Édition du 17 décembre 2024

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Contribution du Réseau écosocialiste

Contre le projet de loi 60 (la Charte des valeurs du PQ)

Tract produit par le Réseau écosocialiste - 8 février 2014

Pourquoi la prohibition des signes religieux dans le secteur public est-elle une mauvaise idée ?

1. C’est une attaque injustifiée contre les droits de travailleurs et de travailleuses.

Le gouvernement n’a présenté aucune étude démontrant que le port de ces signes d’appartenance religieuse posait problème dans un seul service public. Comment justifier une atteinte à un droit acquis sur la base de la vague impression d’un « malaise » ? Les personnes qui portent ces vêtements ou accessoires jouissent de la liberté de conscience, de la liberté d’expression et du droit au travail. On ne peut pas remettre en question ces droits simplement parce que le patron (ici, le gouvernement) déciderait arbitrairement de ne plus les respecter. De plus, ces emplois sont relativement bien payés, syndiqués et occupés majoritairement par des femmes. On doit donc encourager l’inclusion des minorités dans ces emplois, en particulier des femmes immigrantes.

2. Elle véhicule des préjugés contre des minorités.

Le caractère excessif et arbitraire de cette mesure sous-entend que les personnes qui portent ces signes, et les croyances religieuses qu’ils représentent, sont opposées à « nos valeurs ». On affirme sans preuve (et sans sentir le besoin d’avancer une preuve) que ces personnes seraient incapables de faire la différence entre leurs croyances et les lois et règlements qui encadrent leur profession et de respecter la diversité des croyances de leurs collègues et des citoyennes et citoyens bénéficiant de leurs services. Dans l’esprit du projet de loi 60, toutes les personnes qui portent des signes religieux sont des intégristes. Il faudrait être pour ce projet, sinon, on serait du côté du fondamentalisme religieux.

3. Elle mine le projet indépendantiste.

Le gouvernement Marois tente de braquer la majorité contre certaines minorités présentées comme menaçantes pour le peuple Québécois, ses valeurs et ses institutions. Cette menace appréhendée n’a été démontrée par aucune étude sérieuse. Par contre, la progression de l’anglais au travail et le déclin de l’influence du Québec au sein du Canada sont des évolutions mesurables. Au lieu de mener un combat rassembleur contre les dangers réels posés par l’évolution du fédéralisme canadien et la mondialisation néolibérale, le PQ choisit de s’attaquer à des minorités au sein de minorités. C’est la bonne vieille tactique du bouc émissaire, typique du nationalisme de droite, et une régression majeur de la part du parti qui nous a donné la loi 101 et la politique d’interculturalisme. Bien des membres de minorités, et pas seulement des minorités religieuses visibles, voient maintenant l’État canadien comme la meilleure protection pour leurs droits, ce qui ne peut que rendre plus ardu le combat pour l’indépendance.

Que répondons-nous aux arguments progressistes qui ont été avancés en appui à cette prohibition ?

« C’est pour combattre l’intégrisme. »

Rien ne démontre un lien quelconque entre la prohibition des signes religieux et le déclin du fondamentalisme. En Turquie, où le foulard islamique a été interdit dans les institutions publiques pendant des décennies, le gouvernement en place est d’inspiration islamiste. En France, où on fait la chasse aux voiles depuis quinze ans, les mouvements fondamentalistes religieux recrutent et l’extrême-droite est florissante.

La meilleure manière de combattre la montée du fondamentalisme religieux est de rassembler les gens autour de projets positifs communs, de luttes communes, au-delà des différences religieuses et philosophiques. C’est parce que le PQ est maintenant complètement dénué d’un tel projet et qu’il ne lutte plus pour rien d’autre que son propre pouvoir, qu’il sent le besoin de mettre de l’avant une politique de la division.

« C’est pour l’égalité entre les femmes et les hommes. »

Les principales victimes de ce projet de loi sont et seront des femmes, pour la plupart des femmes immigrantes qui font déjà face à des obstacles de taille pour leur intégration à la société québécoise. Les femmes musulmanes qui portent le hijab se sentent déjà ostracisées, plusieurs ont été agressées verbalement ou physiquement en public. Le féminisme devrait vouloir dire la solidarité avec toutes les femmes pour la défense de tous leurs droits, y compris leur liberté de conscience et leur droit au travail. Cette obsession avec les cheveux des femmes musulmanes est en soi une forme de sexisme. On devrait plutôt lutter ensemble pour de meilleurs services publics, une réduction des inégalités, l’accès à l’éducation, etc.
« C’est pour favoriser un meilleur vivre-ensemble. »

Le résultat concret du projet péquiste est la polarisation de notre société : les régions contre Montréal, les jeunes contre les moins jeunes, la majorité francophone contre les minorités. Ce que le gouvernement met de l’avant avec le projet de loi 60, ce n’est pas un « vivre-ensemble » mais un « vivre entre-nous », le « nous » étant tourné vers le passé supposément homogène des Canadiens-français catholiques.

Une lutte commune contre les politiques d’austérité et pour la justice sociale devrait inclure la fin du financement public des écoles privées (la plupart étant confessionnelles) et des privilèges fiscaux des organisations religieuses. Ces aspects de la laïcité concernent les institutions, pas les comportements individuels des personnes.

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