Tout d’abord, en faisant le portrait des transferts gouvernementaux des quinze dernières années, on s’aperçoit que les écoles privées étaient mieux préparées pour affronter les années d’austérité. « De 2001-2002 à 2015-2016, les transferts gouvernementaux ont augmenté de 18 % au privé contre 11 % au public. Cet avantage marqué pour le privé est encore plus important lorsqu’on prend en considération leurs revenus totaux. Ces chiffres nous portent à croire que les établissements d’enseignement privés avaient les reins plus solides et étaient davantage prêts à supporter les compressions », estime Philippe Hurteau, chercheur de l’IRIS et auteur de la note.
Ensuite, des sources de revenus plus diversifiées ont permis aux écoles privées de mieux s’adapter aux aléas du financement gouvernemental. « Alors que les commissions scolaires sont dépendantes à plus de 75 % des transferts gouvernementaux du ministère de l’Éducation, les écoles privées, elles, peuvent compter sur un plus large éventail de sources de revenus. Par exemple, les "contributions des élèves" (droits de scolarité) représentent 29 % de leurs revenus ; leurs "revenus généraux", 16 % et les "dons", 5 %. Au total, la moitié de leurs revenus proviennent d’ailleurs. Cette diversification les prémunit contre les courses au déficit zéro et autres objectifs de compressions imposés par Québec », affirme le chercheur.
Il est important de mentionner également que la population fréquentant les écoles publiques ne ressemble en rien à la « clientèle » du privé. « Les écoles privées ont la possibilité de procéder à un écrémage de la clientèle et de ne sélectionner que les "meilleurs éléments", qui nécessitent beaucoup moins de suivi que des élèves avec des troubles d’apprentissage ou provenant de milieux plus défavorisés. En effet, de 2001-2002 à 2012-2013, le taux d’élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage (EHDAA) est passé de 12 % à 22 % dans le réseau public alors qu’il se situe à 5 % dans les écoles privées. Pour la même période, la formation professionnelle dans le secteur public a également augmenté de 25 % et la formation des adultes de 13 %. La responsabilité éducative qui incombe aux écoles publiques est nettement plus complexe et exige conséquemment des ressources supplémentaires », explique Philippe Hurteau.
« Une tendance se démarque clairement : autant pour les centres de la petite enfance (CPE) et les CLSC que les commissions scolaires, le gouvernement libéral laisse tous ses réseaux publics se détériorer au profit de l’essor d’établissements privés, qui opèrent selon leurs propres objectifs et suivant leurs propres intérêts », conclut l’auteur de la note.
L’austérité en éducation : les écoles privées sont-elles réellement désavantagées ? est disponible gratuitement sur www.iris-recherche.qc.ca. La Fédération autonome de l’enseignement a participé au financement de cette étude.