Hebdo L’Anticapitaliste - 544 (19/11/2020)
Par Dianne Feeley
Les Démocrates voulaient remporter la majorité du Sénat, mais même s’ils gagnent les deux sièges lors du second tour en Géorgie début janvier, ils n’auront qu’une égalité parmi les sénateurs. Cela permettrait à la vice-présidente élue Kamala Harris de faire pencher la balance pour faire adopter des textes législatifs qui, autrement, seraient rejetés (aux termes de la Constitution, le vice-président préside le Sénat). Bien que ce ne soit pas impossible, gagner les deux sièges de la Géorgie est un défi.
Les Démocrates ont perdu leur base salariée
L’élection n’a fait basculer aucune majorité de législature d’État des Républicains vers les Démocrates, un gros revers étant donné que les législatures, en utilisant les chiffres du recensement de 2020, redessineront les circonscriptions électorales au niveau de chaque État et de l’État fédéral. Étant donné aussi que le parti dominant fixe ces limites pour favoriser son maintien au pouvoir pour la décennie suivante, le « charcutage électoral » qui en résultera favorisera les Républicains.
De plus, bien que les deux partis soient tous les deux soutenus par divers éléments de l’élite des affaires — et aient essentiellement la même politique étrangère — depuis l’époque de la présidence de Franklin D. Roosevelt, le Parti démocrate a longtemps été considéré comme plus favorable aux intérêts des travailleurEs, tandis que les républicains représentaient le « business ». Mais compte tenu des années de politiques néolibérales mises en œuvre aussi bien par les Démocrates que par les Républicains qui se sont succédé au pouvoir, de nombreux travailleurEs ne considèrent plus les Démocrates comme leurs représentants.
Biden a gagné des voix par rapport au score d’Hillary Clinton en 2016 et a remporté le vote populaire — de cinq millions de voix — et le collège électoral, mais Trump a augmenté sa base de 9,5 millions de voix. De nombreux commentateurs se demandent si cela encouragera les Républicains à vouloir construire une formule plus large mais basée sur une économie raciste « américaine d’abord ».
Biden ou l’establishment depuis cinq décennies
Biden est un homme politique traditionnel depuis un demi-siècle — l’un des « initiés » de Washington que Trump a dénoncés. Il a remporté son siège au Sénat en 1973 et y a accompli six mandats, suivi de deux mandats en tant que vice-président d’Obama. Au cours de son premier mandat en tant que sénateur, alors que les tribunaux tentaient de renforcer, avec le transport des enfant en bus, la mixité raciale des écoles dans une société ségréguée, Biden est devenu un champion de la lutte contre ces bus. Présidant les audiences de 1991 sur la nomination de Clarence Thomas à la Cour suprême des États-Unis, il a en outre rabaissé Anita Hill, qui accusait Thomas de harcèlement sexuel, et refusé d’appeler à témoigner d’autres femmes qui auraient pu justifier ces accusations.
Biden s’est depuis excusé pour certains de ses votes (mais pas directement auprès d’Anita Hill). Malgré la tentative de Sanders d’amener Biden à adopter dans son programme électoral Medicare for All (le droit à la santé pour touTEs), à mettre en œuvre un Green New Deal (programme écologique), à éliminer la dette étudiante et à établir un salaire minimum de 15 dollars de l’heure, Biden a clairement indiqué qu’il était toujours un démocrate néolibéral.
Si beaucoup de ceux qui ont voté pour lui ne se souviennent pas de son bilan, d’autres espèrent qu’il sera contraint de mettre en œuvre un programme plus progressiste étant donné la crise économique, sanitaire et climatique dans laquelle nous nous trouvons. En fait, compte tenu de l’impasse législative possible qui bloquera les éventuels projets progressistes des Démocrates, l’élite des affaires pourrait considérer la situation résultant des élections comme le meilleur de tous les résultats possibles.
Un message, un commentaire ?