Tiré du site du Courrier.
On le savait pourtant depuis longtemps, mais le voir l’a rendu trop écoeurant : en Libye, des Africains subsahariens sont vendus comme esclaves, lors de ventes aux enchères publiques. Des jeunes qui ont quitté leur pays et leurs proches pour fuir les persécutions, la guerre ou la misère sont présentés devant de potentiels acheteurs, puis « adjugés » pour quelque 400 francs.
Cette réalité est décrite depuis des mois par une infinité de témoignages. Des organisations internationales alertent régulièrement l’opinion sur ces pratiques – et sur toutes les autres horreurs infligées aux migrants en Libye. Mais comme nous le rappelions encore récemment (Le Courrier du 27 octobre), cela n’a pas empêché l’Union européenne d’augmenter la sous-traitance du contrôle de la Méditerranée aux gardes-côtes de ce pays, devenu terre de tous les abus depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi. Bref, un « trou noir qui arrange l’Europe », comme l’a qualifié Amnesty.
Bien sûr, les violences contre les migrants africains ne datent pas d’hier. Mais le chaos dans lequel s’est enfoncé la Libye à la suite de la mort du raïs a entraîné une multiplication des exactions, tant le pays est livré à la seule loi des milices et des trafiquants. Et la coalition internationale menée par la France, qui a précipité la fin de Kadhafi avant de fuir le bourbier, porte une lourde part de responsabilité.
En accueillant le 13 novembre la troisième rencontre du « groupe de contact de la Méditerranée centrale », la Confédération a annoncé vouloir s’engager activement pour la protection des réfugiés et des migrants passant par la Libye. Mais la promesse sonne affreusement creuse. Le haut-commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, Zeid Ra’ad Al Hussein, l’a relevé lui-même, le lendemain, en taxant la politique d’aide aux gardes-côtes libyens d’« inhumaine ».
Dans la situation actuelle, agir activement pour empêcher réfugiés et migrants de quitter les côtes libyennes revient à se rendre complice des crimes commis de l’autre côté de la Méditerranée. Aucune politique de « protection des frontières » ne peut justifier cela. Peu importe si ces actions sont accompagnées d’hypocrites déclarations de bonnes intentions.
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