Édition du 19 novembre 2024

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Pour que chaque vote compte

Les institutions parlementaires québécoises datant de 1792 sont parmi les plus vieilles du monde. Il s’agit d’un riche héritage dont nous pouvons être fiers. Malheureusement, les longues traditions sont aussi celles qui sont les plus difficiles à changer : il est plus aisé de laisser se perpétuer une règle archaïque existante que de risquer sa remise en question. C’est le cas pour notre vieux mode de scrutin hérité de l’Empire britannique. Aucun gouvernement n’est parvenu à le changer fondamentalement malgré des promesses répétées. Historiquement, le débat est réservé à des initiés. Au Québec, on discute de l’adoption d’un système de représentation proportionnelle datant de 1902[1]. Il serait temps d’agir. Le gouvernement Legault en a fait la promesse.

Nous élisons nos représentants de la même manière depuis toujours. Notre territoire est divisé géographiquement en circonscriptions. La personne recueillant le plus grand nombre de votes devient député, peu importe le niveau d’appui obtenu. Ça a le mérite d’être simple, mais ce mode de scrutin a été créé à une époque où la participation à la vie politique était réservée à une minorité d’hommes aisés, traditionnellement organisée autour de deux partis. De nos jours, ce mode de scrutin échoue dans la représentation de la diversité de notre société. De plus, il crée des distorsions importantes entre le poids des votes reçus et le pouvoir obtenu. Voici, à titre d’exemple, le pourcentage des votes accordés à chaque parti comparativement au pourcentage de sièges occupés lors de la dernière élection.

Au fil du temps, des démocraties plus jeunes ont adopté, de nouveaux modes de scrutins qui sont supérieurs au nôtre sur plusieurs aspects. Celui qui serait sans doute le plus adapté au Québec est celui de la « proportionnelle mixte compensatoire ». Avec cette nouvelle méthode, chaque citoyen doit inscrire deux votes sur son bulletin : un pour une personne candidate de sa circonscription et un pour un parti politique. Le premier vote permet d’élire des députés de la même manière qu’aujourd’hui, mais avec un nombre de circonscriptions réduit. L’autre vote permet d’élire des personnes candidates choisies dans une liste rendue publique avant l’élection par les partis. Ces sièges sont ensuite attribués afin de compenser l’écart entre le pourcentage de vote pour un parti et le nombre de députés qu’il reçoit. Ce mode de scrutin combine les avantages d’avoir un représentant politique dédié à sa région ainsi qu’une représentation équitable des différents partis présents à l’Assemblée nationale en fonction du pourcentage des votes qu’ils ont réellement obtenu.

François Legault a promis de ne pas faire un Justin Trudeau de lui-même et de déposer un projet de loi qui transformerait le mode de scrutin en ce sens dès le mois d’octobre 2019. Nous avons toutes les raisons de croire qu’il tiendra parole sur ce point mais qu’il s’arrangera pour rendre impossible une réforme applicable pour l’élection de 2022.

Reste à voir si le projet de loi déposé sera à la hauteur de la réforme promise ou si, cédant sous la pression, il diluera le changement au point de le rendre presque identique au statu quo. Même si le gouvernement renie sa promesse et se refuse à l’appliquer dès 2022, il est probable qu’après le dépôt du projet de loi, une négociation débutera tout de même pour trouver un compromis pouvant constituer une réforme acceptable. Les partisans de la réforme devront rester fermes en refusant d’appuyer toute proposition n’améliorant pas significativement l’adéquation entre le nombre de votes reçus par un parti et le nombre de députés obtenus, ainsi que la représentation des femmes à l’Assemblée nationale. Sur ces deux éléments, il serait préférable d’envisager un échec du projet de loi plutôt que d’accepter de n’obtenir qu’une légère amélioration.

L’histoire nous montre bien qu’il est difficile de réformer un mode de scrutin. Si nous acceptons aujourd’hui un projet de loi qui ne serait qu’une réforme de façade, nous risquons d’être bloqués avec ce dernier pour encore plusieurs décennies.

Note

[1] https://www.democratienouvelle.ca/jalons-historiques/

Christian Daigle

Christian Daigle est élu à la présidence générale lors du 28e Congrès du SFPQ en avril 2016. Avant son élection à la présidence, Monsieur Daigle a occupé plusieurs fonctions au sein de la structure syndicale, et ce, depuis près de vingt ans, autant au palier local, régional, que national. Il a été vice-président d’avril 2005 à avril 2016 et a milité au sein du Comité national des jeunes (CNJ) de 2000 à 2005. Avant cela, il a œuvré au ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale comme agent d’aide socioéconomique dans la région de Québec – Chaudière-Appalaches. Monsieur Daigle est responsable des dossiers suivants :

 Présidence générale

 Coordination générale des services

 Porte-parole officiel du Syndicat

 Comité de coordination générale

 Demandes d’appui et d’aide financière

 Relations avec les personnes représentantes régionales et les régions

 Relations et représentations auprès des autres organisations syndicales

 Relations publiques, médiatiques et réseaux sociaux

 Représentation auprès des autorités politiques et administratives des employeurs

 Représentation auprès des instances syndicales internationales

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