Roger Rashi : « L’après Coronavirus , construire dès aujourd’hui la transition écologique et sociale ».
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Comme vous le savez tous, et même le secrétaire général des Nations Unies l’a dit, nous vivons la pire crise depuis 75 ans. Une crise sanitaire, et vous le savez comme moi, il se peut qu’il y ait une deuxième vague à l’automne. On prévoit une grande pandémie en Afrique et possiblement entre 300 000 et 3 millions de morts en Afrique. On ne sait pas encore comment la pandémie va toucher l’Inde qui a un milliard et quart de populations. Même chose avec l’Amérique latine. Donc, il se peut fort bien que la crise sanitaire perdure jusqu’à ce qu’on découvre un vaccin. Donc premier élément d’incertitude dans cette énorme crise que nous vivons.
La deuxième : la crise économique. On s’attend à un taux de chômage de 15 à 20% d’ici à la fin de l’été sinon plus. Peut-être des faillites en série et peut-être une reprise. Trump nous dit oui. D’autres, y inclus le Fonds Monétaire International est beaucoup moins optimiste. Ils s’attendent à une reprise relativement faible en 20-21. Mais ils disent qu’il y autant de chance que la récession s’aggrave et continue en 20-21 ou plus tard. Et le tout sur fond de crise écologique. Comme vous le savez, nous venons de vivre les années les plus chaudes depuis que l’on enregistre les températures et selon le GIEC, nous avons dix ans pour effectuer une rupture avec le système actuel. Nous devons baisser nos émissions de GES de 50 à 65% d’ici une dizaine d’années sinon il y aura une catastrophei irréversible, changements climatiques climatique au niveau de la planète, des changements climatiques...
Donc, multiples crises qui s’enchevêtrent et qui créent une situation et qui sont proposées à ce que Naomi Klein a appelé une stratégie de choc. C’est quoi la stratégie de choc ? C’est une intervention massive des classes dominantes, des gouvernements de droite, des gouvernements néolibéraux pour imposer des reculs à la population, reculs politiques, économiques et sociaux massifs. Mais en même temps, ces crises-là créent l’occasion où les forces populaires, les forces du peuple peuvent gagner certaines réformes historiques pour transformer la situation. Et donc selon Naomi Klein, je pense qu’elle a raison, sur ce point-là, sur un point de bascule d’énormes luttes sociales dont l’enjeu est très clair : soit au retour à la normale du système capitaliste néolibéral inégal avec un changement climatique hors de contrôle, ou est-ce qu’on sort de ce système-là vers une mutation économique, vers un changement radical de la société si on veut survivre sur cette planète et en même temps régler les problèmes d’inégalités sociales et d’injustices que l’on connaît.
Voilà l’enjeu, soit on retourne à une certaine normalité ou bien est-ce qu’on transforme la situation pour aller de l’avant et atteindre nos objectifs en termes de projet de société.
Donc, que faire dans une situation pareille ? Premier élément, un avertissement de la part de Naomi Klein, elle est convaincue qu’on nous prépare toute une politique d’austérité. Ce qu’elle nous dit : rappelez-vous la dernière crise 2008-2009, plusieurs plans de sauvetage économique,mais à partir de 2010 l’austérité a commencé partout sur la planète. Rappelez-vous les luttes sociales massives de 2011-2012. Des luttes sociales qui sont revenues en 2019 contre l’austérité. En fait, nous ne sommes quasiment pas sortis de l’austérité depuis la dernière crise. Elle nous dit attention, ils vont vouloir faire payer au peuple, aux travailleurs, aux classes populaires ces plans de sortie de crise. Donc, préparons-nous. Profitons de l’accalmie temporaire pour se préparer politiquement, organisationnellement, stratégiquement. Commencer maintenant à mener des luttes pour être capable de gagner cette énorme bataille sociale qui s’en vient.
Que pouvons-nous faire nous, membres d’un parti politique comme Québec solidaire ? Nous avons des éléments d’un plan de relance. Nous avons déjà adopté, mis de l’avant, défendu pendant la dernière campagne électorale un plan de transition économique et écologique. De grands pans de ce plan-là restent valides, mais il faut bien sûr le mettre à jour dans le contexte d’aujourd’hui. Par exemple, nous étions un des seuls intervenants sur la question écologique à mettre de l’avant un plan de création d’emplois. Rappelez-vous, on proposait 110 000 emplois pendant un premier mandat et quelque chose comme 350 000 emplois sur dix ans. Cet aspect-là d’emplois verts, de création d’emplois verts devient encore plus crucial maintenant, car nous savons très bien que notre cher Legault va nous faire un certain chantage. « Je ne peux pas mettre en application toutes les mesures écologiques. Il faut choisir entre partir l’économie ou l’environnement. » Nous disons depuis des années, ce n’est pas un choix économie versus environnement. C’est les deux. Nous voulons des emplois verts et de qualité pour être capables de sortir de la crise actuelle.
Donc quels emplois verts ? Notre plan n’était pas très clair, mais il proposait des rénovations écoénergétiques des bâtiments. C’est quelque chose qui peut créer des dizaines de milliers d’emplois. À un moment donné, le Congrès du Travail du Canada parlait de la création de presque 100 000 emplois au niveau de Québec, au niveau de la rénovation écoénergétique des bâtiments résidentiels, des bâtiments institutionnels, etc. donc une possibilité énorme de création d’emplois verts.
Pensons aussi au transport. Nous savons tous qu’il faut investir dans les transports en commun, il faut investir massivement dans le transport en commun et d’une grappe industrielle autour de ces infrastructures cruciales. Dans notre plan on parlait de la création de 80 000, 90 000 emplois dans un mandat de quatre ans. Donc, il y a là une réserve potentielle d’emplois verts potentiels énorme.
De bons éléments que nous pouvons aller chercher pour que ne nous fasse pas ce chantage-là entre économie et environnement, mais qu’on avance dans la création d’emplois verts et de qualité permettant de sortir et de la crise économique et de la crise environnementale.
Deuxième grand aspect, revenu garanti et décent pour tous. Vous avez vu, en gros, le gouvernement fédéral nous dit moins de 2 000$ par mois, c’est invivable au niveau du Canada. Il propose un plan d’urgence pour amener à 2000$ minimum par personne, une sorte de revenu minimum garanti plus ou moins sans dire le mot. La question cruciale, puis les ministres économiques de Legault commencent à en parler, notamment Éric Girard, il nous dise attention toutes les mesures économiques adoptées actuellement vont faire en sorte que le groupe de pression, entendons les syndicats, vont vouloir pérenniser ces gains-là. Attention, il va falloir qu’on revienne au sérieux au niveau économique. En d’autres termes, ce que l’on vous a donné plus ou moins en période de crise, il va falloir le reprendre après pendant la période d’austérité. Pour nous, la bataille va être autour de la pérennisation de ces gains-là. Revenu minimum garanti décent, hausse du salaire minimum. S’assurer que les emplois cruciaux par exemple au niveau du secteur de la santé soient rémunérés et que leurs conditions de travail soient correctes.
Troisième question importante bien sûr, ce sont les investissements massifs au niveau du secteur de la santé. Rappelez-vous ce que l’on commence à sortir : manque de médicaments, des vaccins qui n’ont pas été développés, des équipements médicaux nécessaires en période de crise, les gants, les masques, les blouses.
Le parti (QS) revient de remettre sur le terrain Pharma-Québec non seulement pour le développement de médicaments, de vaccins, mais aussi pour la production d’équipements médicaux. Donc, redonner un rôle central au secteur public. Dans la santé, beaucoup de gens ont parlé de la nationalisation des CHSLD. Revenir à contrôle public des institutions de santé est crucial. Et aussi décentralisation, démocratie. Refaire en sorte de ne pas retomber dans le coup que Barrette nous a fait d’une réforme qui a développé des structures bureaucratiques incapables de répondre à la crise. Donc développement et investissements massifs dans le secteur de la santé et des services publics.
Le développement des énergies renouvelables. Je ne rentrai pas là-dedans parce qu’Éric Pineault va nous parler de cette question cruciale der sortir du capitalisme fossile, de sortir des hydrocarbures.
Tout de suite, dès maintenant, le développement d’une agriculture de proximité locale. Nous allons revenir dans nos prochaines rencontres sur cette question là pour développer en détail. Et bien sûr de cette façon-là, développer la résilience des communautés, la capacité des communautés à répondre à n’importe quelle crise, à n’importe quelle pandémie.
Je termine sur deux choses, très rapides. Quel est le rôle de QS ? Quel est le rôle d’un parti de gauche comme le nôtre ? Bien sûr, il faut développer une vision stratégique de lutte contre la crise. Il faut lutter dès maintenant pour s’assurer que les mesures nécessaaires au niveau de la crise sanitaire soient prises et défendent comme il faut les travailleurs, les travailleuses, les gens du peuple, mais en même temps, il faut aussi commencer à préparer la relance, la sortie de crise et le développement d’une vision d’un projet social nous permettant comme nous disions tous dans le mouvement écologique et les mouvements progressistes : changeons le système pas le climat.
Donc changer le système redevient un aspect de notre lutte et de notre plan de travail. Rappelons-vous en 2008 pour ceux qui étaient à Québec solidaire Amir avait terminé une intervention très importante à l’époque en disant : il faut sortir de la crise, mais pour sortir de la crise financière à l’époque, faut-il dépasser le capitalisme ou pas ? Cela avait permis une énorme discussion dans Québec solidaire qui a amené à l’adoption d’un programme en 2011-2012 avec des mesures structurantes pour non seulement combattre immédiatement sur le terrain, mais aussi pour pouvoir aller vers un autre système ou autre société à l’avenir et c’est cela que nous devons ramener aujourd’hui.
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