Ses conclusions sont en contradiction complète avec ceux des instituts officiels de sondage et montrent que, à travers toute l’Ecosse, les communautés de base sont très loin de prendre pour argent comptant le chantage à la peur. Alors qu’ils ont été grugés depuis des dizaines d’années par la domination de Westminster et qu’ils sont maintenant confrontés aux coupes budgétaires et aux privatisations voulues par les Conservateurs, les gens envisagent de plus en plus le vote « Oui » comme un levier pour le changement social.
Dans la note qui suit, nous allons détailler la tendance qui montre que, du fait de leur alliance avec les Conservateurs, les Travaillistes échouent à conserver leurs liens avec les électeurs qui sont victimes de la faillite abjecte des partis de Westminster. En faisant du porte-à-porte, nous avons passé du temps à discuter et à nous confronter aux gens. Ce n’était pas une opération de pure communication. Et c’est bien pour cela que nous sommes en train de gagner la bataille de conviction, ce qu’est incapable de faire la coalition entre travaillistes, conservateurs et libéraux-démocrates contre l’indépendance.
La diversité géographique ainsi que l’échelle très large de l’échantillon démontrent que découvrir des secteurs qui, laissés pour compte par Westminster, soutiennent de manière hégémonique l’indépendance ne relève en rien de l’anomalie. C’est bien plutôt une réaction généralisée qui doit être considérée comme un fait acquis : il y a un soulèvement pacifique, démocratique qui s’oppose à l’élite de Westminster et qui considère qu’à travers le vote pour le « Oui » va s’exprimer une option potentielle pour le changement.
Quelques précisions sur notre sondage
. D’abord, 18.012 réponses constituent un échantillon considérable. En général, les instituts de sondages travaillent sur des échantillons d’environ un millier de réponse. Naturellement, il faut prendre en compte une certaine subjectivité. Mais nous avons demandé aux personnes interrogées leurs options politiques et les avons enregistrées avant de commencer l’interview.
. Les résultats relèvent d’une démographie particulière : la Radical Independence Campaign a ciblé des zones de faible participation électorale (dont l’origine est à chercher dans l’austérité et les privatisations décidées par Westminster).
. La plupart des zones ciblées étaient – ou sont encore – des bastions du Parti travailliste, en particulier sur la côte Ouest. Des endroits comme Greenock et Easterhouse, qui ont toujours été des places fortes du Parti travailliste, montrent des majorités importantes en faveur du « Oui ».
. Les résultats globaux sont les suivants :
Oui : 43,6% ; Non : 25,3% ; Sans opinion : 31,1%.
Soit, en ne prenant en compte que les suffrages exprimés : 63,4% pour le Oui et 36,6% pour le Non.
Une différenciation géographique : « Mieux ensemble » est en train de perdre la confrontation
Dans la déclinaison suivante des résultats, nous soulignons la manière dont l’économie du Royaume-Uni a endommagé le niveau de vie de la population écossaise, ainsi que la remise en cause de l’emprise électorale des travaillistes au fur et à mesure de la montée en puissance du vote « Oui ».
Bonnyrigg
Les résultats (199 sondés) : Oui : 46% ; Non : 25% ; Sans opinion : 29%.
Soit, en ne prenant en compte que les suffrages exprimés : 65,5% pour le Oui et 35,5% pour le Non.
Le contexte : 15% des enfants vivent dans des familles en dessous du seuil de pauvreté. Le siège de député est acquis au Parti travailliste depuis 1955.
Charleston (Dundee)
Les résultats (1807 sondés) : Oui : 51,2% ; Non : 19,3% ; Sans opinion : 29,1%.
Soit, en ne prenant en compte que les suffrages exprimés : 72,8% pour le Oui et 27,2% pour le Non.
Le contexte : Pour les revenus et l’emploi, ce secteur fait partie des 4% en bas du classement.
Clydebank
Les résultats (677 sondés) : Oui : 44% ; Non : 30% ; Sans opinion : 26%.
Soit, en ne prenant en compte que les suffrages exprimés : 60,1% pour le Oui et 39,9% pour le Non.
Le contexte : c’est une place forte du Parti travailliste depuis les années 1950. Largement victime de la désindustrialisation, cette zone souffre aujourd’hui d’un taux élevé de chômage.
Easterhouse
Les résultats (291 sondés) : Oui : 50% ; Non : 16% ; Sans opinion : 34%.
Soit, en ne prenant en compte que les suffrages exprimés : 76% pour le Oui et 24% pour le Non.
Le contexte : Cette circonscription vote travailliste depuis 1930 et a encore voté travailliste aux élections pour le Parlement écossais en 2011. Pour les revenus et l’emploi, ce secteur fait partie des 3% en bas du classement.
Greenock
Les résultats (385 sondés) : Oui : 49% ; Non : 26% ; Sans opinion : 25%.
Soit, en ne prenant en compte que les suffrages exprimés : 65,3% pour le Oui et 34,7% pour le Non.
Le contexte : c’est une place forte du Parti travailliste pendant toute la période d’après-guerre, aussi bien pour les élections au niveau de l’Ecosse, du Royaume-Uni que des municipales. Un enfant sur quatre vit dans une famille en dessous du seuil de pauvreté.
Hamilton
Les résultats (124 sondés) : Oui : 52% ; Non : 19% ; Sans opinion : 29%.
Soit, en ne prenant en compte que les suffrages exprimés : 73% pour le Oui et 27% pour le Non.
Le contexte : bastion du Parti travailliste. Un enfant sur quatre vit dans une famille en dessous du seuil de pauvreté. Taux de chômage élevé.
Kircaldy
Les résultats (339 sondés) : Oui : 54% ; Non : 24% ; Sans opinion : 22%.
Soit, en ne prenant en compte que les suffrages exprimés : 69,6% pour le Oui et 30,4% pour le Non.
Le contexte : c’est le fief électoral de l’ancien Premier ministre, Gordon Brown. Lors des dernières élections législatives au niveau du Royaume-Uni, en 2010, il a été réélu avec 60% des voix. En Décembre dernier, une banque alimentaire a été créée afin de traiter l’explosion de la pauvreté « à un niveau incroyable ».
Seaton (Aberdeen)
Les résultats (402 sondés) : Oui : 44% ; Non : 17% ; Sans opinion : 39%.
Soit, en ne prenant en compte que les suffrages exprimés : 72% pour le Oui et 28% pour le Non.
Le contexte : Seaton est le siège de la première banque alimentaire d’Aberdeen, ouverte en Mars 2013. Dans une zone qui héberge la plus forte densité de milliardaires du Royaume-Uni, 29% des habitants sont en dessous du seuil de pauvreté…
En conclusion, cela fait bien longtemps que l’on ne peut plus se fier aux idées reçues quant à l’opinion des électeurs. Bien longtemps aussi que Westminster a atteint sa date de péremption.
C’est le moment de faire advenir un changement social radical et nous pouvons le faire à travers une victoire du vote « Oui ». Nous avons voulu que nos réunions soient plus que des cafés du commerce. Nous avons voulu rassembler toutes les idées nécessaires pour refonder notre société, de la cave au grenier. Nous avons maintenant un long chemin à parcourir, mais le réseau des comités de la Radical Independence Campaign s’étend maintenant à toute l’Ecosse. Ce réseau travaille avec acharnement pour mettre en lumière l’hypocrisie des politiciens de Westminster et l’iniquité d’une économie du Royaume-Uni qui ne fonctionne que pour les riches.
Ces résultats montrent qu’une autre Ecosse est possible.