Tiré d’un blogue collectif sur le site de Médiapart.
A la suite du discours du président de la République, Kaïes Saïed, diffusé sur le site Internet de la présidence de la République, ordonnant à la ministre de la Justice de renvoyer devant la justice l’ex-président de la République, le Dr Moncef Marzouki, allant jusqu’à lui préciser les motifs et l’article de loi sur la saisine judiciaire, le service de communication du Tribunal de Première Instance de Tunis a fait savoir, le 4 novembre 2021, que le juge d’instruction avait délivré un mandat d’amener international à l’encontre de M. Marzouki. Rappelons que cette décision fait suite à une précédente annonce du chef de l’Etat de retirer le passeport diplomatique à M. Marzouki. Il s’agit là d’une mesure scandaleuse qui s’inscrit dans un climat délétère, celui de campagnes de diffamation qui vont jusqu’à accuser M. Marzouki d’avoir saboté la tenue du Sommet de la francophonie prévu à Jerba en octobre dernier aux fins de l’accuser de complot contre la sûreté de l’Etat.
Les soussigné(e)s :
– condamnent fermement cette mesure arbitraire qui participe d’une rhétorique de dénigrement, de haine et de mépris à l’encontre de l’opposition tunisienne, une politique que le président Kais Saïed poursuit depuis le 25 juillet 2021 pour tenter de faire taire tous ceux qui s’opposent à la concentration des pouvoirs entre ses mains ;
– affirment le droit de M. Marzouki de s’exprimer sur la situation en Tunisie au nom de la liberté d’opinion ;
– exigent que le juge d’instruction annule cette procédure qui fait injure à la justice tunisienne et dénote de sa subordination au pouvoir exécutif, à l’heure où nous tous devons œuvrer pour une justice indépendante, garante des droits et libertés et n’obéissant qu’à l’autorité de la loi appliquée par les juges en leur âme et conscience ;
– rejettent catégoriquement tout procès biaisé à caractère politique qui participe d’une série de décisions visant à empêcher toute opposition à la politique du fait accompli de l’actuel président de la République ;
– dénoncent toutes les formes de pression exercées par le chef de l’Etat sur le pouvoir judiciaire et ses différents secteurs, y compris sur le Conseil supérieur de la magistrature ainsi que ses menaces répétées à l’égard des juges des différentes chambres (pénale, administrative, financière) ;
– relèvent que l’image extérieure de la Tunisie s’en trouve ternie et que son isolement s’aggrave en raison du fait que l’actuel chef de l’Etat s’écarte des objectifs de la Révolution, s’éloigne d’une approche participative, bafoue le principe de la séparation des pouvoirs, ignore celui de la protection des libertés individuelles et collectives et engage des disputes politiques stériles. A quoi il faut ajouter ses mesures prises depuis le 25 juillet 2021, notamment la comparution de civils devant les tribunaux militaires, l’interdiction de voyager de certains citoyens, la mise en résidence surveillée de certains autres sans autorisation judiciaire, ni motif déclaré, les atteintes à la Constitution tunisienne illustrées entre autres par une mainmise sur tous les rouages de l’État.
Signataires
Yadh ben Achour, professeur de droit constitutionnel, membre du Comité des droits de l’homme des Nations Unies
Souhayer Belhassen, présidente d’honneur de la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme
Kamel Jendoubi, ancien ministre, président d’honneur d’EuroMed-Droits
Khédija Cherif, ancienne présidente de l’Association tunisienne des femmes démocrates
Mouhieddine Cherbib, président du Comité pour le respect des libertés et des droits de l‘homme en Tunisie
Sana Ben achour, présidente de l’association Beity
Mokhtar Trifi, président d’honneur de la Ligue tunisienne des droits de l’homme
Ramy Salhi, directeur du bureau Maghreb d’EuroMed-droits
Bochra Bel Haj Hamida, défenseure des droits de l’homme, ex-députée
Messaoud Romdhani, représentant du Comité pour le respect des libertés des et des droits de l’homme en Tunisie
Bassem Trifi, vice-président de la Ligue tunisienne des droits de l’homme
Khemaïes Chammari, ancien ambassadeur de Tunisie à l’UNESCO
Ayachi Hammami, ancien ministre, militant pour les droits de l’homme
Monia Ben Jemia, ancienne présidente de l’Association tunisienne des femmes démocrates
Wahid Ferchichi, professeur de droit constitutionnel
Khalil Zaouia, président du parti Ettakatol
Issam Chebbi, secrétaire général du parti Joumhouri
Frej Fenniche, ancien haut fonctionnaire du Haut-commissariat des droits de l’homme
Taoufik Chammari, militant contre la corruption
Chokri Jelassi, militant politique
Jalel Matri, président de l’association Pont de Genève
Maher Hanin, chercheur en sociologie
Hichem Abdessamad, militant pour les droits de l’homme
Alya Cherif Chammari, avocate, présidente de Coalition maghrébine 95 pour l’égalité
Walid Larbi, universitaire, membre fondateur de l’association Beity
Mohamed Ben Saïd, militant pour les droits de l’homme
Mohsen Dridi, militant associatif
Malek Kefif, membre de l’Instance nationale de lutte contre la traite humaine
Dr Zouheir Ben Youssef, universitaire, ancien vice-président de la Ligue tunisienne des droits de l’homme
Zied Elhani, journaliste
Olfa Khedimi, journaliste
Naziha Rjiba, journaliste, défenseure des droits de l’homme
Jaouhar Ben M’barek, militant politique
Zina Khemiri, journaliste
Raja Ben Slama, universitaire
Chaïma Aïssa, universitaire
Abdessalem Kekli, universitaire
Moncef Khebir, président de l’Association tunisienne des droits de l’homme -Tataouine
Dr Abdelmajid Msalmi, chirurgien, militant des droits de l’homme et activiste politique
Anouar Kousri, avocat, ancien vice-président de la Ligue tunisienne des droits de l’homme
Nabil Hajji, député à l’Assemblée des représentants du peuple
Olfa Lamloum, chercheuse
Ridha Smaoui, défenseur des droits de l’homme
Samir Dilou, avocat, député à l’Assemblée des représentants du peuple
Yamina Zoghlami, députée à l’Assemblée des représentants du peuple
Khaled Amami, organisation de défense de la souveraineté numérique
Zoubir Mouelhi, professeur à l’université de la Sorbonne
Asma Baccouche, journaliste
Mohamed Habib Marsid, universitaire, défenseur des droits de l’homme
Hatem Chaabouni, président de l’association des chômeurs du Kef
Mahmoud Oueslati, ex-vice-président de la Ligue tunisienne des droits de l’homme
Mouhieddine Lagha, membre du comité directeur de la Ligue tunisienne des droits de l’homme
Sami Brahim, chercheur universitaire
Mohamed Ouled Rhila, président de l’association Ensemble pour la citoyenneté et le changement
Faouzi Maallaoui, avocat
Hinda Channaoui, militante féministe et défenseure des droits de l’homme
Ali Maki, famille des martyrs de la révolution de la liberté et de la dignité
Maha Abdelhamid, universitaire, défenseure des droits de l’homme
Mohamed Khenissi, président de l’association Nachaz (Dissonances)
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