La charte des valeurs Québécoises : Unité ou division ? ― Hypocrisie, failles
Le projet semble plaire à certains, mais pour moi, le sermon sonne plutôt à mes oreilles comme de l’hypocrisie crasse et une stratégie électoraliste déplorable. J’ai surtout un certain dédain envers le jeu de la carte identitaire qui polarise la population. Étant moi-même très critique contre les deux, l’état et la religion, je me sens comme un spectateur à une joute de boxe sans pour autant prendre parti pris : les étatistes dans un coin avec les nationalistes et les néo-athées, dans l’autre les religieux mais majoritairement ceux de couleurs, dont les signes ostentatoires font partie intégrantes de leurs cultures. De ce fait découle l’injustice majeure. Certaines personnes sont contre et certaines pour, peut importe leurs allégeances politiques. Pour ceux qui restent, on ne peut être neutre sur un train qui bouge.
On ne peut ignorer le fait que cette charte nécessite le besoin de $2 millions en propagande et on ne peut que concéder que le Parti Québécois envisage la pilule comme étant difficile à faire avaler. Ce qui indigne plusieurs est le manque de sincérité dans cette démonstration irrationnelle de deux poids deux mesures ; comme par exemple en démontrant un biais pour le catholicisme ou en permettant aux élus de ne pas être affectés pas les mesures en ce qui a trait aux signes ostentatoires. Comment peut-on faire avancer la laïcité, tout en démontrant un asservissement envers l’église catholique ?
Je m’oppose à la justification culturelle qui fait prévaloir un certain précédent historique. En faisant valoir que, puisque l’église a aidé à fonder le nouveau monde, elle devrait avoir droit à sa place spéciale dans notre folklore. C’est de la foutaise. Je ne nie pas l’importance de Jeanne-Mance ou de l’hôtel-Dieu, mais la supposition que le nouveau monde n’aurait pas été développé sans l’église, cela est fallacieux. Cela va dans le même sens que l’attribution de la morale à la religion, même si celle-ci lui est antérieure. Bien sur, nous devons potentiellement quelques bons coups à l’église et on ne peut daigner sa participation dans notre histoire, mais réalité étant que cette organisation supportait l’esclavage, était en grande partie responsable pour les atrocités commises dans les écoles résidentielles autochtones qui on finalement fermé en 1996 et que cette même église a seulement su demander pardon pour son antisémitisme en 1990. Quand je vois le crucifix, ce machin de torture, je ne peux m’empêcher de l’associer à toutes ces injustices.
Nous pouvons et nous devons accueillir un débat d’idées, la chose est primordiale, mais il est de notre devoir envers l’équité de respecter la liberté de religion. Ne tombons pas dans le piège de la ‘rescousse’ de l’état avec sa narrative, qui en passant est similaire à la religion organisé, le deux servent de béquilles. Les deux sont en partie dédié à détourner l’attention des vrais problèmes (i.e. la lutte des classes). Le tout me semble comme une mascarade. Pendant la conférence de presse annonçant la motion, lorsque questionné à propos de l’assermentation sur la bible, Bernard Drainville répondit : "Mon dieu !?". Soi, parce qu’il était potentiellement déstabilisé par le flagrant double standard de leurs actions ou par manque de préparation sur la question. Je ne pouvais que trouver la réponse risible.
En réaction à l’annonce nous avons pu lire les paroles rapportées par la presse de la part Charles Taylor, (philosophe) qui a siégé à la commission sur les accommodements raisonnables :
« Le gouvernement sera très ouvert au patrimonial pour les Québécois, mais très fermé pour les autres religions. C’est extrêmement injuste. C’est une neutralité truquée. C’est du deux poids, deux mesures »
« C’est une vision ethnocentrique de la religion. Les religions ne sont pas toutes les calques de la religion catholique. Si on est sikh, c’est l’essence même de la religion que de porter un turban. Du point de vue d’un sikh, l’État ne sera pas neutre. »
« Le message c’est : si vous pratiquez ce genre de religion, ne venez pas ici. Vous n’êtes pas égaux avec les autres. Et pour ceux qui sont venus sans savoir que ça allait arriver, ça va être encore pire. Ils se sentiront comme des citoyens de seconde zone. Pour moi, c’est inacceptable. »
« Les gens vont se dire : je ne suis pas accepté ici. On refuse de me voir comme je suis. C’est un peu comme les Noirs aux États-Unis dans les années 60. Ils étaient invisibles. On refusait de les voir. »
« Ça va renforcer des attitudes négatives par rapport, par exemple, aux musulmans. Ça va diviser Montréal profondément par rapport au reste de la province. »
En parallèle voici son confrère, Gérard Bouchard (sociologue), le coprésident de la commission de consultation sur les pratiques d’accommodement reliées aux différences culturelles (commission Bouchard-Taylor), qui défend la légitimité de certaine mesure dans un écrit intitulé « Qu’est-ce que l’interculturalisme ? » :
« Peuvent être, selon moi, considérés comme légitimes en vertu du critère de la préséance ad hoc :
a) l’institution du français comme langue publique commune ;
b) une place prédominante accordée à l’enseignement du passé francophone dans les cours d’histoire ; en d’autres mots : une mémoire nationale inclusive mais qui octroie une prépondérance à la trame majoritaire,
c) la place prioritaire qui est actuellement accordée à la présentation des religions chrétiennes dans le nouveau cours d’éthique et de culture religieuse,
d) les sépultures nationales de chefs d’État dans une église catholique,
e) le maintien de la croix sur le drapeau du Québec (qui a déjà fait l’objet de contestations)
f) l’installation de décorations de Noël sur les places ou dans les édifices publics,
g) la restauration et l’entretien aux frais de l’État d’églises catholiques auxquelles on reconnaît une valeur patrimoniale
h) la sonnerie quotidienne des cloches des églises catholiques à divers moments de la journée
Par contre, je considère les cas suivants comme une extension excessive du principe de la préséance ad hoc :
– a) le maintien du crucifix sur le mur de l’Assemblée nationale, dans les salles d’audience des tribunaux ou dans les établissements de santé,
– b) la récitation de prières aux réunions de conseils municipaux,
– c) le financement de postes d’aumôniers ou d’animateurs de pastorale catholiques dans des hôpitaux publics, à même les deniers de l’État et à l’exclusion d’autres religions
– d) l’interdiction générale du port de signes religieux chez tous les employés des secteurs public et parapublics
– e) la référence à la suprématie de Dieu dans le préambule de la Charte canadienne des droits et libertés
– f) l’inclusion dans une charte d’articles ou de clauses établissant une hiérarchie formelle entre la majorité culturelle et les minorités,
– g) l’interdiction du port de la burqa dans les rues et places publiques (sauf pour motif de sécurité ou autres motifs graves) »
En gros, deux experts en la matière, qui ont siégé devant cette consultation publique et qui ont recherché et débattu de la chose longuement, sont en désaccord avec la position du gouvernement. En effet ils démontrent significativement plus de modération.
Moi personnellement, mes valeurs primaires sont la parité mais aussi liberté. Certes à mes yeux la religion est majoritairement néfaste, mais on ne règlera surtout pas le problème en mettant une religion sur un piédestal plutôt qu’une autre. Dans une certaine mesure, j’aurais donné mon consentement pour la charte, elle aurait put créer un précédent dans l’avancement de la séparation de l’Église et de l’État, et peut-être même avancer l’athéisme sur la scène mondiale. Que de faux espoir ! Si c’était pour séparer l’État et la religion, par exemple : en bannissant la croix à l’Assemblée Nationale, en mettant fin au financement des écoles religieuses ou en interdisant la prière dans les fameux conseils municipaux du Saguenay-Lac-St-Jean (personnellement, je voudrais pousser encore plus loin en retirent la croix du drapeau), je serrais tout à fait pour. Mais la charte comme elle se trouve avec ses doubles standards, je ne peux que la dénoncer. Que le PQ, PLQ et la CAQ défendent le crucifix à l’Assemblée Nationale pour des raisons culturelles c’est ridicule, Duplessis serait fier d’eux. (Avant 1936 il n’y en avait pas de crucifix et ce n’était pas la fin du monde). À noter que la notion de supériorité est inhérente aux positionnements religieux, le tout est de mise lorsque qu’on donne préférence a une religion plutôt qu’a n’importe-quel autres des deux milles et plus dieux et divinités. ‘Ils/elles sont tous inferieur(e)s à la mienne’, voici la rationalisation prédominante.
Ma position est nuancée par apport signes religieux ostentatoires dans les postes publics et para- publics. Oui, nous parlons de positions qui sont une extension de l’état, et pour prendre en exemple les enseignantes qui portent les burqas, oui, elles sont dans une position d’autorité envers les enfants, et face à ce que je reconnais et définit comme l’assujettissement des femmes, cela pourrait par exemple influencer une jeune fille musulman. Ceci pourrait avoir une infime chance de renforcer les pressions sociales des communautés pour poursuivre ces coutumes, mais en contraste avec d’autres fortes pressions sociétaires (pression familiales/intergénérationnelles, patriarchie) qui on beaucoup plus d’implications enracinées, le prétexte est négligeable. La simple projection de tolérance de par l’état n’amène aucune répercutions négatives. Un(e) professeur(e) qui porte le hijab ou le turban, est contraints aux mêmes responsabilités que tous autres par le fait de ne pas prêcher sa spiritualité. Je fais autant confiance à un bouddhiste qu’à un musulman pour remplir la tache. Je dénonce le discours démagogique du PQ : « On a décidé de protéger les enfants ». Réalistiquement parlant, en quoi de productif est-ce que l’interdiction d’une enseignante de porter son voile nous servirait, tout simplement, nous serviront seulement à aider à l’ostraciser. Ce qui n’aide pas du tout. Rien ne sert à pousser les gens plus loin. Générer le changement social dans le cadre de la religion ne vient pas de forces extérieures (qui souvent font augmenter le fondamentalisme), il s’agit d’une l’évolution formé à l’intérieur de la communauté. Influencé majoritairement par des conditions socio-économiques. Je me dois aussi de mentionner que de pousser une loi qui force à découvrir le visage lorsqu’on donne ou reçoit des services, c’est ridicule. Combien de femmes au Québec portent le niqab ?
On doit vraiment légiférer pour ce si petit groupe ? Et combien d’entre elles refuserait de se découvrir pour être identifier ou recevoir un service ? Également, et surtout sérieusement parlant, combien de cette infime portion travaillerait pour l’état ? Je gagerais 0. Je doute même que ces femmes quittent la maison sans un gardien. Le journal ‘The Star’ rapporte qu’il y a environ 25 femmes au Québec qui porte le niqab. Quelle loi inutile ! On monopolise toute cette énergie pour quelque chose d’inconséquent.
L’empêchement de porter les signes ostentatoires est dans une lignée similaire de l’autoritarisme qui a jadis défendue la prohibition de l’alcool et présentement la drogue. Qui est le gouvernement pour nous dire quoi mettre sur et dans notre corps ? C’est comme si le gouvernement nous empêcherais de manger nos deux rotteux avec une grosse graisseuse, j’pas sure qu’on aimerait ça !
N’importe qui se positionnant contre la religion, n’importe qui avec une fibre libertaire dans son corps, doit reconnaître la liberté de religion personnelle. En quête de rigueur, il s’agit de trouver un équilibre tout en portant atteinte à la religion organisée. Dire collectivement ce que nous défendons ne doit pas enfreindre sur les mœurs individuelles. L’équité et la parité sont primordiales et je concéderai que nos valeurs collectives pourraient être réaffirmées, mais seules nos actions peuvent démontrer notre éthique. Dans une réalité ou l’inégalité de richesse entre les hommes et femmes toujours aussi prévalent, je ne peux que trouver hypocrites les agissements récent du gouvernement. Dans le débat contre la religion nous devons avancer avec diplomatie et avec respect pour atteindre le but désiré. Dans le contexte géopolitique actuel, qui se trouve amplifier par les media de masse, l’islamophobie et la peur de l’autre sont une constante.
L’islamophobie n’a pas besoin de renfort.
Moi, je vois ça comme ça : la jeune femme musulmane qui revendique le libre arbitre dans son port du voile ; je suis en désaccord avec elle, mais ce n’est pas à moi ou à d’autres de changer son comportement. Avez-vous déjà demandé à une musulmane si elle se sent opprimer par son port du voile ? 99.99% diront non et que c’est leurs choix. Dure est la tache de changer les habitudes d’un croyant, et pour ce qui en est de forcer la donne, à mes yeux c’est penne perdue. Plus de chances d’atteindre du succès en administrant des médicaments à un mort. Je crois que les mesures qui en découlent pourraient donner lieu à encore plus de ghettoïsation et d’antagonisme, et il y en reste que dans la réalité présente, la grande majorité de la diversité ethnique du Québec s’entend très bien. Il est fallacieux de prétendre vouloir répondre a une crise. N’oublions pas les accusations de la part d’André Boisclair comme quoi Mario Dumont était derrière le controversé code d’Hérouxville.
Je pense que nous devrions tous adopter une approche nuancée envers le débat et nous pourrions gagner à former des gestes pensée et concrets pour rectifier les failles. Mais je ne peux m’empêcher de me réjouir des carences de l’État. Je ne peux m’empêcher de me questionner sur ce que les gouvernements font de positif. Nous pouvons trouver notre propre voix qui diffère fortement de celle de l’état, et faire valoir nos vraies volontés.
Selon Bernard Drainville, la neutralité doit être atteinte par l’individu et l’état na pas le même standard. Nos valeurs collectives doivent être capables de se définir sans enfreindre la liberté individuelle. La rhétorique du gouvernement sonne comme une réponse aux cris minables d’une minorité, la même qui demande l’intervention de « gouvernemaman » pour les « protéger » de la nourriture hallal (trop ignorants pour lires une étiquette). Le PQ semble n’avoir aucun gène à courtiser ce petit groupe de bigots exécrables. Tout en étant une petite minorité de ceux qui vote, elle semble ne pas être négligeable pour le présent gouvernement qui veut renforcer le débat identitaire, la seul corde qui semble être à son arc.
Pour un gouvernement qui ce dit pour l’autodétermination des peuple, je trouve lamentable d’empiéter sur l’autodétermination des individus. Une des responsabilités le plus souvent mentionner pour justifier l’état est la protection des minorités. On ne peut que dénoncer la médiocrité de faillir à sa tache première, mais l’antagonisme religieux sert à dévier l’attention des vrais problèmes dans le contexte actuel, ce qui sert a ceux au pouvoir. Maintenant le seul résultat du débat, serra une continuation du complexe de persécution des religions.
En campagne électorale, le gouvernement suggérait une charte de la laïcité, elle est maintenant devenue une charte des valeurs. À défaut d’avoir la rigueur de défendre la laïcité équitablement et raisonnablement, le gouvernement veut mettre l’emphase sur nos valeurs communes. Exercice qui me semble autoritaire en soi et surtout redondant. L’éthique personnel et collective, malgré ses lacunes, est déjà encadré par plusieurs paramètres (e.g. sociaux, judiciaires), une charte qui crée des divisions, qui entrave les libertés individuels ne peut qu’enflammer un débat sur un conflit superficiel qui auras comme seul résultat d’instiguer la xénophobie.
Premièrement je crois que l’on doit faire distinctions entre liberté de penser et de conscience, et la religion organisée. On doit faire la part des choses entre l’islam politique et un musulman pratiquant, ou une-grand-mère qui porte un chapelet versus le crucifix à l’Assemblée Nationale. Je suis un athée fort convaincu, je suis contre les exemptions de taxes pour l’église, contre l’endoctrinement des enfants et leurs mutilations systémiques, contre la subjugations des femmes qui est innée chez les religions abrahamiques, je suis pour la séparation de l’état et de la religion, mais nous devons par contre prendre une approche sensible. Pour moi un jour la religion fera parti de l’enfance de la civilisation. Si nous prenons exemple du siècle des lumières, le développement de la pensée critique se doit à l’éducation et à une dédicacions à l’avancement des idées. La rigueur intellectuelle, la bonne vielle méthode socratique et/ou dialectique sont nécessaire pour combattre l’obscurantisme et la superstition. Les avancements comme ceux de la révolution tranquille, sont le produit de pressions sociales, certes le recul de la religion organisée dans le domaine de l’éducation mérite la reconnaissance, mais qu’en est t’il d’une concession si simple comme de retirer maintenant la croix à l’assemblé ? Ce manquement démontre le but de l’exercice : divisé pour régner. Depuis la crise manufacturée d’Hérouxville en 2008, les médias démontrent leurs complicités dans la machination de cette fausse crise. La rationalisation la plus simple est l’accaparement facile de capital politique de la part du PQ avec une politique réactionnaire. Surmontons les divisions fictives, la tolérance est notre seule issue.
Sur ce, je vous laisse sur un passage d’Errico Malatesta, socialiste libertaire et athée. Malgré son opposition à l’église, il reconnait que le respect de la liberté doit prévaloir. Nous gagnerions tous à nous inspirer de son message :
« En tout cas, ce n’est pas une question d’être bon ou mauvais, c’est une question de liberté, la liberté pour tous, la liberté pour chaque individu tant qu’il ne viole pas la liberté égale des autres. Personne ne peut juger avec certitude qui est bon et qui est mauvais, qui est plus proche de la vérité et quelle est la meilleure route pour le plus grand bien de tous et de chacun. L’expérience à travers la liberté est le seul moyen d’arriver à la vérité et les meilleures solutions, et il n’y a pas de liberté s’il n’y a pas la liberté de se tromper.
À notre avis, par conséquent, il est nécessaire que majorité et minorité doivent réussir à vivre ensemble dans la paix et la rentabilité d’un commun accord et de compromis, par la reconnaissance intelligente des nécessités pratiques de la vie en commun et de l’utilité des concessions que les circonstances rendent nécessaire. »