Édition du 17 décembre 2024

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Élections québécoises 2022

Conservatisme, progressisme et question nationale

Qu’est-ce qui peut expliquer la montée soudaine en popularité du Parti conservateur du Québec ? La pandémie, les mesures sanitaires, la présidence de Donald Trump et la venue d’un ancien animateur d’une radio-poubelle en tant que chef furent assurément des catalyseurs de la récente progression de ce parti. Mais existe-t-il des facteurs politiques ou sociologiques sous-jacents à ce phénomène ? Laissez-moi formuler une hypothèse.

La question nationale a toujours été, au cours de l’histoire du Québec, un thème central caractérisé par un jeu de balancier entre l’autonomisme et le souverainisme. Et historiquement, il est possible de constater que l’autonomisme a été souvent accompagné d’un certain conservatisme et le souverainisme fut, au contraire, habituellement porteur de progressisme, comme si le dessein d’égalité entre les peuples amenait naturellement l’aspiration à l’égalité entre les individus.

À l’époque de l’ancien Parti conservateur du Québec et de l’Union nationale qui lui a succédé, l’autonomisme face au gouvernement central fut l’une des pièces maîtresses de l’idéologie conservatrice de Duplessis. Quelques années plus tard avec la Révolution tranquille initiée avec Jean Lesage, on assista dès lors à la construction d’une société sociale-démocrate et d’un éveil de la volonté d’émancipation du peuple québécois qui débouchèrent sur la cause souverainiste et ultimement sur la fondation du Parti québécois de René Lévesque, un ancien ministre sous le gouvernement Lesage. Le PQ de ce temps pouvait alors être considéré de centre gauche.

Après l’échec des référendums de 1980 et de 1995, une nouvelle ère de conservatisme en parallèle à un recul de la cause souverainiste semble s’implanter avec en premier lieu la chefferie de Lucien Bouchard au Parti québécois (ancien ministre conservateur au fédéral), les mandats du premier ministre libéral Jean Charest (ancien chef conservateur au fédéral) et en parallèle une députation accrue lors des élections de 2007 de l’Action démocratique du Québec avec un programme à connotation conservatrice.

En 2018, la Coalition avenir Québec gagne les élections en obtenant la majorité à l’Assemblée nationale. De tendance plutôt conservatrice, surtout sur le plan économique, la CAQ prétend également avoir une position ouvertement autonomiste face au gouvernement fédéral.

Enfin, dans une dynamique semblable, le Parti conservateur du Québec d’Éric Duhaime représente probablement aussi une conséquence du désenchantement pour la cause souverainiste et il affiche tout autant une forte tendance autonomiste dans son programme. Mais, ici, cette formation politique semble aller encore plus loin dans le conservatisme idéologique en défendant une forme exacerbée de la liberté individuelle et de remise en question du modèle québécois, comme s’il s’agissait d’un ultime repli vers le chacun pour soi après l’échec crève-cœur d’un projet collectif d’émancipation nationale ayant suscité beaucoup d’espoir pour l’avenir…

Jimmy St-Gelais

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