La Cour Suprême (a entendu ce mercredi, 4 mars) la cause King vs Burwell. Encore une fois, la loi Affordable Care Act (ACA) est entre les mains des neuf juges de la plus haute cour du pays. Contrairement à la cause National Federation of Independant Business vs Sebellius, qui affirmait le mandat individuel mais rejetait son extension à Medicaid [1]i, celle-ci ne questionne pas la constitutionnalité de la loi mais plutôt divers enjeux statutaires qu’elle qualifie de : « quasi frivoles, reposant sur une histoire inventée des intentions du Congrès (et de) légers ». La cause précédente a de fait, nié l’accès à une assurance maladie à la moitié des 17 millions de ceux et celles qui devaient bénéficier de la loi par son extension à Medicaid. Si le jugement va en faveur des plaignants cette fois-ci, ce pourrait être un autre 8,2 millions de personnes qui se retrouveraient sans assurance et la loi entrerait dans sa spirale de mort.
Naturellement, les frères Koch mettent tout leur poids dans cette opération.
Dès le début ils ont, avec leurs affiliés, tenté par tous les moyens d’empêcher l’adoption de la loi. Ils ont travaillé à chaque élection qui ont suivi, à de défaire les candidats-es qui la soutenaient. Plus récemment, ils se sont attaqués à barrer le chemin à sa mise en vigueur. Par exemple, empêcher l’application de son extension à Medicaid au Tennessee le mois dernier. L’influence des Koch se fait sentir pratiquement à toutes les étapes de l’actuelle poursuite.
Le mois dernier, Mother Jones notait : « Cette poursuite a ses origines dans une théorie légale concoctée par un groupe d’avocats conservateurs en 2010, au cours d’un conférence sous les hospices du American Entreprise Institute (AEI) un groupe de réflexion d’extrême droite ». Ce groupe est financé en grande partie par les frères Koch. David Koch siège d’ailleurs à son Conseil national. Michael Greve était un des conférenciers à la rencontre (de 2010). Il enseigne maintenant le droit a l’Université George Mason où le Centre Mercatus, ostensiblement anti règlementation, financé par les Koch, est installé. Parlant d’ACA, M. Greve a déclaré : « cette cochonnerie doit disparaitre ; c’est une question d’hygiène politique. Peu importe la manière ! Qu’on la démolisse morceau par morceau ou qu’on l’attaque au cœur, qu’on la rende inopérante et la laisse au bord du chemin ou qu’on l’étrangle ! Je me fiche de qui le fera ; que ce soit une cour ou le Congrès américain. Toute mesure prise dans ce sens, tout dollar dépensé pour cela en vaut la peine. N’importe quelle poursuite en ce sens mérite d’être entendue. Tout discours ou contribution à un panel de discussion qui vise cet objectif rend service aux États-Unis ». Mtre Greve continue toujours de commenter la cause King vs Burwell ; encore récemment il a comparé la réforme (de l’assurance maladie) à l’Holocauste [2].
Mtre Greve a travaillé sous l’influence des Koch au Centre pour les droits individuels, mais qu’il ait été le président et qu’il siège encore au Conseil d’administration de Competitive Enterprise Institute est probablement le plus significatif. Les frères Koch soutiennent lourdement cet institut qui « coordonne et finance les causes, King vs Burwell et celle devant la Circuit Court du District de Columbia, dite Halbig vs Burwell ». C’est cet institut qui a recruté Mtre Michael Carvin qui a déposé les deux plaintes et qui assurera la défense devant la Cour Suprême. Il a déjà joué ce rôle dans la cause de 2012.
Pour poursuivre l’examen des assauts des frères Koch contre l’ACA il faut voir le rôle que joue un autre élément de leur armée, soit le Cato Institute. Il a fourni à ceux et celles qui attaquent la loi, la majeure partie des arguments les plus costauds. Le directeur de sa division Health Policy Studies, M. Michael Cannon, a travaillé pour d’autres entités des Koch dans la passé, dont le Citizens for a Sound Economy et la Citizens for a Sound Economy Foundation. De là, il a combattu les règlementations sur le tabac entre autre. En 2012, dans le brouhaha qui a entouré la main mise des Koch sur l’Institut Cato, il s’est exprimé publiquement dans une entrevue à NPR [3] : « C’est un enjeu très difficile et tout le monde à Cato est affecté par cela. Nous n’aurions plus d’emploi sans Charles et David Koch. Ce sont des milliardaires qui financent le mouvement libertarien. Pas seulement l’Institut Cato mais bien d’autres groupes où j’ai personnellement travaillé comme d’autres à l’Institut. Nous leur devons beaucoup ».
Mtres Cannon et Jonathan H. Adler qui enseigne le droit à Case Western Reserve Law, sont ceux qui ont le plus agressivement développé les théories douteuses qui soutiennent l’actuelle poursuite. Ils se sont associés en 2011 et ont publié ensemble, un article en juillet 2012. Ils y soutiennent que le ministère du revenu (IRS) a agit dans l’illégalité (dans l’application de la loi) et que les crédits d’impôt et les subventions qu’il accorde ne devraient pas être appliqués aux personnes qui achètent leur assurance dans le marché d’échange géré par le fédéral. Mtre Cannon a répandu cette théorie sans arrêt, dans les médias, dans les publications de Cato, sur Twitter, dans les colonnes du magazine Forbes, partout où il pouvait trouver le moindre espace pour s’exprimer. Le mois dernier, il a participé à un débat à l’école de droit de Georgetown (University). Il a aussi participé à ce genre d’exercice en ligne. En décembre dernier, avec Mtre Adler il a déposé leur mémoire en appui avec la cause actuelle.
Les liens entre Mtre Adler et les frères Koch sont sans surprise. Même si comme Mtre Cannon il a critiqué leur rôle dans le tourbillon de leur main mise sur le Cato Institute en 2012. Il a travaillé au Competitive Enterprise Institute de 1991 à 2000. Il est aussi lié à leurs fonds pour avoir siégé à la Legal Foundation Board, au Cato Supreme Court Review Board, et au Conseil d’administration de la Fondation pour la recherche en économie et en environnement. Il a aussi joué un rôle à titre de membre sénior au Property & Environnement Research Center.
Donc, ont peut comprendre que la majeure partie du financement et des arguments juridiques qui fondent la cause King vs Burwell a des liens avec les industries Koch. En plus, à côté de tout ce qui a été dégagé ici, un coup d’œil aux autres associés dans la cause montre encore plus de traces et de liens avec des entités liées aux frères Koch :
– Hartland Institute,
– Citizens Council for Health Freedom (une partie du State Policy Network),
– Galen Institute (une autre partie du State Policy Network),
– Jeremy Rabkin, professeur de droit à la George Mason University et qui a des liens formels avec AEI et le Center for Individuels Rights,
– Landmark Legal Foundation,
– Mountain State Legal Foundation,
– Pacific Research Institute,
– Individual Rights Foundation,
– Reasearch Foundation,
– Washington Legal Foundation.
Tout cela nous parle de l’influence que les Koch ont exercé sur à peu près la moitié des 21 mémoires déposés en soutient à la cause contre l’ACA ; soit environ la moitié si vous ne tenez pas compte de ceux des États et de certains-es élus-es. Il se peut que le plaignant s’appelle « King » mais dans le cœur, l’esprit, l’intelligence et ….le compte de banque de la poursuite, ce sont les Koch les véritables acteurs.