1995 : création du registre des armes à feu au Canada
5 avril 2013 : le gouvernement fédéral abolit le registre des armes à feu malgré les protestations du gouvernement du Québec
Février 2013 : le gouvernement du Québec dépose un projet de loi créant un registre des armes à feu. Il entame des procédures pour éviter que le gouvernement fédéral détruise les données du registre concernant le Québec. C’est 1,56 millions d’armes à feu pour 458,000 possesseurs d’armes qui sont concernés. [1]
Juillet 2013 : « La Cour d’appel du Québec a refusé d’ordonner la sauvegarde des données québécoises du registre des armes à feu, et l’accès au registre par Québec, en attendant une décision de la Cour suprême du Canada sur cette question » [2]
Malgré tout, le gouvernement fédéral garde les données québécoises en mémoire. Cependant, si règlement il y a, les données auront presque dix années. Elles seront désuètes.
Automne 2014 : le gouvernement Harper annonce un nouveau projet de loi sur les armes à feu avec les éléments suivants :
– pour limiter la paperasse : fusion des permis d’acquisition et de possession des armes à feu
– fin de l’autorisation pour déplacer une arme d’un endroit à un autre. La politique des armes à feu devient politique sur tout le territoire canadien d’un océan à l’autre. Et cette politique prédomine sur toutes les autres politiques provinciales limitant ainsi le pouvoir des contrôleurs provinciaux. Impossible donc de suivre les armes.
« Fini, donc, la possibilité pour Québec d’ajouter quelques règles plus strictes sur son territoire. La future législation conservatrice assurera que « d’une province à une autre, la loi du pays est la même, car c’est une loi fédérale », a insisté M. Blaney en point de presse. L’endroit avait été judicieusement choisi, le ministre étant de passage dans un club de tir de North Bay, région rurale du nord de l’Ontario. » [3]
« De plus, le projet de « Loi sur la délivrance simple et sécuritaire des permis d’armes à feu » éliminerait la paperasse sur les autorisations de transport des armes en en faisant une condition pour la délivrance de permis.
Pour le moment, les propriétaires d’armes en Ontario, au Québec et sur l’Île-du-Prince-Édouard doivent faire une demande aux autorités provinciales s’ils veulent transporter une arme restreinte. » [4]
– tolérance dans le cas de non renouvellement des permis d’armes à feu. Une attitude de bienveillance à l’endroit des personnes détentrices d’armes à feu dont ne jouissent pas les autres citoyens et citoyennes dans d’autres circonstances.
– le gouvernement Harper accepte la vente des armes du type Swiss Arms Classic Green alors que la GRC demandait de les rendre illégales car trop facilement convertibles en armes automatiques.
« Il est profondément troublant que le gouvernement Harper ait décidé d’annuler la décision de la Gendarmerie royale du Canada d’interdire quatre modèles de fusils Ceská Zbrojovka (CZ 858). Un de ceux-là a été utilisé par Richard Henry Bain pour commettre son attentat politique au Métropolis le soir du 4 septembre 2012. Attentat qui ne visait nulle autre que la chef de gouvernement que les Québécois venaient d’élire » [5]
Pourquoi malgré les protestations du gouvernement du Québec, des associations policières de partout au Canada et de plusieurs groupes de la société civile, le gouvernement Harper ne recule devant rien pour instaurer sa politique de libéralisation des armes à feu ?
Le gouvernement Harper base sa politique sur deux fondements principaux : le droit de posséder une arme, de droit de se défendre.
Le droit de posséder une arme
Ce principe du droit de posséder une arme nous vient des États-Unis. Il est inscrit dans la constitution américaine :
« Le deuxième amendement de la Constitution des États-Unis d’Amérique garantit pour le citoyen américain le droit de porter des armes. Il fait partie des dix amendements passés le 15 décembre 1791, couramment appelés « Déclaration des Droits » (Bill of Rights). » [6]
Mais ce principe date de 1791. Est-il adapté à la réalité de nos sociétés actuelles ? Les chiffres nous démontrent le contraire :
« Presque 300 millions d’armes à feu sont ainsi détenues par des particuliers aux Etats-Unis (106 millions de pistolets, 105 millions de fusils et 83 millions de fusils de chasse), selon la dernière étude sociologique nationale (GSS) de l’année 2010 effectuée par le Centre de recherche national de sondage (NORC) de l’Université de Chicago. Avec 315 millions d’habitants et une moyenne d’une arme à feu par habitant, les Etats-Unis sont le premier pays au monde pour la détention d’armes à feu par les civils, loin devant le Yémen. Chaque détenteur en possède en moyenne deux à trois...
En dépit de la baisse significative du taux de détention d’armes à feu par ménage, un nombre constant de victimes par arme à feu a été enregistré. Entre 2000 et 2008, 272 590 personnes sont mortes à la suite de blessures par armes à feu aux Etats-Unis, selon les chiffres de la banque de données WISQARS du Centre américain pour la prévention et le contrôle des maladies et du Centre national pour la prévention et le contrôle des blessures, cité par le Violence Policy Center (VPC). En moyenne, 30 288 personnes sont tuées chaque année par une arme à feu » [7]
Libéraliser les armes à feu ou protéger la vie humaine ? Voilà un des questionnements que pose la possession des armes à feu. Le Canada est loin d’être une société aussi violente que les États-Unis. Mais nous avons connu le drame de la Polytechnique et la tentative de meurtre de madame Marois pour rester dans le sensationnel. Les chiffres de meurtres et de violence conjugale parlent encore plus. Les femmes sont les premières victimes. Les jeunes aussi. On se souvient de Dawson.
Le contrôle des armes à feu doit exprimer le choix d’une société de contrôler la violence principalement faite aux femmes et aux enfants. Le gouvernement Harper fait fi de ce choix. Et préfèrent satisfaire les revendications des clubs de chasseurs et de possesseurs d’armes à feu en majorité masculine. Une société de force et de violence au dépens d’une société pacifique et tolérante. Défendre les droits individuels de chasseurs au dépens des droits collectifs de la société civile, voilà la base des politiques du gouvernement Harper.
Le droit de se défendre
Mais pourquoi avoir des armes à feu ? Pour chasser ? Non pour se défendre. C’est la peur qui sous-tend les pressions à la libéralisation des lois sur les armes à feu. Peur des autres, des personnes étrangères, des personnes différentes…la peur tout court quoi…Pourquoi des armes et pas l’accueil et la communication avec les autres ? Pourquoi poser le besoin de se défendre au départ ? C’est mettre la violence en priorité.
Le droit de se défendre c’est aussi ce que promeut Israël pour attaquer les populations palestiniennes. Jusqu’où va ce droit ? Jusqu’à se faire justice soi-même au dépend du bien collectif ? C’est toujours ce retour au privé, à l’individu qui nourrissent les politiques de droite. Ce droit est basé sur une vision noire et violente de la société et développe de telles valeurs. Est-ce ce type de société que nous voulons construire ?
Alors monsieur Harper nous vous disons Non. La population québécoise demeure une société ouverte, tolérante et attachée au bien collectif. Les armes à feu n’en font pas partie, pas plus que votre pétrole puant.
Chloé Matte Gagné