La Commission d’examen conjoint chargée d’étudier le projet de pipeline Northern Gateway a vu un nombre record de personnes s’inscrire pour participer en tant qu’intervenantes. Ces citoyens cherchent ainsi à exprimer leurs préoccupations au sujet d’un projet qui prévoit la traversée par des pipelines de plus de 1 000 rivières et cours d’eau de la C.-B., dont trois importants bassins hydrographiques à saumon.
Le PDG d’Enbridge, Patrick Daniel a lui-même déclaré : « Pouvons-nous garantir qu’il n’y aura jamais d’accident ? Non. Personne ne le peut. »
Et comme si cela ne suffisait pas, Enbridge propose de construire les pipelines Northern Gateway sur un territoire autochtone non cédé dont l’accès à la compagnie avait été refusé. Pour Mike Hudema, responsable de la campagne climat et énergie à Greenpeace Canada « ce gouvernement semble préparer le terrain pour contourner la loi canadienne sur les Premières Nations, et il semble ne pas vouloir tenir compte du processus d’approbations environnementales. »
Mais le plus décevant dans l’attitude d’Ottawa, c’est qu’au lieu de reconnaître qu’avec l’exploitation des sables bitumineux le Canada s’est placé dans une souricière, votre équipe gouvernementale semble bien décidé à enfoncer davantage le Canada dans cette voie sans issue. Inventer des boucs émissaires et des épouvantails pour détourner l’attention des vrais enjeux ne pourra pas faire disparaître ce désastre monumental que sont les sables bitumineux. M. Oliver, le problème n’est pas les environnementalistes, mais bien le projet en lui-même.
« Ce gouvernement veut qu’on ne discute en public ni de la désastreuse feuille de route de l’industrie pétrolière en matière de sécurité, ni des conséquences que pourraient avoir les déversements de ce projet de pipeline de 1 170 kilomètres sur les droits des autochtones, les montagnes Rocheuses, la côte de la C.-B. et les 1 000 rivières et cours d’eau que cet oléoduc traverserait, » souligne Mike Hudema.
Les citoyens, que cette question mobilise, ont l’impression très nette que leur gouvernement n’attache aucune importance à leurs préoccupations. Pendant ce temps « le gouvernement Harper qualifie ces personnes d’" extrémistes étrangers" » ajoute Mike Hudema. Or le Canada, faut-il le rappeler est une démocratie. C’est un pays où il est possible de bloquer les projets déficients qui ne respectent pas l’environnement, les droits des autochtones et qui ne tiennent pas compte de l’aggravation de la crise climatique. Jusqu’à preuve du contraire, c’est un endroit où il est possible de mettre fin à l’exploitation des sables bitumineux, et de faire preuve d’initiative à l’échelle internationale en investissant dans l’avenir énergétique propre et durable que nous méritons tous.
« La réaction du gouvernement Harper face au nombre record des personnes désireuses d’exprimer leurs préoccupations lors des audiences publiques rappelle tristement les attaques que réservent les républicains américains à ceux qui sont en désaccord avec leurs politiques. Notre gouvernement devrait appuyer et encourager toutes les voix qui cherchent à se faire entendre. Notre démocratie est censée être au service du peuple, elle ne doit pas être inféodée aux intérêts particuliers des entreprises pétrolières » a ajouté Mike Hudema en réaction à votre lettre ouverte.
Le moment est venu de relever le niveau de nos ambitions et de viser plus haut. En fait, ce qui semble constituer un problème grave et urgent à l’échelle nationale, c’est le manque d’ambition du gouvernement dont vous faites partie. Les Canadiens souhaitent éviter que leurs enfants et petits-enfants héritent d’une planète saccagée ; ils ne doivent ni subir l’humiliation d’avoir à vivre dans un pays qui enfreint les lois destinées à protéger les droits des Premières nations, ni être condamnés à faire face à une crise climatique qu’on aurait pû éviter. Pour cela, il va falloir viser plus haut, Monsieur le ministre, il va falloir viser beaucoup plus haut…
* L’auteure est blogueuse pour Greenpeace Canada
Complément d’information
Cette lettre fait suite à la parution de la lettre ouverte de Joe Oliver, ministre fédéral des Ressources naturelles, dont voici un extrait :
« Malheureusement, il existe des groupes environnementaux et autres radicaux qui cherchent à bloquer les opportunités qui s’offre à nous de diversifier nos échanges. Leur but affiché est de stopper les projets d’envergure sans égard du coût pour les familles canadiennes de la perte d’emplois et du ralentissement économique.
Pas d’industrie forestière, minière, pétrolière ou gazière. Pas de nouveaux barrages hydroélectriques.
Ces groupes menacent de détourner notre système de réglementation pour atteindre leurs objectifs idéologiques radicaux. Ils cherchent à exploiter toute les failles, enchainant les audiences publiques pour s’assurer que les projets prennent du retard et ainsi tuer les bons projets. Ils utilisent des fonds venant de groupes d’intérêts étrangers pour saper l’intérêt économique national du Canada. »
Joe Oliver, ministre des Ressources naturelles