Les publicités de Canada Action affirment que « le GNL de la Colombie-Britannique réduira les émissions mondiales ». Ce faisant, d’après l’organisme de réglementation chargé d’administrer le Code canadien des normes de la publicité pour garantir la véracité et l’exactitude de la publicité, elles « déforment le véritable propos des spécialistes et des autorités scientifiques », « promettent un résultat sans éléments probants valides et fiables » et donnent « une fausse impression générale que le GNL de la Colombie-Britannique est bon pour l’environnement, ce qui constitue de l’écoblanchiment ».
Pour sa campagne multicanal promouvant le pétrole et le gaz naturel, Canada Action a choisi un fond vert distinctif, ce que les Normes de la publicité dénoncent comme « un moyen de faire valoir un avantage environnemental que le gaz naturel ne possède pas réellement ». L’organisme à but non lucratif enregistré au fédéral affirme être une initiative populaire non partisane visant à encourager le soutien à l’industrie pétrolière et gazière canadienne. Canada Action a dépensé plus de 5 millions de dollars en publicité entre 2017 et 2022, selon des documents publics. Il ne divulgue pas publiquement ses sources de financement, qui comprennent plus de 7 millions de dollars en commandites par le secteur privé, mais un reportage d’investigation a révélé le versement de paiements par l’industrie pétrolière et gazière, dont 100 000 dollars provenant d’ARC Resources.
Même si le Conseil des Normes de la publicité est parvenu à une décision le 30 janvier 2024, les publicités n’ont pas été retirées. À ce jour, elles continuent d’être diffusées dans des emplacements bien en vue dans les grands centres urbains de l’Ontario et de la Colombie-Britannique, sur les tableaux d’affichage, à la radio, dans les transports en commun et dans les grands quotidiens. L’une de ces publicités occupe d’ailleurs entièrement la première page du Times Colonist du 4 mai. (En Ontario, les publicités affichent le message « Le GNL canadien réduira les émissions mondiales ».) Contrairement à d’autres organismes d’autorégulation de la publicité, tels que l’Advertising Standards Authority au Royaume-Uni et la National Advertising Division aux États-Unis, les décisions des Normes canadiennes de la publicité sont confidentielles et ne sont pas rendues publiques.
Selon la Dre Melissa Lem, médecin de famille à Vancouver et présidente de l’Association canadienne des médecins pour l’environnement : « Ces publicités sont des exemples classiques d’écoblanchiment, sans parler de leur couleur verte. Nous nous sommes sentis obligés de rendre cette décision publique parce que la population canadienne a le droit de ne pas être trompée à propos de l’impact du GNL sur le climat, l’environnement et notre santé ».
L’ACME sonne l’alarme depuis plusieurs années au sujet des effets nocifs causés par l’extraction et la combustion du gaz naturel sur la santé humaine, la santé des écosystèmes et les changements climatiques, en particulier en Colombie-Britannique. Ceci inclut de nouvelles études qui établissent un lien entre les activités de fracturation et les issues défavorables des grossesses (naissances prématurées, anomalies congénitales, poids insuffisant à la naissance), la leucémie infantile, les maladies respiratoires et cardiovasculaires, ainsi que la mortalité prématurée.
Dans une initiative dirigée par l’ACME, les organisations pour la santé au Canada militent depuis 2022 pour l’interdiction de la publicité sur les combustibles fossiles, à l’instar de la promotion du tabac, afin de protéger la santé publique. Ces organisations craignent que les campagnes de désinformation de l’industrie pétrolière et gazière nuisent à l’action climatique et perpétuent les méfaits pour la santé et l’environnement, tout comme l’industrie du tabac a trompé le public pendant des années au sujet de la dangerosité de ses produits.
L’ACME a donc envoyé une lettre aux entreprises où les annonces ont été diffusées, dans laquelle elle demande le retrait des publicités de Canada Action prétendant que le GNL de la Colombie-Britannique ou du Canada réduira les émissions mondiales, de même que toute publicité similaire. La lettre réclame également l’affichage d’annonces pour corriger ces publicités et la mise en place d’un système complet permettant de détecter les pratiques d’écoblanchiment à l’avenir. Parmi les destinataires, on trouve TransLink, BC Transit et le Times Colonist, mais aussi les annonceurs extérieurs Branded Cities, Pattison et Lamar. Les publicités ont suscité la controverse et une pétition demandant à Translink et à BC Transit de se prononcer sur la campagne a recueilli des milliers de signatures.
Citations
Dre Melissa Lem, médecin de famille de Vancouver et présidente de l’Association canadienne des médecins pour l’environnement
« Ces publicités fallacieuses sont profondément offensantes pour les travailleurs et les travailleuses de la santé qui doivent traiter des patient(e)s souffrant des conséquences des changements climatiques : maladies liées à la chaleur, exacerbations de l’asthme causées par la fumée des feux de forêt, ou anxiété et dépression après une évacuation. Il faut y mettre un terme. Tout comme ce fut le cas pour la promotion du tabac au Canada, nous devons interdire la publicité sur les combustibles fossiles pour cesser d’alimenter la demande de produits qui nuisent à la santé et protéger la santé publique. »
Naxginkw (Tara Marsden), directrice de la durabilité Wilp pour les chefs héréditaires Gitanyow
« Les chefs héréditaires Gitanyow se réjouissent du nombre croissant de voix qui réclament la vérité et la reddition de comptes en matière de publicités fossiles au Canada. Déjà, cette année, des milliers de personnes ont été chassées de leur foyer par des feux de forêt extrêmes, ce qui montre bien l’urgence de combattre la désinformation de l’industrie pétrolière et gazière. Non seulement les campagnes trompeuses menacent l’action climatique, mais elles posent aussi de sérieux risques pour la santé publique et l’environnement. Nous félicitons l’ACME de faire preuve de leadership en tenant l’industrie responsable de ses actes et la remercions de travailler à la protection du bien-être de toutes les personnes. »
Leah Temper, directrice du Programme de politiques sanitaires et économiques, Association canadienne des médecins pour l’environnement
« L’industrie des combustibles fossiles exploite les lacunes de la réglementation canadienne pour semer la confusion et tromper le public sur la façon dont ses produits nuisent à l’environnement, à la santé publique et à l’économie. Il est inadmissible que des entreprises puissent dépenser des millions pour mentir à la population canadienne et que le public n’ait pas le droit d’apprendre la vérité, même lorsque ces entreprises sont prises en défaut. Le système est défaillant et nous avons besoin de l’intervention du gouvernement pour mettre fin à l’écoblanchiment et arrêter la machine à désinformer. »
Dre Margaret McGregor, médecin de famille, chercheuse en politiques publiques et coautrice de l’article « The human health effects of unconventional oil and gas development (UOGD) : A scoping review of epidemiologic studies » (Canadian Journal of Public Health, mars 2024)
« Espérons qu’il y aura une prise de conscience du côté du gouvernement de la Colombie-Britannique. Le GNL n’est pas une solution aux changements climatiques. De plus en plus de données probantes font état d’un taux élevé de retard de croissance fœtale, de naissances prématurées, de crises d’asthme, de leucémie infantile, d’insuffisance cardiaque et de mortalité dans les communautés exposées à l’industrie de la fracturation hydraulique. Il est temps que le gouvernement de la Colombie-Britannique tienne compte des nouvelles connaissances scientifiques sur la fracturation et la santé humaine lorsqu’il élabore ses politiques énergiques. »
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