Aujourd’hui, le PQ est usé à la corde, il n’a plus de ressort, de moins en moins de membres (encore moins en bas de 50 ans), peu d’idées (à part le verbiage de JF Lizée). Les quelques éléments social-démocrate qui restent là, Véronique Hivon par exemple, ne sont pas assez masochistes pour s’en aller dans une telle galère. Mieux vaut laisser le temps passer. Peut-être qu’un miracle surviendra. D’autres sont plus astucieux, comme Camil Bouchard, qui a délaissé le navire.
Le couronnement prévu et prévisible de PKP s’inscrit en droite ligne avec cette interminable descente.
Avec PKP, le vieux film essaie de se rajeunir. L’indépendance se présente de manière désincarnée, « ni de gauche, ni de droite ». On va tout faire : rétablir les programmes sociaux, satisfaire aux demandes des banques, ne pas trop taxer le 1%, ne pas en mettre trop sur le dos du 99 %. Exploiter la nature comme si elle n’était qu’une vulgaire « ressource » pillable à souhait, mais on va être vert. Un petit chausson avec cela ?
Le savoir de sa redoutable équipe (tout seul PKP ne tiendrait pas longtemps) va être mis à contribution essentiellement pour éviter que le grand patron de Quebecor ne dise quelque chose de substantiel et de cohérent. Un impératif pour PKP est de museler le parti une fois pour toutes, ce que Lulu n’avait pas réussi à faire. Il faudra un gros effort, mais compte tenu de l’état de faiblesse du PQ actuellement, c’est pensable. Comme cela, PKP aura les coudées franches. Serait-ce abusif de dire que PKP, digne représentant de Québec inc, s’il parvient au pouvoir, fera à peu près la même chose que Couillard et avant lui Charest, sans compter, il ne faut pas oublier, Landry et Bouchard ?
PKP s’est déjà échappé en affirmant la nécessité d’un « virage identitaire » qui aboutira à la gestion provinciale qu’on connaît bien. Si jamais l’État fédéral s’auto-pelure-de-banan-ise (comme c’était arrivé avec l’échec de l’accord du Lac Meech), PKP pourrait retenter le coup de 1995 en infléchissant la campagne vers la droite, comme si l’indépendance n’était pas d’abord et avant tout un projet d’émancipation. Il serait improbable que cela fonctionne et si cela était le cas, l’indépendance du Québec au dur soleil du capitalisme nord-américain serait un autre champ de bataille.
Ce n’est pas une consolation, mais le Québec n’est pas seul à voir se désintégrer ses traditions politiques. En France, le PS compétitionne la droite sur sa droite, y compris sur les territoires glissants de l’identité, ce qui veut en dire, en clair et en français, taper sur les immigrant-es. En Espagne, en Grèce, en Angleterre, en Allemagne, la social-démocratie est une espèce encore plus menacée que nos bélugas. La branche sur laquelle cette social-démocratie était assise, soit un « certain » compromis social permettant une « certaine » redistribution vers les couches moyennes et populaires, est non seulement sciée, mais à terre en train de pourrir. Depuis quelques années le 1 % pense que l’heure de la vengeance a sonné. Fini le compromis. La « bête » n’est plus assez menaçante. On sait bien que les formations anciennement social-démocrates capitulent pour préserver ses privilèges. En attendant, le mouvement populaire est politiquement désarçonné. Et on en profite.
Devant ce mur, il n’y a pas beaucoup de choix. Il faut dessiner un nouveau chemin. Reprendre le collier comme l’ont fait nos ancêtres après les reculs comme celui de la grande noirceur. Des « petites » gens ont dit non à Asbestos, Louiseville, dans l’est de Montréal. Des intellectuels comme les jeunes (à l’époque) de Parti Pris se sont mis au boulot. Les Gaspésiens ont bloqué des routes. Les femmes sont sorties pour dénoncer l’intolérable. Les artistes ont dénigré les puissants et chanté la révolte. La révolution pas-si-tranquille, cela a commencé par un gigantesque refus. Et de cela sont venues les alternatives. Plus tard, les vieux partis, on les a progressivement tassés.
Et c’est ainsi que la tendance a été renversée. On fera comme eux. Probablement un peu mieux, en pensant qu’aujourd’hui, il y a plusieurs générations qui ré-accumulent des forces, des babyboomers pas encore trop vieux jusqu’aux jeunes de 2012.