Madame la ministre,
Nous constatons, tous les jours, les efforts incroyables déployés par les organismes communautaires pour soutenir les populations vulnérables en ces temps de crise. Ces groupes sont un rempart essentiel dans la tempête pour de nombreux locataires, des familles sous pression, des gens sans emploi, des enfants en difficulté, des aînés et des personnes handicapées, et tant d’autres. Nous saluons haut et fort leur travail.
Toutefois, en tant que regroupements d’organismes communautaires autonomes, nous nous inquiétons de la santé des milliers d’employées du communautaire, des femmes pour la vaste majorité. Comme plusieurs, elles manquent de matériel de protection, elles vivent de la pression, elles doivent s’adapter au télétravail, souvent avec des enfants à la maison.
De leur côté, les directions doivent gérer des mises à pied, des quarantaines, le roulement et la pénurie de main-d’œuvre. Elles doivent connaître les règles sanitaires et les programmes d’aide gouvernementaux. Devant tout ce travail, nous nous attendons à une plus grande reconnaissance de la part de votre gouvernement.
Une aide lente à arriver
Dès les premiers jours du confinement, François Legault annonçait un fonds d’urgence pour les organismes communautaires qui travaillent en première ligne. Or, il s’est passé plus d’un mois avant que soit annoncée une aide de 20 millions1. Nous savons déjà que le montant s’avèrera insuffisant pour plusieurs régions. Aussi, considérant que ces fonds n’arriveront pas aux groupes rapidement, plusieurs organismes se demandent combien de temps ils pourront encore tenir. Sans disponibilité financière, il est impossible d’offrir une prime de risque au salaire, d’accorder des heures supplémentaires, d’embaucher des ressources humaines. Déjà sous-financés avant la crise, comment pourraient-ils avancer des sommes qu’ils n’ont pas ?
Dans le même ordre d’idées, nous attendons des consignes claires concernant l’allégement des responsabilités administratives des organismes. Car plusieurs groupes, qui sont dans le feu de l’action ou en réorganisation, seront incapables de réaliser leur reddition de comptes annuelle et tenir leurs assemblées dans les délais habituels. Certains n’ont même pas accès à leurs locaux ! Nous demandons donc au gouvernement de revoir les délais administratifs rapidement. En ce moment, est-ce qu’on préfère que les organismes fassent de la paperasse ou qu’ils s’occupent des populations vulnérables ?
Quel avenir pour les organismes communautaires et les populations qu’ils soutiennent ?
En plus d’être sous-financés, plusieurs organismes ont perdu des levées de fonds qui représentaient parfois des dizaines de milliers de dollars de revenus. Les employées et bénévoles sont déjà épuisés, des organismes se sont endettés pour la crise, et les levées de fonds resteront difficiles vu l’appauvrissement généralisé. Cette situation est extrêmement préoccupante. Car nous savons qu’après la crise sanitaire, la crise économique continuera de frapper de plein fouet. Les besoins d’aide et la détresse grandiront. Sans une plus grande aide gouvernementale, des organismes devront mettre des employées au chômage et ralentir leurs activités. Notre précieux filet social sera une fois encore affaibli, à un moment où nous en aurons grandement besoin.
C’est pourquoi le gouvernement doit s’engager à soutenir de manière plus conséquente les organismes communautaires dès aujourd’hui et dans les années à venir. Si on veut éviter d’aggraver les injustices sociales, déjà exacerbées par la crise, il faudra mieux soutenir les groupes qui aident les populations plus vulnérables. Les conditions de travail des employées de notre secteur, essentiel au mieux-être collectif, doivent aussi être prises en compte, comme celles des autres catégories d’employées mal reconnues. Profitons de notre prise de conscience collective pour réparer les erreurs du passé et aider les secteurs essentiels qui ont été négligés ! Au nom des milliers organismes communautaires autonomes du Québec et des millions de personnes qui les fréquentent chaque année, nous vous invitons à passer de la parole aux actes.
Hugo Valiquette, président
Coalition des Tables régionales d’organismes communautaires (CTROC)
Signataire en appui à la lettre
Marie-Line Audet, Directrice générale
Table nationale des Corporations de développement communautaire (TNCDC)
Notes
1- Une aide qui s’ajoute à d’autres fonds moins importants mis en place pour des besoins ciblés : 2M$ en aide alimentaire, 2.5 M $ pour les femmes victimes de violence et10M$ distribués par les députés.
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