Édition du 19 novembre 2024

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Racisme

L'épouvantail de l'islamophobie

C’est reparti. Justin Trudeau vient de nommer une responsable à la lutte contre l’islamophobie, Amira Elghawabi. Il s’agit d’une décision qui réjouit le coeur des multiculturalistes, tant anglophones que francophones, car elle vise en fait le nationalisme québécois, et ce dans la plus stricte ligne trudeauiste, de celle de Pierre-Elliott le père à celle de son fiston Justin. Ceci peu importe que la responsable en question ait tenu dans le passé des propos qui frôlent le racisme envers les Québécois et Québécoises. Le nationalisme québécois, voilà l’ennemi à abattre, même pour certains fédéralistes francophones !

On parle beaucoup d’islamophobie, mais on n’a jamais donné une définition claire. On l’assimile implicitement à une forme de xénophobie qui viserait la culture religieuse d’un groupe ethnique en particulier, c’est-à-dire les Arabes. On confond ainsi critique légitime ou distance intellectuelle à l’endroit d’une religion et hostilité présumée envers un groupe ethnique. Il importe de séparer ces deux concepts.

Tout d’abord, il faut admettre que l’Islam est une religion, un système de pensée, une mystique, une philosophie et non une ethnie. Bien entendu, il existe des nations à majorité islamique (et d’autres à majorité chrétienne) comme dans la plupart des États arabes ou en Turquie, mais la religion mahométane compte aussi de nombreux adeptes en Afrique subsaharienne et en Asie centrale. Elle représente une réalité culturelle et non ethnique.

Comme toutes les religions, l’Islam forme un tout, il se présente comme l’expression de la vérité suprême, mais il compte différents courants de pensée. Les discussions théologiques n’y manquent pas entre les tenants de l’un ou l’autre de ces courants d’idée ; tout dépend de l’interprétation que différents groupes font de leur foi. C’est pareil dans le christianisme et le judaïsme. On peut critiquer l’Islam (ou n’importe quelle autre religion) à bon droit. L’attitude de la population de chez nous à l’endroit des religions est diverse : plusieurs personnes sont agnostiques, d’autres athées, certaines adhèrent à des religions autres, sans oublier l’indifférentisme à l’endroit du phénomène religieux comme tel. On a beaucoup critiqué, et souvent avec virulence, le catholicisme au Québec dans foulée de la Révolution tranquille ; on lui a fait une multitude de procès, parfois injustes ou inexacts sur le plan historique. Pourrait-on donc accuser bien des Québécois et Québécoises de "catholicophobie" ?

Rien ne prouve une hostilité particulière de l’ensemble de la population québécoise vis-à-vis de l’Islam. L’appui à la loi 21 n’en constitue aucunement une preuve.

Le problème ne provient pas de l’Islam comme religion, mais du courant l’intégriste, auquel s’opposent d’ailleurs plusieurs musulmans modérés. Doit-on donc traiter ceux-ci d’islamophobes ? L’intégrisme ne fait pas consensus au sein des communautés musulmanes. C’est la même chose pour l’intégrisme judaïque, le sionisme dont est issu l’État hébreu qui bénéficie cependant du soutien sans failles de la plupart des classes politiques occidentales.
Le danger survient lorsque certains adeptes d’une religion veulent la transposer dans le secteur politique, comme c’est le cas pour plusieurs intégristes musulmans qui s’opposent à la loi 21 et cherchent à infiltrer l’État en exigeant le droit de porter leurs signes religieux sur leurs heures de travail dans les postes d’autorité de la fonction publique. La séparation de l’État et des religions est pourtant un des acquis majeurs de la démocratie : la liberté de pensée et d’expression garantie par l’absence de religion d’État.

Le gouvernement Trudeau s’aveugle volontairement sur ses propres contradictions. Fervent partisan d’Israël, il ferme les yeux sur l’oppression que le gouvernement israélien fait subir au peuple palestinien, pourtant d’origine arabe et musulman dans sa grande majorité. Mais le cabinet libéral prétend par ailleurs vouloir lutter contre l’islamophobie qui sévirait au Québec.
Il se présente bien un problème de racisme en Occident (dont au Canada) mais il ne loge pas où on le croirait : c’est celui de "l’arabophobie", surtout du côté des classes politiques sionistes auxquelles appartiennent les libéraux fédéraux. Les médias ont longtemps présenté les Arabes comme un bloc formé de fanatiques religieux et infecté par le "terrorisme", surtout les Palestiniens et Palestiniennes.

Cependant, ce racisme larvé n’était jamais présenté pour ce qu’il était : du mépris haineux à l’endroit de tout un peuple qui luttait (et lutte encore) pour sa libération. Le cabinet Trudeau continue à soutenir Israël et indirectement, qu’il le veuille ou non, le racisme très réel d’une bonne partie de l’opinion israélienne à l’endroit de ses voisins palestiniens. Cherchez l’erreur...
Il faudrait donc ajouter "l’arabophobie" à la liste des racismes déjà officiellement répertoriés par les organismes internationaux et acceptés par les gouvernements.

Pour finir, certains partis politiques fédéraux et toute une partie de l’opinion publique canadienne-anglaise seraient bien inspirés de procéder à un examen de conscience au sujet de leur propre hostilité inavouée envers les Québécois et Québécoises... Madame Amira Elghawabi devrait donner le bon exemple en premier.

Jean-François Delisle

Mots-clés : Québec Racisme

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