Tiré du site des Artistes pour la paix.
L’urgence de cette mesure s’est intensifiée aujourd’hui avec le Bulletin of the Atomic Scientists qui a décidé de rajuster le cadran apocalyptique à deux minutes et demie avant minuit –signal le plus alarmant qui ait jamais été donné depuis 1953 lorsque la Guerre froide s’est échauffée à la suite des détonations de bombes thermonucléaires aux mains des Américains et des Soviétiques. De plus, le nouveau secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, renouvelant son engagement envers le désarmement nucléaire, a prévenu : « Les tensions montent à l’échelle planétaire, les sabres s’agitent et des propos dangereux sont proférés au sujet du recours aux armes nucléaires. »
Cette nouvelle série de rencontres à l’ONU, qui constitue l’initiative la plus importante des vingt dernières années en désarmement nucléaire, fait naître l’espoir que tous les pays se rendront compte des conséquences humanitaires catastrophiques d’un recours à la moindre des 15300 armes nucléaires en existence. Le Canada a le devoir de s’engager sérieusement dans cette nouvelle mobilisation pour débarrasser le monde d’armes qui menacent l’existence de l’humanité. Près de 950 lauréats de l’Ordre du Canada se sont prononcés en faveur de mesures diplomatiques canadiennes, et une motion a été adoptée à l’unanimité à cet effet par le Parlement.
Le Canada doit surmonter sa réticence initiale à appuyer cette nouvelle action humanitaire. En votant contre la résolution de l’ONU en faveur de pourparlers d’envergure sur cette question, le gouvernement s’est trouvé à déroger à ses antécédents de vouloir travailler de manière constructive au désarmement nucléaire. Le RCCAN rejette l’argument du Canada voulant que de telles négociations soient « prématurées », qu’elles soient inefficaces en l’absence des grandes puissances nucléaires et qu’elles minent le processus lié au Traité de non‐prolifération nucléaire (TNP).
Au contraire, ce sont les grandes puissances nucléaires qui ont miné le TNP par leur refus, depuis près de 50 ans, de donner suite à leurs obligations juridiques de négocier de bonne foi l’élimination des armes nucléaires. En modernisant leur arsenal nucléaire et en boycottant le processus politique menant à cette nouvelle série de pourparlers, les puissances nucléaires ont fait montre d’un mépris à l’égard de l’opinion de la majorité du monde. Même si les puissances nucléaires devaient s’opposer, au départ, à ce nouveau traité, les efforts en vue d’y arriver auront eu pour effet d’élever la norme mondiale contre la possession d’armes nucléaires. Le nouveau traité stigmatisera davantage les armes nucléaires et condamnera cette persistance dans le 21e siècle de la doctrine fallacieuse de la dissuasion nucléaire, qui fait en sorte que les nations antagoniques menacent de s’anéantir mutuellement et d’anéantir en même temps le reste du monde.
La Chine, l’Inde et le Pakistan sont les seules puissances nucléaires établies qui ne se sont pas clairement opposées aux nouveaux pourparlers visés par la résolution de l’ONU. L’abstention de la Chine et la prise de position subséquente du président Xi en faveur d’un monde débarrassé des armes nucléaires soulèvent l’espoir que cette puissance économique dominante du 21e siècle sera ouverte à des mesures d’envergure en vue de l’élimination irréversible des armes nucléaires.
Les Pays‐Bas ont été le seul État membre de l’OTAN à s’abstenir de voter sur la résolution. À l’heure actuelle, le Canada s’en tient à la doctrine militaire de l’OTAN voulant que les armes nucléaires soient la « garantie suprême » de sécurité. Cette politique est en contradiction directe avec « l’engagement sans équivoque de réaliser l’élimination complète des armes nucléaires » que le Canada a pris, de concert avec tous les autres pays, dans le cadre du programme d’action du TNP. Le RCCAN pose la question : Qu’est‐ce qui devrait primer –l’harmonie entre les pays de l’OTAN ou l’engagement mondial envers l’élimination des armes de destruction massive ?
Les programmes de modernisation des grandes puissances ont entraîné une nouvelle course vers les armes nucléaires, ce qui augmente les dangers du recours à ces armes soit par erreur de calcul, soit intentionnellement. En dépit des progrès acquis au cours des dernières décennies, l’ouverture sur le désarmement nucléaire est en train de se refermer. Le Canada, quisouhaite jouer un plus grand rôle dans les affaires de l’ONU, ne peut se contenter d’être observateur sur une question qui concerne le maintien de la vie sur la planète. Il se doit de prendre des mesures positives. Il doit se joindre activement aux nouveaux pourparlers visant l’interdiction, par des voies juridiques, de l’ensemble des armes nucléaires.
Créé à l’initiative du Canadian Pugwash Group, le Rassemblement canadien pour une convention sur les armes nucléaires est un regroupement de la société civile réunissant près de 950 lauréats de l’Ordre du Canada qui ont pressé le gouvernement canadien d’entreprendre une initiative diplomatique majeure en faveur du désarmement nucléaire.