Tiré du blogue de l’auteure.
Porter des vestes longues et amples n’aura pas été un problème. Et à vrai dire, le hijab n’est – pour trois mois – pas un problème existentiel. Je le considérais même comme un accessoire du quotidien. Le hijab devient cependant déplaisant quand les températures extérieures affichent plus de 30 degrés. Lors des grandes chaleurs, j’avais cette manie de toujours vouloir retirer mon voile : dans la voiture, dans le bus, dans un restaurant, dans un café. Erreur de débutante. Ce ne sont pas des espaces privés. D’ailleurs, quelques personnes ne manquent pas l’occasion de te rappeler, d’un geste délicat, que ton hijab descend sous la limite respectable. Merci pour cette douce attention.
Porter le vêtement islamique est quelque chose qui relève du bon sens. Partez du principe qu’il doit être arboré en dehors de chez vous, ou dès que vous allez à la rencontre d’un inconnu. Par exemple, si l’on sonne à votre porte d’appartement, il est impératif de remettre son voile pour ouvrir la porte, on ne sait jamais qui est devant chez vous. En tant qu’étranger, il faut seulement éviter de se faire remarquer et répondre aux codes. Simple question de respect. Évidemment, de très nombreux Iraniens sont contre l’imposition du port du voile, et n’en comprennent toujours pas l’intérêt. Une petite anecdote s’impose ici.
Alors que je quittais mon appartement de Téhéran pour quelques jours, j’ai proposé à une amie franco-iranienne de venir chez moi pendant mon absence. Un jour, elle eut besoin de l’aide de mes voisins. Elle alla frapper à leur porte pour leur demander d’ouvrir le garage au sous-sol. Une femme ouvrit et lui dit d’attendre l’arrivée de son mari qui l’accompagnera au parking. Alors sans voile (car entre femmes), les portes de l’ascenseur s’ouvrirent. Apparu un homme coiffé comme un Mollah. Elle comprit alors que mon voisin était un Mollah. Elle remit son voile dans la panique.
Ma voisine demanda à mon amie d’accompagner son mari, le Mollah, dans l’ascenseur. Premier élément étonnant : une femme seule dans un ascenseur avec un Mollah. Une fois dans l’ascenseur, alors qu’elle ressentait une ambiance pesante, l’homme lui dit « j’espère vraiment que votre génération trouvera le courage pour arrêter tout cela (en lui désignant son voile qu’elle tâchait encore de remettre convenablement) ». Elle n’a pas su quoi répondre. Ces propos étant largement inattendus de la part d’un homme qui représente la haute autorité religieuse du pays.
Dans ce contexte, on voit apparaître une sorte de révolution vestimentaire dans les grandes villes. Ne pouvant s’opposer directement au régime en place, les Iraniens trouvent d’autres manières d’opérer et les vêtements sont l’opportunité pour les femmes de revendiquer leur liberté. Le voile se glisse de plus en plus et les cheveux des Iraniennes apparaissent davantage au regard de tous. Le voile est devenu un accessoire de mode qui traduit une certaine élégance. Les Iraniennes (citadines) savent s’habiller avec goût et utilisent leurs vêtements comme un moyen d’expression, se détachant alors des codes vestimentaires purement islamiques. Ayant discuté avec un Saoudien originaire de Riyad, le même phénomène voit le jour en Arabie Saoudite depuis quelques années.
A titre informatif, depuis décembre 2017, de nombreuses Iraniennes ont décidé de se montrer dans la rue sans voile afin de protester contre les règles du régime, notamment dans la région de Téhéran. Plus de 300 arrestations ont eu lieu suite au mouvement.
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