Le combustible serait transporté par pétrolier sur le Saint-Laurent pour être ensuite acheminé vers les différents aéroports par pipeline (dont le très vieux et tristement célèbre pipeline Trans-Nord), par train et par barge sur le fleuve. Ce projet vise à répondre à l’accroissement de la demande en transport aérien dans les aéroports de Toronto, Ottawa et Montréal.
Les participants et participantes qui ont présenté des mémoires lors des audiences du BAPE ont été nombreux-euses à souligner le fait que, dans un contexte de crise climatique, il est irresponsable de construire des infrastructures supplémentaires pour répondre à une augmentation de la demande d’hydrocarbures.
L’augmentation des émissions de gaz à effet de serre (GES) résultant de l’accroissement du trafic aérien constitue en soi un argument sérieux pour ne pas aller de l’avant avec ce projet, en plus des risques d’accidents liés au transport pétrolier dans le Saint-Laurent, à la contamination des sols et des eaux souterraines, et au raccordement à un pipeline vieux de 65 ans qui a connu 83 incidents depuis 2004ii.
Les commissaires du BAPE ont reconnu dans leur rapport que l’augmentation des émissions de GES liée à l’aviation va à contresens de l’effort général de réduction des émissions dans les transports. Mais ils concèdent que « la portée de cet enjeu dépasse largement la portée de [leur] mandat »iii. En effet, l’étude des impacts sur les émissions des GES en aval et en amont du projet ne faisait pas partie des éléments dont devait tenir compte leur analyse.
Plusieurs personnes représentants de comités de citoyens et citoyennes ont présenté des alternatives au projet de CIAM qui permettraient de diminuer le transport aérien dans une perspective de développement durable. L’augmentation de l’offre de trains rapides entre les grandes villes canadiennes et la mise en place d’un système de quotas pour limiter l’utilisation de l’avion sont parmi les suggestions apportées. Mais, encore une fois, les alternatives au projet de terminal aéroportuaire ne faisaient pas partie du mandat de la commission du BAPE. En l’absence d’une volonté politique en faveur de la transition énergétique et de l’abandon des hydrocarbures au Québec et au Canada, on doit reconnaître que c’est aujourd’hui à la population que revient le fardeau de mener la lutte pour un avenir viable.
Le biologiste Claude Villeneuve, spécialiste des changements climatiques, traduit par une image saisissante l’urgence de nous débarrasser des combustibles fossiles : une personne tombe en chute libre du haut d’un édifice de 50 étages ; arrivée devant le sixième palier, elle dit à un collègue qu’elle aperçoit : « Jusqu’ici tout va bien ! »iv À faire toujours plus de la même chose en matière d’économie, d’énergie et de consommation, on arrive en chute libre à l’effondrement en battant des bras !
Espérons qu’aux élections de l’automne prochain, la population du Québec saura se choisir un gouvernement sensible à l’urgence climatique et tourné vers l’avenir. Les Libéraux et la Coalition Avenir Québec envisagent encore le développement des hydrocarbures au Québec comme une occasion d’affaires alors que cette filière est une aberration tant sur le plan économique qu’environnemental. Seuls le Parti Québécois et Québec Solidaire ont affirmé leur opposition au développement et au transit des produits pétroliers et gaziers chez nous. C’est l’avenir de nos enfants et de nos petits-enfants qui est au centre de ces enjeux. Ne l’oublions pas au moment d’aller voter.
Louise Morand
Comité vigilance hydrocarbures de L’Assomption
12 juin 2018
Notes
1. http://www.bape.gouv.qc.ca/sections/rapports/publications/bape343_rxp.pdf
2.http://www.bape.gouv.qc.ca/sections/mandats/Terminal_Montreal_Est/documents/DM25_P.pdf
3.http://www.bape.gouv.qc.ca/sections/rapports/publications/bape343_rxp.pdf, p.10.
4.Claude Villeneuve. Est-il trop tard ? Le point sur les changements climatiques. Québec : MultiMondes, p.6.
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