Le gouvernement a maintenant renoncé à son cadre de négociation accéléré. Il se passe donc toujours des choses du côté des négociations dans les secteurs public et parapublic. Depuis la prise au sérieux de l’éclosion de la pandémie par des membres du pouvoir exécutif au Québec, c’est-à-dire depuis le 12 mars 2020, il y a eu, d’abord cette invitation du premier ministre du Québec, François Legault, à surseoir à ces négociations et ensuite une invitation « surprise » à participer à un processus rapide de négociation. Invitation acceptée par les huit organisations syndicales concernées par les négociations (la FIQ, l’APTS, la FAE, la FTQ, la CSN, la CSQ, le SFPQ et le SPGQ). Le processus n’a pas abouti à la conclusion d’une entente négociée avant son échéance (d’abord annoncé pour le 29 mars et ensuite repoussé de quelques jours).
Il y a surtout eu, au cours de la dernière semaine des échanges et des discussions au sujet des primes à accorder au personnel de la première ligne qui est mobilisé par la COVID-19. Primes au pourcentage variable selon les groupes visés et, pour la plupart, décidées et fixées dans le cadre d’un « Arrêté ministériel ». C’est-à-dire à l’extérieur d’un cadre qui est le résultat d’un compromis négocié. Certains groupes de salariées syndiquéEs ont maintenant droit à une bonification de leur salaire en raison du caractère essentiel de leur prestation de travail. Ce qui est tout à fait normal. Mais la prime consentie ne résulte pas d’une négociation. Autrement dit, les primes ne font pas que des heureuses et des heureux dans les rangs syndicaux. Certaines organisations les accueillent avec des « réserves », d’autres les dénoncent ouvertement et les trouvent carrément « insultantes ».
À quoi peut-on s’attendre pour la suite des choses ?
Je ne suis pas devin. Je n’ai pas non plus de boule de cristal. L’article de Denis Lessard dans La Presse (3 avril 2020) nous apprend que le président du Conseil du trésor suit de très près l’état des finances publiques et il ne semble pas trop ouvert à la perspective d’autoriser, jusqu’à nouvel ordre, de nouvelles dépenses. Il aurait même transmis, selon le journaliste, « un ordre formel, un gel absolu de toutes les dépenses ». « Tous les nouveaux programmes, les renouvellements de programme dʼaide financière qui ne sont pas reliés à la pandémie, [...] qui ne sont pas jugés essentiels et incontournables ne seront pas autorisés par le Conseil du trésor. »
La négociation ("accélérée" pour certains et "non-accélérée" pour d’autres) se poursuit toujours. Elle se conclura, je présume, quand le gouvernement le voudra bien et quand il aura devant lui une ou deux ou encore plus d’organisations syndicales qui seront prêtes à signer à des conditions qu’il jugera acceptables et supportables, à ses yeux, pour les finances publiques.
Selon une source syndicale, l’offre salariale du gouvernement se situe à la hauteur de "5% pour trois ans".
Yvan Perrier
7 avril 2020
10h45
https://mail.google.com/mail/u/0/#inbox/FMfcgxwHMZTKmdjJJBLzMMWvQbsTgsnD
https://www.youtube.com/watch?v=TBnJYKbjnWU
CSN 6
*** MISE À JOUR *** 13 H 40 ***
Suite à notre publication de ce matin, le Conseil du trésor a informé la CSN qu’il a revu sa position et qu’il ne rend plus la prime COVID conditionnelle à une entente sur trois ans. La CSN avait vivement déploré la position initiale du gouvernement. Le reste de la proposition demeure toujours aussi inacceptable.
***
Pour le gouvernement, les anges gardiens ne sont pas tous égaux
Depuis plus de deux semaines, le premier ministre profite de ses points de presse quotidiens pour souligner l’importance des anges gardiens et les remercier de leur dévouement. Depuis plus de deux semaines aussi, la CSN réclame que la reconnaissance du gouvernement à l’égard de tous ceux et celles qui sont au front se traduise, au-delà des mots, par des mesures concrètes et immédiates.
Le 23 mars dernier, nous avons demandé au Conseil du trésor de suspendre la négociation pour une période allant jusqu’à 18 mois et de mettre en place différentes mesures, dont une prime de 3 $ à 4 $ l’heure pour le personnel du secteur public appelé à contribuer aux efforts des mesures d’urgence de lutte contre la COVID-19. C’est aujourd’hui seulement que le gouvernement a répondu à cette demande.
Il propose une prime de 8 % pour une période de trois mois, pour quelques titres d’emploi, et seulement dans les trois milieux de travail suivants : les urgences, les soins intensifs et les CHSLD. Déconnecté de l’urgence de la situation, le gouvernement rend conditionnel l’octroi de cette prime aux travailleuses et aux travailleurs, qui portent à bout de bras les services à la population, à une entente globale sur le renouvellement des conventions collectives pour une durée de trois ans.
Le gouvernement ignore ainsi un nombre très important de travailleuses et de travailleurs au front contre la COVID-19. Que ce soit dans les établissements de santé, dans les CHSLD, dans les domiciles privés des bénéficiaires ou dans les écoles offrant des services de garde d’urgence pour les enfants du personnel de la santé, le danger est bien réel. En date du 1er avril, 177 personnes du réseau de la santé et des services sociaux étaient infectées par la COVID-19. Parmi ces personnes, on trouve des travailleuses et des travailleurs dont les emplois ne sont pas visés par la prime.
Pour la CSN, il est clair que l’heure n’est pas à évaluer les niveaux de risque ni pour chaque titre d’emploi ni en fonction des activités quotidiennes de chaque individu. Il s’agirait d’un exercice complexe et futile en temps de crise, sans compter les risques de débordement de décisions arbitraires. Tous nos efforts doivent être mis pour maintenir l’offre de services à la population pour sauver des vies et passer à travers la pandémie.
Aussi, en proposant une prime en pourcentage et non en montant fixe, le gouvernement laisse entendre que, pour lui, mettre sa vie en danger n’a pas la même valeur pour toutes les travailleuses et tous les travailleurs. Pour une préposée aux bénéficiaires, par exemple, la prime serait d’environ 1,75 $ l’heure, ce qui est nettement insuffisant et démobilisant. Rappelons que bon nombre d’employeurs privés (épiceries, pharmacies, usines d’abattage, etc.) offrent à leurs salarié-es des majorations de 2 à 5 $ l’heure pour reconnaître leur contribution essentielle dans cette crise.
Enfin, alors que le gouvernement affirme que la crise va durer des mois et qu’il fait pression pour imposer une convention collective de trois ans aux travailleuses et aux travailleurs, il refuse d’envoyer un message fort pour la prochaine année à l’ensemble de celles et ceux qui sont au front pour la population du Québec.
Nous poursuivons donc les discussions avec le Conseil du trésor pour une reconnaissance juste et équitable de tous les anges gardiens.
Négociation accélérée : la CSQ fait reculer le gouvernement
La date butoir du 31 mars 2020 étant arrivée à échéance depuis près d’une semaine maintenant, la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) se réjouit d’avoir fait éclater le cadre de négociation accélérée que le gouvernement souhaitait imposer pour le renouvellement des conventions collectives du secteur public.
Dès que le gouvernement Legault a manifesté son désir de renouveler les contrats de travail des employées et employés du secteur public dans des délais serrés, la CSQ a fait savoir qu’elle ne s’inscrirait pas dans un processus accéléré de négociation. La Centrale a d’ailleurs toujours déploré le sentiment d’urgence, suscité par le gouvernement, qui animait les discussions aux tables de négociation, alors que la seule réelle urgence est la crise sanitaire sans précédent qui sévit.
Gérer la crise et prolonger les conventions collectives
Alors que l’échéance du 31 mars est expirée, la CSQ constate qu’elle est parvenue à faire sortir le gouvernement de son cadre de négociation accélérée.
Réunie les 2 et 3 avril 2020, la délégation du conseil général des négociations (CGN) a mandaté l’équipe des négociations de la Centrale pour réitérer auprès des représentants du Secrétariat du Conseil du trésor sa proposition déjà présentée le 26 mars dernier (voir l’Info-Négo numéro 14).
La Centrale demande le prolongement des conventions collectives actuelles pour une période de 24 mois afin de reprendre les négociations après la crise, ainsi que la mise en place de garanties pour protéger le pouvoir d’achat de ses membres et s’assurer d’une capacité réelle d’améliorer rapidement certaines conditions d’exercice du travail.
« Nous sommes conscients des enjeux que provoque la situation de crise que nous vivons et nous allons continuer à travailler à l’amélioration des conditions de travail et d’exercice de nos membres. Dans le contexte actuel, il est important que les canaux de communication avec le gouvernement demeurent ouverts : c’est pourquoi les échanges avec les représentants du Conseil du trésor se poursuivent », conclut la présidente de la CSQ, Sonia Ethier.
Au cours des prochains jours…
Le conseil intersectoriel des négociations (CIN) se réunira au cours des prochains jours pour faire le point sur la situation et analyser le contexte de négociation. La prochaine rencontre du CGN, prévue au plus tard le 10 avril, aura également pour but de revoir l’orientation adoptée et de l’ajuster, au besoin.
La CSQ continuera de mettre de l’avant et de défendre la stratégie adoptée en CGN avec l’objectif de protéger l’intérêt de ses membres dans ce contexte de crise et d’incertitude économique.
Un message, un commentaire ?