Édition du 17 décembre 2024

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États-Unis

Etats-Unis. Le président de l’UAW déclare que les travailleurs doivent « agir collectivement » pour gagner la guerre des classes

Le président de l’UAW et le vice-président de l’UAW en tant que responsable syndical de GM annoncent le 30 octobre l’accord passé avec GM, à ratifier.

Avec trois accords historiques – encore à ratifier par les membres de l’United Auto Workers (UAW) – en main après six semaines de grève, l’UAW cherche à galvaniser le reste du mouvement syndical états-unien en appelant les autres syndicats à aligner leurs échéances contractuelles sur celles de l’UAW. Cela donnerait aux travailleurs et travailleuses un maximum de poids à la table des négociations et la possibilité de faire grève ensemble, si nécessaire.

31 octobre 2023 Tiré de A l’encontre Etats-Unis, Syndicats

Par Jake Johnson

S’ils sont ratifiés par les membres de l’UAW, les contrats de quatre ans et demi conclus avec General Motors [1], Ford et Stellantis expireront le 30 avril 2028. Si les contrats venaient à expirer sans qu’un accord soit conclu avant cette date, l’UAW serait en mesure de faire grève lors de la Journée internationale des travailleurs, plus connue sous le nom de 1er Mai.

Dans un discours prononcé dimanche soir à Detroit, le président de l’UAW, Shawn Fain, a clairement indiqué que la date d’expiration d’avril 2028 avait été choisie de manière stratégique, dans le but de revigorer un mouvement syndical qui subit depuis des décennies les attaques coordonnées par les firmes et leurs alliés politiques.

« Le 1er Mai est né de la lutte intense menée par les travailleurs et travailleuses aux Etats-Unis pour obtenir la journée de huit heures. Cette lutte est tout aussi valable aujourd’hui qu’elle l’était en 1889 », a déclaré Shawn Fain. « Même si le 1er Mai a ses racines ici aux Etats-Unis [2], il est largement célébré par les travailleurs et travailleuses du monde entier. C’est plus qu’une simple journée de commémoration, c’est un appel à l’action. »

Selon Shawn Fain, l’alignement des dates d’expiration des contrats permettrait aux syndicats de « commencer à faire jouer collectivement leurs muscles ».

« Si nous voulons vraiment nous attaquer à la classe des milliardaires et reconstruire l’économie pour qu’elle commence à fonctionner au bénéfice du plus grand nombre et non de quelques-uns, il est important que nous ne nous contentions pas de faire grève, mais que nous fassions grève ensemble », a indiqué Shawn Fain, le premier président de l’UAW à être directement élu [en mars 2023] par les membres.

Après des mois de négociations contractuelles et six semaines de débrayages sélectifs et de piquets de grève, l’UAW a obtenu des accords à entériner avec General Motors, Ford et Stellantis qui sont les plus favorables que tous les contrats passés avec les Big Three depuis des décennies, après des années de baisse des salaires réels et d’augmentation des bénéfices des entreprises.

Dans le cadre de l’accord de principe conclu avec Ford – qui est similaire aux accords conclus avec les deux autres constructeurs automobiles – le salaire maximum des membres de l’UAW augmentera de plus de 30% pour atteindre plus de 40 dollars de l’heure et le salaire de départ passera à environ 28 dollars de l’heure, soit une augmentation de 68%, pendant toute la durée du contrat. L’UAW a évalué les gains de l’accord à plus de quatre fois ceux du contrat de 2019 avec Ford, contrat qui a récemment pris fin.

L’UAW a également obtenu le droit de grève pour les fermetures d’usines chez Ford et Stellantis, ainsi que des protections syndicales pour les travailleurs et travailleuses des usines de batteries électriques chez General Motors.

Ces victoires sont intervenues à la fin d’une année importante pour les syndicats. Aux Etats-Unis, plus de 450 000 salarié·e·s – des infirmières aux employés d’hôtels en passant par les acteurs – ont débrayé cette année pour obtenir de meilleurs salaires, prestations sociales et conditions de travail. D’autres travailleurs dans des secteurs critiques, notamment les pilotes de ligne, semblent prêts à se mettre en grève dans un avenir proche.

Bien que l’année 2023, pour ce qui est des grèves, ait été l’une des plus importantes de l’histoire récente, elle n’est pas comparable aux années 1970, lorsque plus d’un million de travailleurs et travailleuses se mettaient en grève chaque année. Aujourd’hui, le taux de syndicalisation n’a jamais été aussi bas (10,1%), alors que le soutien de l’opinion publique aux syndicats n’a jamais été aussi élevé depuis 1965.

Shawn Fain a déclaré qu’il espérait que les victoires de l’UAW dans les négociations contractuelles avec les puissants Big Three marqueraient « un tournant dans la guerre de classes qui fait rage dans ce pays depuis 40 ans », ajoutant que le syndicat visait des entreprises automobiles non syndiquées telles que Tesla, Toyota et Honda.

Selon Shawn Fain, « l’un de nos principaux objectifs à l’issue de cette victoire historique est de nous organiser comme nous ne l’avons jamais fait auparavant. Lorsque nous retournerons à la table des négociations en 2028, ce ne sera pas seulement avec les Big Three. Ce sera avec les Big Five ou Big Six. » (Article publié sur le site Common Dreams, le 30 octobre 2023 ; traduction rédaction A l’Encontre)


[1] Dans l’accord, encore à ratifier par les membres de l’UAW, General Motors a accepté une augmentation du salaire horaire de 25% sur la durée de l’accord, soit quatre ans, ainsi que l’indexation des salaires à l’inflation. Selon le Wall Street Journal du 30 octobre : « Le rétablissement des ajustements salariaux au coût de la vie – protection contre l’inflation intégrée dans le salaire horaire – n’était pas une option pour les entreprises lorsque les négociations ont commencé. » La direction de GM a accepté de verser des bonus aux retraités et aux veuves. Dans une vidéo diffusée lundi 30 octobre en fin de journée, Shawn Fain déclare : « Nous croyons vraiment que notre grève a permis de soutirer jusqu’au dernier centime à General Motors. » Le détail de l’accord est similaire à celui passé avec Ford. Voir à ce propos l’article publié sur ce site le 28 octobre. (Réd.)

[2] Le massacre de Haymarket Square, survenu à Chicago le 4 mai 1886, a été l’expression de la violence patronale face aux travailleurs et travailleuses luttant pour la journée de 8 heures, une lutte commencée dans les usines McCormick (machines agricoles), en grève depuis trois mois et où la direction utilisait les briseurs de grève. Le 1er mai 1886 avait été l’occasion d’une relance, par la Fédération américaine du travail (AFL), d’un mouvement de grève dans les principales villes du pays pour la journée de 8 heures. Cette date du 1er mai fut choisie car elle renvoyait à un moment particulier où dans plusieurs Etats américains de la côte Est partaient les contrats, les baux pour les loyers, etc. (Réd.)

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Jake Johnson

Jake Johnson est rédacteur de Common Dreams (Etats-Unis).

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