Tiré de Entre les lignes et les mots
Dans ce contexte, le Syndicat de la magistrature a décidé d’évaluer l’ampleur de ces comportements au sein même de l’institution judiciaire et questionner les rapports de genre. Il s’agissait d’interroger la capacité de l’institution judiciaire à jouer son rôle dans le traitement, la sanction et la réparation de ce type de faits.
Le Syndicat de la magistrature a ainsi adressé à l’ensemble des magistrat·es un questionnaire, sous la forme d’une enquête dite de victimation. Il leur a été demandé s’ils·elles avaient déjà été victimes ou témoins de VSS au sens large au sein de l’institution judiciaire. Une série de questions leur a été posée sur la nature des faits, l’éventuel rapport hiérarchique avec l’auteur, les conséquences des faits, la manière dont a été traité leur signalement en interne, etc.
Les 525 réponses complètes obtenues (qui s’ajoutent aux 447 formulaires partiellement ou totalement remplis mais non validés, soit 972 au total) permettent d’esquisser l’ambiance sexiste, homophobe et transphobe dans la magistrature.
La note publiée ce 5 écembre 2024 (ci-dessous), intitulée « Tout le tribunal a envie de te violer – note sur les violences sexistes et sexuelles dans l’institution judiciaire », analyse les réponses au questionnaire envoyé, dresse un état des lieux de la question et propose des pistes d’amélioration.
Ce premier travail a vocation à ouvrir de nouveaux débats et à initier des changements pour les personnels de justice mais aussi – et surtout – pour les justiciables, qui attendent légitimement une réponse à la hauteur des enjeux à l’œuvre pour notre société.
Télécharger la « Note sur les violences sexistes et sexuelles au sein de l’institution judiciaire »
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Introduction
Alors que la société française prend, année après année depuis le début de #Metoo, la mesure du caractère structurel des violences sexistes et sexuelles, les attentes fortes suscitées par cette prise de conscience vis-à-vis de la Justice se heurtent encore à des formes d’inertie ou de résistances auprès de certain·es magistrat·es. C’est dans ce contexte que des débats ont émergé, au sein du Syndicat de la magistrature, sur la nécessité d’évaluer l’ampleur de ces comportements au sein même de l’institution judiciaire. Après tout, pourquoi les tribunaux, les cours d’appel, l’École nationale de la magistrature, les services de l’administration centrale, échapperaient-ils à ce phénomène ? Les hommes et les femmes de justice sont, comme leurs concitoyen·es, aux prises avec les structures patriarcales de notre société. Si certains faits très graves font l’objet de poursuites pénales ou sont sanctionnés disciplinairement, des gestes ou des propos problématiques, s’apparentant parfois à des délits, sont évoqués au détour de conversations de couloir ou de cantine, ici et là, sans pour autant susciter de réaction institutionnelle. Alors que les auditeur·rices de justice – magistrat·es en formation – ont courageusement commencé à aborder cette question et que le principe d’un projet d’étude sur le sujet au sein du ministère de la Justice a été récemment adopté, aucune enquête approfondie n’a pour l’heure été menée.
S’interroger sur les violences sexistes et sexuelles qui seraient commises entre les professionnel·les de la justice, ce n’est donc pas seulement questionner les rapports de genre en son sein, c’est aussi et d’abord interroger la capacité des membres de l’institution judiciaire à jouer leur rôle dans le traitement, la sanction et la réparation de ce type de faits. Autrement dit, comment un procureur qui tente d’embrasser une auditrice de justice dans un couloir du tribunal orientera-t-il les enquêtes qu’il supervise dans ces matières ?
Il est rapidement apparu que la seule manière d’objectiver les violences sexistes et sexuelles dans la magistrature était d’interroger les magistrates et magistrats sur ce dont ils et elles avaient été victimes et/ou témoins. Un groupe de travail interne au syndicat a été constitué, notamment afin d’établir un questionnaire qui a ensuite été adressé à l’ensemble des juges et parquetier·ères de France ; sur environ 9 000 magistrat·es et auditeur·ices de justice, 525 y ont répondu, taux de réponse qui permet d’obtenir un premier aperçu de la situation, d’autant plus qu’au sein de la justice comme ailleurs, témoigner de ces faits, y compris de manière anonyme, est loin d’être une évidence.
Notre enquête conduit à un premier constat : l’institution est bien confrontée aux violences sexistes et sexuelles, très majoritairement sous la forme de propos ou de faits de harcèlement, mais également sous la forme d’agressions sexuelles et de viols. Les réponses mettent en évidence que ces violences sont le fait d’un double rapport de domination de genre et de hiérarchie, au sein d’une institution pyramidale. Les répondant·es se sont tous·tes dit·es en attente de réaction de la part d’une institution qui, à l’évidence, ne parvient pas à prévenir et traiter correctement ces situations. Ce premier travail d’état des lieux, d’analyse et de propositions a vocation à ouvrir de nouveaux débats et changements pour les personnels de justice mais aussi (et surtout), pour les justiciables qui attendent légitimement une réponse à la hauteur des enjeux à l’œuvre pour notre société.
https://www.syndicat-magistrature.fr/toutes-nos-publications/nos-guides-et-livrets/note-vss-2024/
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