Édition du 17 décembre 2024

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Amérique centrale et du sud et Caraïbes

L’archétype paramilitaire du Brésil de Bolsonaro

Depuis l’investiture de Jair Bolsonaro, les attaques aux opposants politiques au Brésil ont augmenté. Les menaces de mort, l’exil et les attentats envers ces derniers sont à l’ordre du jour. Les liens de son fils avec les groupes criminels accusés d’avoir assassiné Marielle Franco inquiètent les secteurs démocratiques du pays.

Tiré du blogue de l’auteur.

Depuis l’investiture de Jair Bolsonaro les attaques aux opposants politiques au Brésil ont augmenté. Les menaces de morts, l’exil et les attentats envers ces derniers sont à l’ordre du jour. Les liens de son fils avec les groupes criminels accusés d’avoir assassiné Marielle Franco inquiètent les secteurs démocratiques du pays. D’autant plus que les mesures de libéralisation d’armes adoptées par le Président semblent renforcer la consolidation armée et territoriale des groupes miliciens.

Le décret présidentiel Nº 9.685 signé 15 janvier 2019 autorise la possession d’armes (jusqu’au nombre de quatre) en établissements commerciaux et résidences familiales. Cette mesure est annoncée au même moment que l’Anuário Brasileiro de Segurança Pública publie le chiffres de morts violentes au Brésil en 2017. Au total, le nombre d’ assassinats violents à été de 63.880 (175 par jour). Le plus élevé dans l’histoire démocratique du Brésil.

Ce décret est également signé 20 jours après la fin de l’intervention fédérale militaire dans l’état de Rio de Janeiro. Cette intervention est fortement critiquée par l’Observatoire de l’Intervention et le Centro de Estudos de Segurança e Cidadania pour son inefficacité dans la lutte contre les groupes narcotrafiquants, ainsi que pour l’augmentation des victimes, conséquence des confrontations armées.

Flavio Bolsonaro et les groupes paramilitaires au Rio de Janeiro 

La libéralisation de la possession d’armes non seulement contredit tout principe d’apaisement de la violence, mais renforce les structures criminelles urbaines suspectées d’avoir perpétré l’assassinat de l’élue Marielle Franco le 18 mars 2018.

Connues sous le nom de « milices » , ces groupes contrôlent des territoires où habitent plus de 2 millions de personnes, et ce, seulement dans l’État de Rio de Janeiro. Ces groupes imposent des extorsions aux commerçant et contrôlent la distribution des services "basics" comme l’électricité ou le gaz. Les groupes de milices se disent alors prestataires des services de sécurité. En se présentant comme les protecteurs des populations face au trafic, ils extorquent les habitants et exploitent économiquement les régions où ils sont présents. 

Ce contrôle territorial et disciplinaire se manifeste par l’imposition d’un code moral où les consommateurs de drogue, les voleurs et les membres de la communauté LGTBI sont assassinés systématiquement. Ce contrôle territorial se traduit également en capital électoral lors des élections comme l’a démontré la commission d’enquête parlementaire sur les milices en 2008.

Un des chefs de ces groupes de milices est Adriano Magalhães da Nóbrega. Expulsé de la police militaire en 2014 suite à des accusations de délits mineurs, extorsions et liens avec les groupes criminels accusés d’avoir assassiné l’élue Marielle Franco. Il est aujourd’hui en fuite, considéré comme fugitif. 

Or, étant député de l’état de Rio de Janeiro le fils du président Bolsonaro, Flavio Bolsonaro a décoré le 24 octobre 2003 à l’assemblée législative de Rio de Janeiro le lors lieutenant, Adriano Magalhães da Nóbrega. Il a également prononcé en séance parlementaire le 7 février 2007 un discours en faveur des groupes miliciens (voir discours). Cette même année, il finit par employer en tant qu’assistante parlementaire l’épouse du chef milicien. En 2016 il embauche également la mère du fugitif. 

Flavio Bolsonaro dit avoir embauché les deux femmes à la demande de Fabrício Queiroz, ex-conseiller do Flavio enquêté actuellement par des affaires de corruption et de lavage d’argent qui montent à 1,2 millions de réais entre 2016 et 2017.

Milices et persécutions aux opposants politiques  

Le 13 décembre 2018 le député du PSOL Marcelo Freixo a été notifié par les services d’intelligence de Sécurité Publique de l’État de Rio de Janeiro d’un plan d’assassinat organisé à son encontre. 

Le député fédéral Marcelo Freixo est sous protection de la police depuis 2008 suite à la création d’une commission d’enquête parlementaire. Ce dernier dénoncerait la présence des groupes de milices dans l’État de Rio, permettant à la commission de dénouer les liens entre les la classe politique régionale et le crime organisé.

Ainsi, au total, on compte 226 inculpés dont, 8 policiers civils, 67 policiers militaires, 3 pompiers, 2 agents pénitentiaires, 2 militaires des Forces Armes, 5 militaires d’organes non identifiés, ainsi que 130 civils. La commission a également publié 58 mesures afin de lutter contre ces groupes. À présent les groupes de milices continuent à étendre leurs zones d’influence et de contrôle. 

Pour sa part l’autre député fédéral du PSOL Jean Wyllys, reconnu pour son exercice parlementaire en défense de la diversité et la défense des droits LGTBI a annoncé sa démission et son départ en exil. En cause, les menaces de mort reçues depuis son élection. Lors d’un entretien exclusif avec le journal Folha de Sao Paulo il affirme être terrifié par l’idée d’être assassiné par des groupes de milices : « Cela me fait très peur de savoir que le fils du Président employait dans son cabinet l’épouse et la mère du sicaire ».

De fait, suite à des menaces, la député d’opposition et présidente de la commission de sécurité Marta Rocha du« Parti Democratico Laboritste » (PDT) a été victime d’un attentat le 13 janvier passé dans la ville de Rio de Janeiro. Jusqu’à présent les enquêtes policières n’ont donné aucun indice sur les auteurs. 

L’agenda sécuritaire se présente sans doute comme un des pilier fondamentaux du gouvernement Bolsonaro. Pourtant, les mesures de libéralisation de possession d’armes, ainsi que la rhétorique d’apologie à la violence se traduisent par un renforcement des structures criminelles miliciennes. 

Jusqu’à présent ces structures se caractérisaient par un contrôle territorial, économique et disciplinaire imposé aux habitants des zones périphériques. Après un mois d’investiture présidentielle, on assiste à ce qui pourrait être le début d’un ciblage politique, perpétré par des milices. Les liens de Flavio Bolsonaro avec les chefs des milices en est l’illustration parfaite.

Notes

(1) Décret possession d’armes. 

(2) Discours de soutien aux milices - Flavio Bolsonaro. 

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