Édition du 12 novembre 2024

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Amérique latine

Honduras : obscurantisme clérical contre droits des femmes

Depuis les élections de novembre 2009 (qui ont vu le conservateur Porfirio Lobo accéder à la présidence) et les accords de Carthagène (avril 2011) – conclus entre les présidents Juan Manuel Santos (Colombie), Hugo Chávez (République bolivarienne du Venezuela) et Porfirio Lobo – le Honduras ne fait plus la «  une  » des médias dominants. «  Circulez, il n’y a rien à voir  », telle est la consigne.

Trois ans après le coup d’Etat (juin 2009) contre le président Manuel Zelaya, on ne saurait toutefois parler de retour à la normale. Le 12 mars 2012, à Montréal, «  le journaliste Félix Molina venait témoigner de la situation dans son pays. En 2011, pas moins de 424 femmes ont été assassinées et 6723 morts violentes étaient enregistrées. Menaces disparitions, exécutions se poursuivent, plus de soixante leaders communautaires et une vingtaine de journalistes ont été assassinés  » (Eva Lacoste).

La répression cible notamment les mouvements féministes et LGBT et les organisations paysannes d la vallée du Bajo Aguán. Ajoutons-y les « bavures » policières, notamment l’assassinat en octobre 2011 du fils de Julieta Castellanos, rectrice de l’Université nationale autonome du Honduras et donc proche des élites traditionnelles (176 policiers ont été arrêtés en novembre 2011, sous l’inculpation de liens avec le crime organisé  !).

Parmi les mesures antipopulaires, on trouve les attaques aux droits des femmes. Ainsi, le Parlement envisage l’adoption d’une loi «  interdisant la recours à la pilule, y compris la pilule du lendemain ou contraception. Déjà, en 2009, la Cour suprême confirmait un décret prévoyant cette interdiction, mais Manuel Zelaya, alors président de la République, avait exercé son droit de veto, jugeant le texte contraire à la Constitution. Cette proposition de loi va très loin, puisqu’elle interdirait la pilule du lendemain, même aux adolescentes et aux femmes victimes de viol. Pour les contrevenantes, les médecins et toute personne qui les auraient aidées, des peines de prison de trois à dix ans. Selon les doctes personnages qui ont inspiré cette loi, la pilule du lendemain serait ‘abortive’, alors qu’elle se limite à empêcher les spermatozoïdes d’atteindre l’ovule et de le féconder  ».

Parmi ces «  doctes personnages  », la Conférence épiscopale catholique et son président, le cardinal Oscar Andrès Rodriguez Maradiaga, qui avait soutenu le coup d’Etat de juin 2009 (voir solidaritéS nº 158).

Concernant le projet de loi soumis au Parlement hondurien, il est conforme à la doctrine de l’Eglise catholique, apostolique et romaine (cf. l’encyclique du pape Paul VI, «  Humanae vitae  », 1968, confirmée en 2008 par Benoit XVI). «  Si le lobby religieux obtient gain de cause, le Honduras sera le seul pays au monde à ériger en infraction la pilule du lendemain. Le ‹ cardinal golpista › n’a pas été inquiété à notre connaissance. Peut-être a-t-il tout simplement pesé en faveur d’une interdiction dont rêvent les instances les plus conservatrices qui ont actuellement le vent en poupe. Avec le prochain et possible renfort des intégristes pré-conciliaires de la Fraternité St-Pie X (Ecône, canton du Valais).  »

* Source  : Eva Lacoste, «  La contraception passible de prison  », Golias Hebdo, Nº 237, 17-23 mai 2012. http://golias-editions.fr/article50...
RENK Hans-Peter

* Paru en Suisse dans « solidaritéS » n° 209 (07/06/2012). http://www.solidarites.ch/journal/

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