L’héritage cher et noble de l’identifiant québécois n’est pas uniquement d’origine québécoise, mais est-il aussi et surtout canadien. Les valeurs de paix, de justice et de compassion qui résonnent au Québec rythment aussi la vie de partout au Canada, et retentissent ailleurs dans le monde. Depuis la création de la confédération des Nations du monde incarnée par l’ONU, le Canada a brillé et rayonné dans ce monde en génie de la paix et de l’universalité de la dignité humaine. Cette flamme allumée et perpétuée au concert des Nations par des Canadiens francophones, anglophones ou autres se trouve, hélas aujourd’hui, sérieusement menacée par les vents du néolibéralisme colonialiste.
Au Canada, alors que les souverainistes québécois peinent à rallier des concitoyens à une cause séparatiste, un homme et son gouvernement, démocratiquement portés au gouvernail fédéral, réussissent avec brio à clarifier et tonifier la perception québécoise de « société distincte » et le désir de souveraineté. Ces jokers du séparatisme ne sont pas ceux que d’aucuns s’imagineraient. Ce n’est ni Boisclair, ni Duceppe, ni Parizeau ni Luc Merville. Prônant le militarisme à l’américaine et la franchisation (franchising) d’Ottawa sous influences de Washington, Harper engage une partie de la nation dans la désillusion et la négation des valeurs canadiennes et québécoises, au point de placer le pays à la croisée des chemins. Je ne ferais pas allusion à la guerre des « faucons » Américains en Afganistan ou en Irak, ni à celle de leurs cousins israéliens au Liban, tellement ces barbaries nous sont lointaines et inexplicables comme le rejet par le seul Canada de Harper, de la motion du Conseil de Sécurité condamnant l’extension des colonies juives en territoires occupés. Une voix contre sur 47, la voix du Canada ! Ça n’a rien de canadien, ça sens plutôt l’américain. Pendant que les Québécois et une large majorité de Canadiens des autres provinces réclament sans espoir le règlement du déséquilibre fiscal, pendant que partout au Canada la pauvreté gagne inexorablement du terrain et met en périr l’espoir des jeunes et des retraités, Harper vide généreusement les coffres fédéraux dans les gouffres du militarisme. Ces ressources seraient investies autrement, elles créeraient de meilleurs espoirs pour les jeunes qui s’enrôlent pour mourir ou vivre. Elles assureraient à tous de meilleures conditions de vie et une meilleure prise en charge de notre responsabilité environnementale.
Plus d’un lisent dans la récente motion gouvernementale sur la « Nation québécoise » les mots que plus d’un prêtent à des Canadiens anglais : « laissons les Québécois sortir ». Peut-on en faire une lecture différente lorsqu’on sait que le promoteur vend du feu là où les Québécois veulent vendre de l’eau ? Si c’est cet esprit qui devait allumer la majorité des autres Canadiens, je crois que Harper fait bien de dire aux Québécois —pour qui les valeurs sont plus importantes que la Nation— de se refaire une Nation et un pays où ils pourront professer et vivre leurs valeurs. Heureusement, la nation canadienne n’est pas faite d’armes ni de pailles, plutôt de patience, de sagesse et de foi en la démocratie. Bon nombre de Canadiens doivent ne pas se reconnaître en l’actuel gouvernement fédéral et ont hâte de pouvoir le renvoyer à l’école. Au Québec, ça presse. Et si la vision Harper du Canada devait s’imposer à Ottawa, je parierais que Parizeau n’aurait plus une chance de se répéter.