Deux jours plus tard, le Président des États-Unis annonçait sa décision de se retirer de l’accord sur le nucléaire. Cette initiative, médiatisée à outrance, a fait les choux gras du 1erministre israélien et des dirigeants saoudiens, ennemis jurés de l’Iran. Là aussi, pas de surprise, tant les liens personnels que Trump entretient avec Benyamin Netanyahou et avec le prince héritier saoudien, Mohammed Ben Salman (MBS), sont serrés. On se souviendra que j’avais émis l’hypothèse en décembre 2017 que ce Président élu était payé et que ses intérêts étaient moins stratégiques que clientélistes et vénaux.
Alors pourquoi un tel tremblement de terre ? Intéressons-nous au seul cas français. Je rappelais, fin avril, le calendrier chargé de la présidence en termes de vente d’armes, de répression et de militarisation. En son sein, la visite autour du 10 du mois de MBS et la signature d’accords commerciaux entre entreprises françaises et saoudiennes à hauteur de 14,8 milliards d’euros. Puis dans la nuit du 13 au 14 avril, l’intervention militaire en Syrie, des États-Unis, du Royaume-Uni et de la France. Aussi, ce coup double de Trump n’aurait-il pas vocation à s’inscrire dans un bête jeu de concurrence ? Très certainement. Car Macron, après avoir reçu en grandes pompes le Président nord-américain lors des cérémonies du 14 juillet 2017, entendait à la fois conforter son opération de séduction et s’arroger le titre d’interlocuteur privilégié du vieux blond au nom de l’ensemble des Européens. Bug. Les élites, et en particulier les deux présidents américain et français, se tirent dans les pattes. Tant mieux. Mais leurs armes sont… la prolifération des armes, la course à l’armement, la culture de la guerre… et la morale qui accompagne l’ensemble : hiérarchie, ordre, virilisme, restructuration du travail, généralisation de la violence.
Aussi rappelons que les antimilitaristes, dont je suis, défendent une position politique, loin de toute sensiblerie, œuvre de bienfaisance ou acte criminel isolé. Nous politisons les débats sur ces ventes d’armes et actes de répression, en contextualisant leurs racines (développement du complexe militaro-industriel) et en prévenant leurs impacts sur les populations1. La concurrence entre Trump et Macron est réelle, sa médiatisation totalement biaisée et ses conséquences déjà désastreuses. Redisons au moins deux choses. La morale est bien du côté de ces marchands d’armes et le combat politique du nôtre. La banalisation de la violence est bien du côté de ces marchands d’armes et la lutte contre sa prolifération du nôtre. N’inversons pas les rôles.
Joelle Palmieri, 10 mai 2018
https://joellepalmieri.wordpress.com/2018/05/10/les-armes-la-politique-du-male/
1 En 2012, aux États-Unis, on comptait 85 armes pour 100 habitants et 2,91 morts par balle pour 100 000 habitants (le plus élevé en Occident) ; en France ces chiffres s’élevaient respectivement à 28 et 0,05. Source : UNODC & Small arms survey. Par ailleurs, on apprenait fin avril par l’hebdomadaire Le 1, que 15 millions d’armes sont aujourd’hui en circulation en France – 24 fois moins qu’aux États-Unis – ce qui fait 1 arme pour 4 Français (le plus haut taux en Europe).
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