Depuis quelques jours, beaucoup d’encre a déjà coulé sur les cendres encore chaudes du centre-ville de Lac-Mégantic, pulvérisé par l’explosion du train de la Montreal, Maine & Atlantic.
Au-delà des accusations, des supputations et des théories sur ce qui s’est passé, au-delà de la négligence de la compagnie et de la sécurité générale du transport par chemin de fer au Québec et au Canada, il y a un aspect plus global qui doit être scruté avec la plus grande attention de la part de la société civile, des gouvernements, sans oublier les médias d’information.
Je parle du rôle des gouvernements devenus promoteurs du développement accéléré et aveugle du pétrole et du gaz, sous l’influence des grandes corporations.
Malgré tous les appels à la prudence, le principe de précaution, voire même la logique la plus élémentaire, il semble bien que nous ayons, en toute connaissance de cause, atteint et même dépassé les limites des mesures de sécurité encore applicables après des années de dérèglementation sauvage. Nous sommes aujourd’hui impuissants devant les lobbies industriels et leur cupidité toujours plus méprisante.
Déjà, les conséquences environnementales de la production de pétrole telles que le réchauffement climatique, la destruction de la couche d’ozone, le smog et les pluies acides, ses impacts sur la qualité de l’air et de l’atmosphère ou encore la contamination des sols, des nappes phréatiques, des cours d’eau et des océans, tout cela aurait dû alerter et guider nos élus.
Mais ceux-ci ont été frappés par la fièvre de l’or noir et du gaz miraculeux, au point de leur faire perdre de vue les besoins fondamentaux de nos communautés, à commencer par la protection des populations.
Les accidents dans le transport des combustibles fossiles augmentent proportionnellement avec l’accroissement de leur production et de leur transport, que ce soit par train, par bateau ou par pipeline, et nos autorités poussent toujours plus fort en voulant doubler, voire tripler la production de pétrole et de gaz au pays.
La volonté de nourrir l’avidité des compagnies et de leurs actionnaires, et d’engranger toujours plus de revenus en taxes et impôts, a complètement aveuglé nos dirigeants.
Or cette soif pour le pétrole est d’autant plus inconsidérée qu’elle vise d’abord à satisfaire les marchés extérieurs et non les besoins des Canadiens.
Il faut donc, dès maintenant, prendre une pause, ralentir la cadence. Les populations sont exposées à des risques de plus en plus élevés. Rappelons-nous que les trains et les pipelines traversent un nombre de plus en plus important de villes et villages partout au Québec, au Canada et en Amérique, sans oublier que les ports sont souvent situés aux abords de communautés.
Il faut ensuite réduire sérieusement notre propre consommation de combustibles fossiles et passer au plus vite aux énergies vertes et renouvelables.
Nous avons un devoir de mémoire indélébile et une responsabilité collective devant la communauté de Lac-Mégantic. Il est à espérer que cette tragédie marquera le début d’une réflexion sur notre esclavage face au pétrole et l’amorce d’une transition vers une société plus verte.
André Bélisle, président
Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA)