Le rapport Hoskins proposait une feuille de route devant mener à l’adoption d’un régime public et universel d’assurance médicaments. Selon l’échéancier établi dans le rapport, les premières bases d’un régime public et universel d’assurance médicaments auraient déjà dû être jetées. Qu’est-ce qui explique que rien ne bouge deux ans après la publication du rapport ? Ce ne sont sûrement pas le manque d’études ou l’impopularité de la mesure qui expliquent cette situation. Depuis des décennies, des commissions d’enquête, des comités d’experts et d’expertes ainsi que des parlementaires ont tous conclu qu’il était nécessaire d’inclure les médicaments d’ordonnance dans les services offerts à la population, au même titre que ceux offerts par l’assurance maladie. De multiples sondages démontrent que la population québécoise et canadienne est très majoritairement favorable à une telle idée.
C’est plutôt la volonté politique qui manque. Le gouvernement de la CAQ refuse toujours de reconnaître les problèmes du régime hybride québécois d’assurance médicaments, pourtant abondamment documentés. Nos organisations, qui sont présentes sur le terrain, sont bien au fait des dysfonctionnements de ce régime à deux volets, public et privé. Des Québécois et des Québécoises doivent parfois choisir entre payer leur épicerie ou leurs médicaments. Des travailleurs et des travailleuses essaient tant bien que mal de contrôler l’explosion des coûts des médicaments. Dans des cas extrêmes où les primes payées grugent une part beaucoup trop importante de leurs revenus, certains groupes de travailleurs et travailleuses choisissent de mettre fin à leurs assurances collectives considérant que le régime hybride ne permet pas de se départir du volet médicaments. Et pourtant, toutes les évaluations crédibles montrent qu’avec un régime public et universel, il est possible d’économiser des milliards de dollars tout en améliorant l’accès aux médicaments.
La protection des champs de compétence doit cesser de servir de prétexte pour justifier une opposition au progrès social. Le refus du gouvernement du Québec de négocier avec Ottawa pour la mise sur pied d’un tel régime a de quoi surprendre, alors qu’il revendique un rehaussement des transferts fédéraux en santé. Il pourrait plutôt saisir cette occasion pour augmenter les revenus de l’État québécois tout en mettant sur pied une politique publique qui répond réellement aux besoins de santé de la population du Québec. Comme pour d’autres programmes sociaux, notamment le Régime de rentes du Québec, le Québec pourrait exiger de mettre sur pied son propre régime public et universel d’assurance médicaments. Il n’y a pas d’obstacles insurmontables, seulement un manque de volonté politique.
D’ailleurs, les provinces et le palier fédéral collaborent dans ce dossier. Par exemple, le Québec participe à l’Alliance pancanadienne pharmaceutique, laquelle a permis de raffermir le pouvoir de négociation auprès des pharmaceutiques et, conséquemment, de réaliser d’importantes économies.
La situation traîne depuis beaucoup trop longtemps. Le statu quo condamnera la population québécoise à payer de plus en plus cher. Cette situation est injustifiable. Pour le bien-être des Québécois et des Québécoises, le rapport Hoskins ne doit pas rester lettre morte !
Signataires
Benoit Audet, vice-président de l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS)
Luc Vachon, président de la Centrale des syndicats démocratiques (CSD)
Sonia Ethier, présidente de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ)
Caroline Senneville, vice-présidente de la Confédération des syndicats nationaux (CSN)
Sophie Verdon, coordonnatrice de la Coalition solidarité santé
Nancy Bédard, présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec-FIQ
Daniel Boyer, président de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ)
Johanne Arnould, présidente de l’Union des consommateurs
Gaëlle Fedida, présidente de la Table des regroupements provinciaux d’organismes communautaires et bénévoles
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