiques sont clairs, il faut que ça reste dans le sol. Nous autres ici, au Québec, on dit : Bien, tu sais, si ça passe, on prendra des redevances. Ça ne marche pas, ça. Alors, c’est clair que la motion nous permet de revenir dire encore une fois, dans ma formation politique, que c’est important que le gouvernement du Québec utilise l’ensemble des leviers qui sont les leurs, le leur, de pouvoir intervenir dans ce projet-là. Alors, c’est sûr que...

Puis là, bon, on voit la conférence de Paris arriver, conférence, d’ailleurs, M. le Président, à laquelle j’assisterai dans la délégation mais aussi du côté du collectif québécois des mouvements sociaux. Parce qu’il n’y a pas d’unanimité. On l’entend, là, on débat entre nous juste sur un projet, et il n’y a pas d’unanimité au Québec, alors on ne peut pas permettre qu’en notre nom le gouvernement du Québec aille à Paris et dise : Nous sommes les leaders mondiaux, nous sommes un des leaders mondiaux au niveau des changements climatiques. Il y a quelque chose qui ne fonctionnerait pas puisque, dans les faits, ce qu’on se rend compte avec les choix qui sont faits au quotidien, il y a comme toute la... Puis restons-en aux oléoducs, puisque c’est de ça qu’on parle aujourd’hui, d’Énergie Est. Toute la bataille contre les oléoducs, Énergie Est mais Enbridge aussi, là, c’est un peu les mêmes enjeux qui sont là, hein, face à ces oléoducs de la honte, face à ces entreprises, ces industries milliardaires qui embauchent des lobbyistes, chèrement payés pour finir par nous convaincre et probablement les gouvernements aussi que, dans le fond, non, ça n’a pas trop d’impact. Alors, nous, on est préoccupés parce que, dans les faits, c’est de l’avenir de la planète qu’on parle, c’est de nos enfants qu’on parle, c’est de notre eau qu’on parle, c’est de nos terres agricoles qu’on parle et c’est de l’air qu’on respire qu’on parle.

M. le Président, vous savez, le rôle que je vais jouer à Paris, pour moi, il est simple, il y a une belle expression qui dit : Être le caillou dans le soulier. Ce que je souhaite, c’est, grâce aux éléments de compréhension que la société civile a développés, et moi aussi d’ailleurs. c’est d’être une espèce de caisse de résonance pour se dire collectivement que, si notre gouvernement va à Paris pour se qualifier de leader, il y a ici des gens qui veillent au grain pour s’assurer de la cohérence.

Et il y a deux tests, pour nous, qui se présentent par rapport à ça. Le premier, bien il est à débat aujourd’hui, c’est la question de TransCanada. Cette bataille, cette bataille au niveau des pipelines, elle est importante, parce que ce qu’on se rend compte, c’est que les gouvernements, les uns après les autres, ont une certaine complaisance face à l’industrie pétrolifère. C’est comme s’ils n’acceptaient pas, un après l’autre, de faire en sorte qu’on sorte de cette logique économique qui est en train de, sans mauvais jeu de mots, brûler la planète. Et ça, M. le Président, on est heureux de savoir qu’au Québec on a du pétrole, c’est une ressource naturelle extraordinaire. Ça fait des millénaires qu’elle est là. On pourrait-u s’en garder un petit peu puis, dans 250 ans, 300 ans, permettre donc à nos enfants, nos arrières de pouvoir utiliser aussi cette matière première dans des composantes qui seront au service au lieu de le brûler dans le transport ?

Alors, M. le Président, en conclusion, je vous dirais que - bien, vous l’avez saisi - on est tout à fait en accord avec la motion qui est sur la table aujourd’hui. Cette motion nous suggère que le Québec devrait avoir le dernier mot face au projet du pipeline d’Énergie Est. À notre sens, M. le Président, il aurait dû avoir le premier mot pour la génération présente et les futures, et ce mot-là aurait dû être « non ». Merci, M. le Président.

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