Si le tout Berlin s’est dépêché de déclarer qu’il ne s’agit « que » d’un Bundesland et que cette constellation n’affecte en rien la coalition au niveau fédéral, il s’agit quand même d’une petite révolution. Car non seulement, le SPD et les Verts ont franchi une barrière psychologique en envisageant de partager le pouvoir avec Die Linke (jusqu’alors considérée comme « non-fréquentable » par les partis de gauche, au point de préférer laisser le pouvoir à l’adversaire politique au lieu de coopérer avec Die Linke), mais de plus, la Thuringe s’apprête donc à élire pour la première fois un Premier-Ministre de la Gauche dure à la tête d’un Bundesland.
Pour le SPD, il s’agit d’un pas énorme. Et d’un signal que l’époque de la RDA est définitivement finie. Die Linke, successeur de la WSAG, successeur du PDS qui lui, était le successeur du SED, parti du pouvoir pendant 40 ans de RDA, compte encore dans ses rangs, surtout dans les Länder à l’est du pays, des anciens sympathisants du SED dans ses rangs. Mais il convient de constater que ces anciens sont peu nombreux – et les résultats des Die Linken sont probants.
L’aversion que les Verts ont longtemps nourrie à l’égard de Die Linke vient de la concurrence que se livrent les deux partis depuis un moment pour la troisième et quatrième place dans le paysage politique, lutte politique qui risque désormais d’être arbitrée par les ultraconservateurs et eurosceptiques de l’AfD. La Gauche commence à se serrer les coudes...
Bien vu de la part du SPD , si l’expérience en Thuringe devait être couronnée de succès, « rouge-rouge-vert » pourrait devenir une alternative au niveau national. Et certainement le seul moyen d’envoyer un jour Angela Merkel à la retraite.
Tous les regards se tournent maintenant à Erfurt en Thuringe. Dans une ambiance politique de plomb où l’omnipuissante Angela Merkel contrôle la vie politique, une lueur d’espoir se présente à l’horizon pour la Gauche allemande. Ainsi, le SPD et les Verts retrouvent le chemin dans le monde de la Gauche, après s’être efforcés pendant longtemps à faire partie du « centre » de la politique allemande, donc, dans le no man’s land politique.
Même si la Thuringe ne compte pas parmi les Länder les plus importants en Allemagne, il se pourrait que c’est à Erfurt que le glas aura sonné pour l’ère Kohl / Merkel ayant plongé l’Allemagne dans une paralysie politique qui aura duré 30 ans.