La grande coalition autour de Reagan avait rallié tous les conservateurs, mais plus encore, plusieurs Démocrates de droite (que les médias appelaient les « Reagan Democrats »). La bataille pour gagner la présidence n’était plus entre Républicains et Démocrates, mais entre un libéralisme social et des conservateurs radicaux. Depuis ce temps, cette confrontation n’a cessé de modeler la scène politique aux États-Unis.
C’est ainsi que Bill Clinton, le candidat démocrate des années 1990 a suivi l’exemple de Reagan. En tant que président de l’Association des gouverneurs (il était lui-même gouverneur de l’État de l’Arkansas), il a reconfiguré politiquement le Parti démocrate vers la droite, en démantelant peu à peu l’héritage de Franklin Delano Roosevelt (président démocrate dans les années 1930-40). Une de ses décisions importantes lorsqu’il fut élu président en 1992, fut l’annulation de la loi Glass–Steagall, qui réglementait Wall Street pour permettre aux institutions financières de manipuler l’argent de se transformer en une sorte de gigantesques casinos. Plus tard, Clinton imposa une loi-matraque contre les couches populaires en imposant de sévères restrictions à la sécurité sociale.
Aujourd’hui, Hillary Clinton qui se dit parfois de gauche, ne cesse de cafouiller, car sur le fonds, elle est de droite. Elle s’est fait entendre la semaine dernière pour regretter le décès de Nancy Reagan (la veuve de Ronald) et de ses « bonnes œuvres », alors que sous la présidence de son mari, le filet de sécurité qui avait été arraché par les couches populaires a été déchiré en lambeaux. C’est pratiquement l’ensemble du Parti démocrate qui est passé à la droite avec les mêmes politiques austéritaires et militaristes que leurs adversaires républicains.
Du côté républicain, il n’y a pas d’ambiguïté. Le débat politique dans ce parti est dominé par le Tea Party, les libertariens et l’extrême droite religieuse. Depuis l’élection d’Obama, ils sont déchaînés et n’hésitent pas à paralyser l’action du gouvernement fédéral, comme ils l’ont fait en 2013 à l’initiative du sénateur Ted Cruz. La lancée délirante de Donald Trump n’apparaît pas incongrue dans cet océan de valeurs et de proclamations de droite.
Qui s’oppose à cet immense appareil conservateur, sinon Bernard Sanders ? Tant face à Clinton que devant les Républicains qui naviguent entre la droite et l’extrême-droite, il est le seul à se tenir debout.