Ce rapport présente une modélisation des coûts et des dommages qu’entraîneraient un déversement de moins de 10 % de la cargaison d’un superpétrolier de taille Aframax, un type de navire ayant récemment obtenu l’autorisation du gouvernement fédéral de sillonner les eaux du fleuve Saint Laurent. Selon le modèle, les coûts de nettoyage d’un déversement de 10 millions de litres atteindraient 2,14 milliards de dollars. La limite de responsabilité pour un déversement étant fixée à 1,4 milliard $, ce sont les contribuables qui devraient assumer l’excédent.
L’impact sur l’environnement serait dévastateur pour le lac Saint-Pierre, une réserve mondiale de la biosphère désignée par l’UNESCO qui figure également sur la liste des zones humides d’importance internationale. Le lac Saint-Pierre est une source d’eau potable et abrite 27 espèces végétales rares, 79 espèces de poissons et 288 espèces d’oiseaux aquatiques.
« Le lac Saint Pierre est un trésor et une merveille dans la région. Un seul déversement de pétrole pourrait signifier la mort instantanée de toute forme de vie pour des générations à venir », a prévenu Steven Guilbeault, directeur principal à Équiterre. « Compte tenu du coût écologique très élevé d’un déversement, le transport de bitume dilué devrait être interdit sur le fleuve Saint Laurent ».
Les superpétroliers chargés de bitume dilué en provenance des sables bitumineux de l’Alberta seront plus nombreux à mesure que le géant pétrolier Suncor et la société d’oléoduc TransCanada augmenteront leurs exportations à partir des ports situés le long du fleuve Saint Laurent. Le bitume issu des sables bitumineux est extrêmement difficile à contenir et à nettoyer en cas de déversement sur les eaux, car il coule au lieu de flotter.
L’étude réalisée démontre également qu’en cas de déversement de pétrole, l’état des glaces et le manque de ressources de la petite société privée chargée du nettoyage sur le Saint Laurent rendraient toute intervention d’urgence extrêmement difficile. Dans des conditions normales, un déversement pourrait recouvrir la totalité du lac Saint Pierre en aussi peu que huit heures, soit beaucoup plus rapidement que la mise en place d’une intervention d’urgence.
« Nous devrions réduire la quantité de pétrole transporté sur le Saint Laurent, pas l’augmenter », a fait valoir Mark Calzavara du Conseil des Canadiens. « Doubler le nombre de superpétroliers et doubler leur volume signifie qu’un déversement de pétrole aux conséquences désastreuses n’est plus qu’une question de temps ».
Le rapport recommande plutôt de réduire la taille maximale des navires et le volume d’exportation, d’améliorer les moyens d’intervention en cas d’urgence, d’abolir les limites de responsabilité et de tenir l’expéditeur conjointement responsable des coûts liés à un déversement.
« Les conséquences environnementales associées aux accidents pétroliers, que ce soit en milieu terrestre ou aquatique, se révèlent généralement catastrophiques pour les écosystèmes directement touchés. Les efforts de nettoyage et de remédiation s’avèrent toujours très coûteux et souvent peu efficaces », écrit Émilien Pelletier, professeur émérite et chaire de recherche du Canada en écotoxicologie marine à l’Université du Québec à Rimouski, dans la préface du rapport.
Pour lire le rapport complet : http://www.equiterre.org/publication/un-desastre-en-double