Les mouvements sociaux renouvellent leur rejet de la Mission des Nations Unies pour la Stabilisation d’Haiti (MINUSTAH) au lendemain du renouvellement de son mandat pour un an par le Conseil de sécurité.
Les Nations Unies ont échoué avec leur mission de stabilisation en Haïti et ont plutôt renforcé la crise structurelle du pays, déclare ce vendredi 15 octobre lors d’une conférence de presse, Camille Chalmers, directeur exécutif de la Plateforme de Plaidoyer pour un Développement Alternatif (PAPDA).
La veille, un sit-in de protestation a eu lieu devant le local du ministère des affaires étrangères à l’initiative de plusieurs organisations sociales. Elles ont exigé le départ immédiat des casques bleus.
« Les Nations Unies ont des missions dans le pays de façon continue pratiquement depuis 1993. De 1993 à 2010 cela fait 17 ans et ce sont 17 ans d’échec. 17 ans durant lesquels aucun des objectifs de ces missions n’a été atteint. Et nous pouvons même avancer que la présence de ces missions n’a fait qu’aggraver la crise structurelle en Haïti », juge Camille Chalmers.
Créée en 2004, la MINUSTAH devait au départ instaurer un climat de stabilité et de sécurité, suivant la résolution adoptée à cette époque.
« Durant la période 2004-2010 nous avons vécu des flambées d’insécurité. Le phénomène de l’insécurité est devenu cyclique et récurrent avec des hauts et des bas incessants », analyse t-il, ajoutant que l’insécurité s’est aggravée avec la présence de la MINUSTAH.
La mission onusienne a également eu pour mandat d’assurer la réalisation d’élections crédibles et démocratiques. Un autre échec, selon le directeur exécutif de la PAPDA, relevant les doutes sur la crédibilité du Conseil Electoral Provisoire (CEP) responsable de l’organisation des prochaines présidentielles et législatives du 28 novembre prochain.
« En terme de construction d’une ambiance et d’une tradition démocratique, nous avons régressé par rapport aux périodes précédant la venue de la MINUSTAH », soutient-il.
Le Conseil de Sécurité a de plus donné mandat aux casques bleus de garantir le respect des droits humains, mais ils ont plutôt violé les droits des citoyens et citoyennes, relève t-il. Il rappelle à ce titre les cas de viol perpétré par 104 soldats sri-lankais sur des femmes et des filles haïtiennes. Rapatriés depuis les méfaits, ils n’ont toutefois pas été jugés.
D’autres mandats accordés au cours des années par le Conseil de Sécurité à la MINUSTAH comme la relance économique ou la surveillance des frontières et le contrôle de la circulation des stupéfiants, témoignent d’un échec flagrant, souligne l’économiste.
Par ailleurs, de 2004 à 2009, la MINUSTAH a couté 5 milliards de dollars, relève Chalmers. « En ce sens il est extrêmement important de noter qu’il y a tout un volume de ressources qui sont dépensées dans le pays. Mais plutôt que de servir au renforcement des capacités institutionnelles de l’Etat haïtien, elles sont employées dans des gaspillages en frais de fonctionnement de la mission onusienne ».
D’un autre coté, la présence de la mission déployée sous couvert du chapitre 7 de la Charte de l’ONU en Haïti est illégale, martèle t-il. Ce chapitre prévoit le déploiement de forces de maintien de la paix dans les cas de génocide, de guerres civiles ou crimes contre l’humanité.
« Même si entre 2003 et 2004 il y a eu une crise politique très sévère, il n’y avait ni génocide, ni crime contre l’humanité, ni affrontements au sein de la population », rappelle t-il, tout en estimant que la MINUSTAH entre dans le cadre d’une « nouvelle offensive de l’impérialisme américain » afin de militariser la Caraïbe.