Édition du 19 novembre 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Féminisme

Déclaration politique

Déclaration Politique de la Marche Mondiale des Femmes

Nous, les membres du Comité international de la Marche Mondiale des Femmes, réuni au Québec, Canada, du 12 au 15 septembre 2015, déclarons :

Notre solidarité avec les femmes de la région de Québec, lieu de naissance de la Marche Mondiale des Femmes, et nous sommes reconnaissantes de leurs luttes et de leurs résistances.

Nous reconnaissons la valeur de la formation politique féministe comme une stratégie pour nous construire nous-mêmes en tant que sujets politiques afin de résister aux systèmes qui nous opprime. Réunis ici, nous avons travaillé sur une compréhension commune de notre réalité, luttant pour défendre notre droit de créer notre propre épistémologie féministe.

Nous travaillons sur la construction de nos propres alternatives féministes basées sur la re-construction de nos propres connaissances et nos pratiques quotidiennes, ces dernières ayant été volontairement supprimées du discours habituel afin de mettre les femmes de côté.

Nous sommes dévoués à nous libérer du patriarcat, du capitalisme et du néo-colonialisme qui sont les causes profondes des oppressions dans lequel nous vivons. Ensemble, dans cet espace de travail, nous sommes arrivés à la conclusion que la pauvreté, l’immigration forcée et le terrorisme, sont aussi des expressions de la violence subie par les femmes, les enfants et les communautés marginalisées, tout comme les conséquences des stratégies telles que les mesures de la militarisation, l’extrémisme et l’austérité soutenus dans différentes situations.

En ce sens, nous condamnons l’attitude de la communauté internationale, spécialement l’Union européenne, pour sa réponse à la crise des réfugiés qui se déroule ces jours-ci. Une fois de plus, nous assistons avec horreur comment la vie humaine ne vaut rien, comment les gens fuient leur pays à cause de l’intégrisme, du terrorisme et des guerres accentuées par les états comme les États-Unis, et les pays alliés bénéficiant de l’industrie des armes ainsi que la militarisation et par l’impossibilité de trouver une forteresse accessible en Europe. Nous dénonçons la réponse officielle que l’UE offre. Une réponse sur la base du militarisme et de la fermeture des frontières et des quotas qui est contre la volonté de milliers de citoyennes et des citoyens de l’Europe qui se mobilisent dans les rues afin d’ouvrir les frontières pour les personnes fuyant la Palestine, la Syrie, la Libye, l’Irak, le Kurdistan, et d’autres territoires de la région.

Nous continuons d’appeler à la solidarité des gens partout dans le monde, et réaffirmons que les réfugiés ne sont pas nos ennemis, mais nos frères et nos sœurs qui subissent des situations de violence extrême provoquée par un système injuste. Le racisme se répand largement dans de nombreuses régions. Nous recevons régulièrement des nouvelles de déplacements forcés et de violations des communautés et des peuples autochtones au Brésil, en Amérique du Nord et d’autres régions. Les gouvernements et les groupes d’extrême droite utilisent la peur comme stratégie pour contrôler l’opinion publique et justifier leurs politiques xénophobes. La hausse de meurtres de personnes noires dans les États-Unis génère des tensions sociales et des conflits, mais les médias et les réseaux sociaux blâment les victimes qui sont ceux et celles qui sont opprimés et criminalisés quand ils prennent des mesures et réclament justice.

Ce sont les expressions des idéologies colonialistes et néo-libérales qui sont de plus en plus fortes chaque jour, et qui ont un impact sur la vie des gens de partout dans le monde. Les sociétés et les États mettent en œuvre de nouvelles formes de colonisation de l’hémisphère Sud. Nous pouvons voir comment les multinationales en Afrique provoquent le déplacement des communautés et des populations autochtones, comment les entreprises occupent les territoires et pillent les ressources naturelles et comment la colonisation culturelle se renforce par le marché capitaliste et les tendances de consommation, transmise par les médias de masse.

Nous défendons ces femmes qui sont criminalisées dans leur lutte pour réclamer l’autonomie de leur corps et de leurs territoires. Nous envoyons notre solidarité féministe à Sara Kaya, qui a été élue l’année dernière en tant que co-mairesse de Nusaybin avec 91% des votes des citoyennes et des citoyens. Dans cette ville kurde, nous avons lancé notre Caravane féministe européenne le 6 mars dernier, et elle a révélé être très attachée et engagée à notre cause et à notre mouvement. Malheureusement, nous apprenions il y a deux semaines qu’elle a été arrêtée et a été destituée pour sa déclaration sur l’autodétermination. Nous condamnons la guerre et l’oppression menées par le gouvernement turc contre les communautés kurdes et nous continuons à être en solidarité avec Sara Kaya et toutes les femmes qui ont été criminalisées pour leur lutte pour un monde meilleur. Nous nous solidarisons à Maxima, une femme autochtone péruvienne qui a été persécuté à cause de sa résistance à la défense de la terre et de la vie. Nous sommes aussi en solidarité avec toutes et tous qui sont dans la résistance à travers le monde.

Nous ne voulons pas de ce monde inhumain. Nous disons non, cela suffit ! Et pour cela, nous ratifions là encore, notre engagement à la construction d’un Nouveau Monde, dans lequel la vie est au centre de tout, dans lequel tous les êtres humains jouissent de nouvelles relations, fondées sur la justice, la liberté, le respect et la reconnaissance de la diversité, non seulement entre eux, mais aussi avec la nature.

Nous saluons les efforts de toutes les coordinations nationales de la Marche Mondiale, qui travaillent avec acharnement depuis le début de notre Action Internationale le 8 Mars, rendant possible les nombreuses actions réalisées au niveau de la base dans de nombreuses régions et territoires, traçant les cartes des résistances et des alternatives qui vise l’amélioration et la défense de nos territoires, nos corps et nos terres.

Nous saluons nos sœurs qui remportent des victoires dans le domaine de la politique. C’est le cas de notre camarade et sœur Sandra Morán, du Guatemala, qui vient d’être élue au Parlement National, représentant une coalition de mouvements sociaux.

Nous sommes déterminés à renforcer nos relations avec d’autres mouvements sociaux et d’autres alliés stratégiques dans la conviction que cette alliance rendra notre projet politique plus fort et plus cohérent. Voilà pourquoi nous allons continuer à occuper les espaces politiques régionales et internationales, à influencer les processus de décision et l’élaboration des politiques. En décembre prochain, nous allons mobiliser les femmes de partout dans le monde à se joindre aux actions internationales autour deCOP21 – Paris climat 2015. Ensemble, nous allons parler de la protection de la Mère Nature, de l’environnement et d’un véritable changement dans le système, pour arrêter la dévastation qui est à l’origine du changement climatique.

C’est dans l’espoir de parvenir à cette société guidée par les principes féministes, que nous appelons à la lutte et nous continuons à marcher vers notre 10e Réunion Internationale qui aura lieu en octobre 2016, lorsque des militantes de partout dans le monde, de toutes les régions de la planète, se réuniront au Mozambique pour dire haut et fort : Femmes en résistance pour construire un Nouveau Monde !

Le Comité international de la Marche Mondiale des Femmes,

Québec, le 15 septembre 2015.

Marche Mondiale des Femmes Déclaration Politique (mai 2015)

Nous, membres du Comité International de la Marche Mondiale des Femmes, réunies à Genève, en en Suisse, du 23 au 29 mai 2015, avons eu l’opportunité de connaître les efforts organisationnels et les alternatives communautaires que sont en train de construire nos sœurs de la Marche mondiale de Suisse ; nous avons également pu écouter les expériences de nos jeunes sœurs membres de la Caravane Féministe qui traverse l’Europe.

Nous avons eu l’opportunité de partager des expériences, des réflexions et de connaître les problèmes auxquels font face les femmes migrantes, la discrimination, les stigmatisations, les effets des politiques d’austérité, la croissante militarisation et la présence armée qui impliquent de la violence contre la vie des peuples et des femmes dans le Nord et le Sud.

Ensemble nous constatons la présence agressive de militaires, les attaques terroristes de groupes religieux extrémistes et la voracité d’entreprises multinationales qui volent et délogent les peuples de leurs territoires, en les contrôlant, en exerçant des violences sexuelles et en provoquant des grossesses forcées, des maladies et la pollution des biens naturels des peuples autochtones dans le monde entier.

A ceci s’ajoutent les conséquences des changements climatiques et des politiques d’états qui provoquent une extrême pauvreté, détruisent les services publics, créent du chômage et une perte de logement et dont les résultats sont la croissance des migrations et des trafics de personnes, la surexploitation et la mort. Tous ces problèmes sont le résultat d’un système patriarcal, capitaliste et néocolonial qui continue d’utiliser les femmes, les peuples et la nature comme objets et marchandises pour la surexploitation et la création de sa richesse ; qui crée et approfondit les inégalités entre pays et entre régions des mêmes pays.

Dans ce contexte, nous célébrons le fait que dans 30 pays du monde, du Sud au Nord, le 8 Mars, jour International des Femmes, et le 24 avril, journée des « 24 heures d’actions féministes », nous ayons dénoncé les entreprises multinationales, nous nous soyons solidarisées avec les victimes et nous ayons demandé justice et réparations pour les femmes du Rana Plaza – Bengladesh et pour les travailleuses du monde.

Nous saluons la résistance et l’organisation des communautés, des peuples autochtones et des mouvements sociaux qui provoquent des changements politiques progressistes dans certains pays du monde, et dans lesquels les femmes ont joué un rôle très important qui amène de l’espérance pour les peuples.

Nous faisons un appel à continuer à nous organiser et à participer à la 4e Action Mondiale de la Marche Mondiale des Femmes, à avancer dans la construction d’alternatives pour la vie des peuples et des femmes.

Tant que toutes les femmes ne sont pas libres, nous serons en marche.

Comité International de la Marche Mondiale des Femmes, Genève, le 28 Mai 2015

* http://www.marchemondiale.org/index_html/fr

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