Québec, 14 mai 2021
La grève nationale qui a commencé le 28 avril 2021, a été organisée par des jeunes, des femmes, des étudiants, des communautés noires, indigènes, paysannes et des organisations communautaires. Indignés par les injustices systématiques des gouvernements, ils ont élevé la voix, ils ont affronté leurs peurs pour dire : ça suffit ! Ils protestent pour empêcher une réforme fiscale qui les écrase et leur fait payer les détournements de fonds de la corruption, la défiscalisation du pays et l’inefficacité des gouvernements. Les voix des peuples et des communautés exigent : des réformes construites avec la participation de tous les secteurs et groupes sociaux du pays, la démission du président et des dirigeants corrompus qui n’ont aucun critère pour gouverner.
La répression sanglante de la police comporte de nombreux cas d’agressions sexuelles contre les femmes, en plus de nombreux rapports de coups, de blessures par balle et de meurtres. « L’État ne prend pas soin de moi, mes amis prennent soin de moi ! » C’est ce qu’on disait au Chili, aujourd’hui cela se répète en Colombie. Si l’on considère que seulement 30 % des agressions sont rapportées, nous pourrions établir que pour les 15 agressions signalées, le chiffre réel doit être d’environ 70 ou plus. Ces agressions ne sont pas signalées par peur des représailles ou parce qu’il n’y a tout simplement pas de confiance dans le système judiciaire. La violence sexuelle en Colombie compte 90 % d’impunité.
La plupart des victimes de violences sexuelles commises par les forces de sécurité se produisent dans des maisons, des postes de police ou des centres de détention. Au cours du long conflit armé en Colombie, la violence sexuelle a été l’arme d’humiliation et de punition des femmes des territoires, de celles qui décidaient avec autonomie ou qui transgressaient les normes conservatrices. Les femmes de Colombie ont porté avec elles la peur et la douleur.
"L’expression violence sexuelle montre que le corps des femmes est compris comme un territoire pour inscrire le pouvoir, pour exercer l’autorité et comme un objet que l’on peut posséder et violer. L’une des plaignantes a partagé une vidéo dans laquelle un policier dit à l’autre : « Fais ce que tu veux d’elle. » Cela signifie : « J’ai toute l’autorité et le pouvoir de faire ce que je veux de son corps ».
Une autre plaignante a déclaré : « J’ai été enfermé par des policiers qui me harcelaient et qui m’ont dit : « Si c’est comme ça que sont les manifestantes, c’est bien de les gazer ». La plaignante a exprimé : « Vous ne savez pas la peur que j’ai ressentie en pensant que je n’allais pas rentrer chez moi ». La violence verbale dans le contexte de l’extrême violence de la police pendant la grève nationale inflige une terreur incomparable, et elle rend les femmes qui manifestent vulnérables.
Le pouvoir de la force publique soutenue par le gouvernement national peut commettre des crimes en toute liberté. Des membres de la force publique à Bogota ont détenu arbitrairement des femmes qui, après avoir été agressées sexuellement dans un camion, se sont jetées hors du véhicule pour fuir.
« Les hommes ont été battus et emmenés, et les femmes ont été séparées. À ce moment-là, un membre de l’escadron mobile anti-émeute (Esmad) s’est approché de moi et il a abusé de moi, en présence de tous ses collègues, y compris une femme (...) il m’a pelotée et a mis sa main dans ma zone intime », a déclaré la femme. Les policière sont complices de la même violence contre leur genre, même si des plaintes pour agression sexuelle ont été déposées à l’interne.
Pendant les détentions arbitraires, les jeunes femmes subissent toutes sortes d’intimidations et de violences. Une jeune femme a été amenée à l’unité de réaction immédiate du bureau du procureur sous la menace d’être poursuivie pour obstruction de la voie publique. Sur place, ils lui ont touché le corps et lui ont pincé les seins.
Les homicides sont également exercés contre les femmes, comme dans le cas d’une enseignante de la ville de Cali, qui a été capturée par la police, violée, empalée et démembrée. Son corps a été retrouvé dans la ville de Buenaventura.
En plus des gaz lacrymogènes lancés dans les quartiers, deux femmes adultes ont perdu la vie : Maria Jovita Osorio et Julia Navarrete.
Au nom de celles qui ont perdu la vie en exerçant leur droit de manifester, qui ont été humiliées et maltraitées, nous sommes ici aujourd’hui pour dire : Cessez la violence contre les femmes, À bas le patriarcat, Vive le féminisme communautaire, Vive le féminisme populaire !
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