22 mai 2024 | tiré de Révolution permanente
Ce lundi, le procureur général de la Cour pénale internationale (CPI), M. Khan a demandé plusieurs mandats d’arrêt contre le premier ministre israélien Benjamin Netanyahou et son ministre de la défense, Yoav Gallant, ainsi que contre des membres du bureau politique du Hamas. Si cette demande doit encore être examinée par les juges de la CPI, le président américain n’a pas tardé à réagir. Le jour même de l’annonce, Joe Bidena condamné en conférence de presse la décision du procureur de poursuivre des responsables israéliens : « Permettez-moi d’être clair : nous rejetons la demande de la Cour pénale internationale de délivrer des mandats d’arrêt contre des dirigeants israéliens. Contrairement aux allégations de la Cour internationale de justice à l’encontre d’Israël, ce qui se passe n’est pas un génocide. Nous rejetons ces allégations ».
Ce mardi, c’était au tour du secrétaire d’Etat Anthony Blinken de menacer la CPI d’éventuelles sanctions de l’Etat américain. L’administration de Joe Biden va ainsi travailler avec le Congrès américain pour sanctionner la Cour pénale internationale pour être intervenu dans les affaires des États-Unis. Si la nature des sanctions n’a pas encore été annoncée, elles pourraient être similaires à celles imposées par l’administration Trump à Fatou Bensouda, alors procureur en chef de la CPI, et à Phakiso Mochochoko, chef de juridiction de la Cour, pour leur enquête sur les crimes de guerre présumés des États-Unis en Afghanistan : un gel de leurs avoirs et une interdiction de déplacement aux États-Unis.
Des mesures qui vont nécessiter une étroite collaboration entre l’administration démocrate et les Républicains, majoritaires au Congrès, comme l’a assumé Anthony Blinken dans des propos rapportés par le Financial Times : « Nous voulons travailler avec vous sur une base bipartisane pour trouver une réponse appropriée ». Une nouvelle démonstration de l’unité de l’establishment étatsunien derrière la politique du gouvernement israélien, le soutien inconditionnel à l’Etat d’Israël étant un axiome commun aux Républicains comme aux Démocrates, et de la continuité de la politique étrangère de Trump et de Biden.
Pourtant, les attaques contre la Cour pénale internationale pourraient aiguiser encore davantage les contradictions qui fissurent le camp démocrate, déjà affecté par la mobilisation étudiante contre les massacres à Gaza et la complicité de Genocide Joe. Sous la pression du mouvement propalestinien, la position de l’aile gauche du parti démocrate a grandement évolué ces derniers mois. Si les démocrates ne parviennent pas à instrumentaliser les mobilisations, l’aile gauche tente de se distinguer pour capitaliser sur le mouvement : Bernie Sanders a ainsi annoncé « soutenir la CPI et ses actions ».
Si l’administration étatsunienne tente toujours de pousser le gouvernement israélien à abandonner son projet d’invasion à Rafah, la décision de la Cour décrédibilise la diplomatie étatsunienne qui espérait pouvoir convaincre Netanyahou de renoncer à prendre Rafah en contrepartie de la fin de l’enquête de la CPI. Si le gouvernement étatsunien joue de la menace pour empêcher la suite de la procédure, l’émission de mandats d’arrêt à l’encontre des gouvernants israéliens affaiblirait encore davantage Joe Biden, déjà dans une situation particulièrement délicate.
Pour autant, ces mandats d’arrêt ne forceraient pas le gouvernement étatsunien à arrêter Benjamin Netanyahou ou Yoav Gallant, les Etats-Unis n’étant pas signataires des statuts de Rome. Même dans l’hypothèse où la CPI parviendrait à ne pas céder à la pression, il est très improbable que les mandats soient exécutés. La CPI dépend en effet de la bonne volonté des Etats membres pour arrêter les personnes ciblées par un mandat, puisqu’elle ne dispose d’aucune force indépendante. La CPI ne peut pas non plus juger les accusés par coutumace, c’est-à-dire en leur absence, et il y a donc fort à parier que les dirigeants israéliens ne répondront jamais aux accusations qui les visent devant la CPI. Si la position de la CPI est pour le moment la plus « dure » exprimée à l’encontre du gouvernement israélien, elle ne devrait pas avoir d’impact sur la situation à Gaza et la politique menée par Benjamin Netanyahou.
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