Et ils l’ont fait de telle manière que l’on pouvait tout d’un coup imaginer possible, —réalistement possible— que puisse exister dans l’édifice patrimonial du Centre Durocher, une vraie maison de la culture, « un centre névralgique d’initiative culturelle et sociale » au service de tous les résidants de Saint Sauveur.
Car cette fois-ci il ne s’agissait pas seulement de dénoncer le manque d’écoute de la mairie ou de se plaindre des aberrations d’une décision de démolition prise d’en haut et sans considérations pour les besoins du quartier.
Cette fois-ci, il s’agissait de proposer quelque chose de positif et de crédible, plus encore de mesuré et d’argumenté, porteur d’une indéniable « acceptabilité sociale », favorisant qui plus est la participation de la société civile et l’apport d’expertise bénévole provenant de la ville de Québec. En montrant au passage au maire comment il serait tout à son avantage de changer dans cette affaire son fusil d’épaule. Et cela sans pour autant s’embarquer dans des dépenses faramineuses.
Là où il y a sous-équipement culturel…
C’est Antoine Baby, professeur émérite en sciences de l’éducation à l’université Laval qui a ouvert le bal en rappelant que le fait de s’engager, comme le permettrait une maison de la culture, dans des expériences culturelles et artistiques, est « un facteur d’émancipation et d’épanouissement » et « une aide significative à la réussite scolaire des jeunes ». Ajoutant : « là où il y a sous-équipement des familles et du quartier en termes culturels, il doit y avoir une action compensatoire » menée par les services publics « en termes d’équipement culturel ». C’est la fonction que remplirait justement une maison de la culture sise dans l’édifice patrimonial du centre Durocher, en plein coeur d’un quartier dont tout le monde s’entend pour dire combien il reste encore défavorisé.
Un atelier d’architecture
Car c’est ce que par la suite a fait ressortir Jacques Plante, professeur à l’école d’architecture de l’université Laval : « ce qui m’intéresse dans ce bâtiment, outre sa robustesse (il est bien construit, il n’a pas de lézardes, sa structure intérieure est assez spectaculaire), c’est le fait qu’il soit situé au coeur du quartier Saint Sauveur, proche de la rue Saint Vallier, rue fondatrice de Québec, et qu’il ait été conçu pour rassembler, unir les gens (..) Et il faudrait pouvoir garder sa grande salle, comme une salle polyvalente à vocations multiples, utilisable au gré de gens et de leurs besoins ». Aussi ce que je me propose, a-t-il lancé en concluant, « c’est de lancer un atelier d’architecture avec mes étudiants de la maîtrise autour de la rénovation du Centre Durocher (l’utilisation du bâtiment et du parc) et d’en présenter les résultats comme les différentes propositions qui en sortiront, fin mai 2017 ». Un sage moyen pour gagner du temps, offrir une année de sursis au Centre Durocher, non ?
Une année de sursis pour la démolition du Centre Durocher
En fait, il y aurait dans cette proposition de sursis d’un an de la démolition du Centre Durocher, l’occasion toute trouvée pour le maire de se raviser et de sortir la tête haute de cette affaire. En laissant « du temps au temps », et par conséquent en offrant à la réflexion collective la possibilité de faire son chemin et de trouver une solution qui tout en étant pas démesurément coûteuse (on a avancé le chiffre de 12 millions de dollars), répondait de la manière la plus sensée qui soit aux réels besoins du quartier. Ce n’est pas la première fois que le maire se raviserait —pensez à la question du ramassage des ordures ou encore au Marché du Vieux-Port. Tout donc reste encore possible aujourd’hui en ce qui concerne le Centre Durocher. Qu’on se le dise !
Pierre Mouterde
Le 17 juin 2016