Tiré de Europe solidaire sans frontière.
Ces points exposés, on évoquera brièvement, pour identifier les problèmes sans les traiter de près, quelques-uns des autres paramètres d’une crise multiforme, en particulier ses conséquences socio-économiques, dont les victimes échapperont aux statistiques sanitaires, avant de conclure sur les incertitudes que dessine la carte mondiale de la pandémie.
I – Un bref historique
Les premiers cas de COVID-19 identifiés en Inde remontent au 30 janvier 2020, après le retour de Wuhan d’étudiants du Kerala. Sept semaines plus tard, le 25 mars, alors que l’Inde a recensé la veille un total de 519 cas et de 10 décès, Foreign Affairs publie un commentaire intitulé : “Le coronavirus menace l’Inde d’une catastrophe”, l’Inde étant “l’une des nations les plus vulnérables au monde”.[1] Bien d’autres analystes partagent alors ce sentiment, alors que le Premier ministre Narendra Modi a imposé la veille au soir un confinement sans préavis.
Le premier Mai, le gouvernement annonce, pour la deuxième fois, le prolongement du confinement, avec des modalités variables selon les lieux, trois types de districts étant définis : les rouges, (130 districts), les oranges (284) et les verts (319), selon le degré d’intensité de la pandémie. Ce jour-là, le pays compte officiellement 35 365 cas, et 1152 morts. A cette date, plus de 233 000 décès sont enregistrés dans le monde depuis le début de la pandémie, l’Italie, la France, l’Espagne et le Royaume Uni comptent chacun près de ou plus de 25 000 décès , les Etats-Unis en comptant près de 63 000.
A comparer ces chiffres, au 1er mai comme une vingtaine de jours plus tard, le débat court depuis plusieurs semaines : comment expliquer la situation de l’Inde (1,377 milliard d’habitants en 2019) où, pour l’heure, la catastrophe sanitaire annoncée n’a pas eu lieu ?
II – La stratégie du pouvoir, et l’évolution de la pandémie
Bien entendu, le gouvernement central, à New Delhi, met en avant les précautions qu’il a prises. Le 10 mars, le premier décès officiellement dû au coronavirus est identifié dans le sud du pays, dans l’Etat du Karnataka. Dix jours plus tard, alors que l’Inde compte moins de 200 cas déclarés et quatre décès, la plupart des visas pour les étrangers sont suspendus, de même que les vols internationaux deux jours plus tard. Les plus de 65 ans sont invités à rester chez eux, et une part des fonctionnaires est mise en télétravail. A travers le pays, la plupart des écoles, collèges, théâtres, centres commerciaux sont fermés. Les rassemblements religieux et les mariages (occasions de larges regroupements) sont suspendus.
Certains Etats prennent des mesures plus radicales : transports publics à l’arrêt au Pendjab, rassemblements de plus de 20 personnes interdits dans la ville de Delhi.[2] Le 22 mars, le Premier ministre appelle à un « couvre-feu populaire » et bénévole. Le 24, il s’adresse solennellement à la nation,[3] rappelle l’absolue nécessité de la distanciation sociale, appelle fortement à « rester chez soi », souligne le rythme accéléré de propagation de la pandémie à travers le monde, et décrète un confinement généralisé prenant effet le soir même à minuit, pour 21 jours. A cette date, on l’a dit, l’Inde compte officiellement moins de 600 cas confirmés, et une dizaine de morts. Le confinement, d’abord prévu jusqu’au 14 avril, sera par trois fois prolongé, jusqu’au 4 mai, puis jusqu’au 17, puis jusqu’au 31.
Certains Etats avaient de leur propre chef pris des mesures de confinement, la santé publique étant de leur domaine dans la Constitution. Le 2 avril, le gouvernement central annonce le lancement d’une application de traçage à télécharger sur mobiles, non sans nourrir des controverses sur la confidentialité des données collectées : en trois semaines, 75 millions de téléchargements sont opérés, 100 millions au 15 mai. Le gouvernement central continue de faire pression sur les Etats pour qu’ils diffusent au maximum l’application.
Pourtant, dans un apparent paradoxe, c’est précisément fin mars, quand commence le confinement national, que la courbe des malades officiellement identifiés décolle (elle comprend les malades guéris) : elle passe de 624 cas le 25 mars, jour du début du confinement, à plus de 5000 le 7 avril, plus de 10 000 le 13, plus de 20 000 le 21. Elle dépasse les 50 000 le 6 mai, les 60 000 le 9, les 70 000 le 11, les 80 000 le 14, les 90 000 le 16, les 100 000 le 18, les 110 000 le 20, les 120 000 le 22, 130 000 le 23 (dont 54 370 malades guéris). Le 11 mai, le cap des 2000 décès officiels était franchi, onze jours après le cap des 1000. Le 18 mai, le cap des 3000 décès est franchi à son tour [4] :
III – Un « mystère indien » ? Débats et hypothèses
Cette montée en flèche reste toutefois sans commune mesure avec celle qu’ont connu l’Europe de l’Ouest et les Etats-Unis. Au 21 mai, selon les chiffres officiels, le taux de mortalité chez les malades indiens est de 3,1%, alors qu’il est de 15,5% en France, de 14,2% en Italie et de 6% aux Etats-Unis. Le taux de décès Covid pour 100 000 habitants est pour sa part de 0,25 en Inde. Il est de 42,00 en France ; 53,50 en Italie, 28,56 aux Etats-Unis.[5] Comment analyser le parcours indien ? Comment expliquer « le mystère » de ses faibles chiffres, un terme très souvent employé ?[6] Le débat, indien mais aussi international, offre plusieurs types d’argumentaires.
La validité des chiffres officiels
Une première hypothèse interroge la validité des statistiques officielles, pour de multiples raisons. D’une part, et d’une façon générale, la plupart des décès en Inde ont lieu à la maison, et dans de nombreux Etats, une majorité des certificats de décès ne précisent pas leur cause. Dans les circonstances présentes, de nombreux malades décédés n’ont pas été testés. Les tests ne sont pas non plus systématiquement pratiqués dans les foyers ciblés, si les malades sont asymptomatiques : au 15 mai, l’Inde n’en a conduit que deux millions depuis les premiers cas identifiés, mais augmente ses capacités à plus de 90 000 tests par jour. [7] Des malades peuvent aussi ne pas déclarer leur état, par peur d’être placés en quarantaine ou par crainte d’ostracisme. Certains Etats semblent ne pas enregistrer les décès hospitaliers de patients Covid-19 si les décès peuvent être attribués à d’autres causes, les comorbidités permettant en quelque sorte d’interpréter la cause du décès.
En deçà du cadre national, la géographie des Etats est très contrastée. Le Kerala, premier touché, bénéficie de longue date des meilleurs indices indiens de développement humain, indices sanitaires inclus, et la coalition communiste en place, dans un Etat de taille modeste de 34 millions d’habitants, a su réagir vite, en ville comme via les dispensaires de campagne, multipliant tests et recherches des contacts, mobilisant les structures communautaires, et réduisant à presque rien la pandémie (4 morts au 14 mai). D’une façon générale, les cinq Etats de l’Inde du Sud (266 millions d’habitants), aux politiques sociales plus avancées totalisent au 23 mai moins de 40 000 cas et 254 décès. Le Tamil Nadu est de loin le plus touché (15 500 cas) : ont joué à la fois le retour de musulmans contaminés mi-mars lors d’une réunion du Tablighi Jamaat à Delhi [8], mais aussi la ruée sur les marchés urbains, fin avril, à la veille d’un durcissement local du confinement. Toutefois, au 23 mai, l’Etat ne compte « que » 103 décès.
Par contraste, le Maharashtra, 122 millions d’habitants, principal foyer indien, compte au 9 mai plus de 20 000 cas recensés, et 780 décès. A Bombay, Dharavi, le plus grand slum d’Asie (850 000 habitants sur 2,4 km2), bruissant d’activités de bazars et d’artisans, fut bientôt bouclé. Impossible d’y maintenir la distanciation sociale dans des logements exigus et surpeuplés. Mais on n’y comptait, au 20 mai « que » 1353 cas, et 56 décès). [9] Etat le plus touché de l’Inde, le Maharashtra comptait 47 190 cas le 23 mai, dont 32 200 malades « actifs », les décès se montant à 1577.
Comment expliquer par ailleurs que d’autres régions soient apparemment épargnées ? On peut dire l’Inde du Nord-Est (49 millions d’habitants, 431 cas, 5 décès au 21 mai) , ou l’Etat largement tribal du Chhattisgarh, en Inde centrale (28 millions d’habitants, 148 cas, aucun décès), à l’écart des grands mouvements de population (ce qui n’est pas vraiment le cas pour l’Assam) et à densité de population relativement modeste. Mais que penser du Bihar, au cœur de la vallée du Gange, 119 millions d’habitants, 1200 habitants au km2, affecté de bas indices de développement humain, qui affiche près de 2400 cas et 11 décès au 23 mai ?[10]
Le phénomène de sous-évaluation n’est pas propre à l’Inde, comme l’ont établi des enquêtes internationales. Sur ces incertitudes, des estimations contradictoires sont avancées. Le 22 mars, une étude universitaire américaine salue les mesures prises avant même le confinement général, mais donne à partir des évolutions italiennes et américaines, une fourchette très large de 58 600 à 950 000 (!) malades pour le 15 mai, si d’autres mesures ne sont pas prises, compte tenu du faible nombre de tests conduits, et des capacités hospitalières mesurées de l’Inde, qui compte 0,7 lit pour 1000 habitants, contre 2.8 aux Etats-Unis, 3,4 en Italie, 4,2 en Chine, 6,5 en France.[11] La presse indienne en déduit qu’avec un taux de mortalité de 3.4% parmi les malades (données OMS du moment), la fourchette la plus haute pourrait signifier 30 000 décès.[12] Plus modérés, des modélisateurs indiens tablent, début mai, pour une fourchette de 135 000 à 324 000 malades pour la fin du mois [13] —la fourchette basse semblant en effet devoir être dépassée fin mai, vu les données à l’heure où ce texte est rédigé. Quant au think tank gouvernemental Niti Aayog, supposé guider le gouvernement en toutes choses, il prédit imprudemment fin avril qu’il n’y aurait plus de nouveaux cas après la mi-Mai.[14] Une prévision évidemment erronée, la courbe des cas identifiés ayant continué à monter en flèche au fil de la première quinzaine de Mai et poursuivant depuis son ascension.
Le facteur jeunesse
Une seconde hypothèse met en avant la jeunesse de la population indienne : la moyenne d’âge en Inde est 27,9 ans alors qu’elle est 45,5 ans en Italie, et 41,4 en France. Au 5 avril, par exemple, les Indiens de moins de 40 ans ne représentaient que 7% des patients décédés, mais ils comptaient pour 50 % des malades. [15] Ceci étant, Hong Kong, avec 44,4 ans pour âge moyen, et la Corée du Sud (41,8) ont su remarquablement faire face. [16] L’âge moyen ne peut tout expliquer, quand il s’agit des pays exemplaires dans la lutte contre le coronavirus — il n’est que de comparer les chiffres entre France et Allemagne, la seconde, plus âgée, ayant de bien meilleurs résultats que la première, ou de penser au Japon, le plus « vieux » pays du monde (après Monaco), qui compte 777 décès pour 16 400 cas au 21 mai. Mais l’âge moyen paraît être un facteur significatif à l’échelle macro : une carte des pays par moyenne d’âge donne un assez bon reflet du contraste présent, en matière de pandémie, entre pays « vieux » et pays « jeunes ».[17]
Ruraux et urbains ?
Une troisième hypothèse prend en compte le ratio population rurale/population urbaine. Au dernier recensement, en 2011, l’Inde comptait 31,18 % d’urbains. Elle en compte assurément davantage aujourd’hui, mais reste en large majorité rurale. Sans surprise, les grands foyers de la pandémie sont urbains, y compris dans des Etats relativement peu touchés comme le Madhya Pradesh (82 millions d’habitants), 5735 cas, 267 décès au 21 mai, le foyer étant Indore, sa plus grande ville —2 millions d’habitants en 2011—où le taux de mortalité des malades fut, dans les premières semaines, supérieur à ceux de Delhi ou de Bombay).[18]
De façon significative, le Madhya Pradesh fait partie des huit Etats classés en Inde comme étant à la traîne en matière de transition démographique, de mortalité infantile, etc… Ce sont les Empowered Action Group States[19] : Bihar, Chhattisgarh, Jarkhand, Madhya Pradesh, Orissa, Rajasthan, Uttaranchal, Uttar Pradesh. Ils couvrent la majeure part de l’Inde du Nord et de l’Inde centrale, comptaient en 2011 pour 46% de la population totale indienne, et pour 52,60 % de la population rurale du pays. Au 21 mai 2020, ces huit Etats très largement ruraux comptaient 564 décès du Covid-19 sur un total nationale de 3460, soit 16,30 %. Même en prenant en compte l’incertitude des statistiques officielles, le différentiel est considérable, a fortiori, et de façon apparemment paradoxale, dans des Etats en-deçà des moyennes nationales sur le plan de la santé publique. Il y a là matière à recherche approfondie, mais une fois encore, les causalités ne sont pas univoques : Kerala et Tamil Nadu sont parmi les Etats les plus urbanisés du pays (47,70 et 48,40 %en 2011) : plus que Maharashtra et Gujarat (45,22 et 42,60 %) mais ils sont beaucoup moins touchés, y compris en taux de morbidité : le Tamil Nadu est plus peuplé que le Gujarat (72 millions contre 60 millions en 2011) ; le nombres de cas (malades actifs et malades guéris) est comparable au 21 mai (13 191 contre 12 539), mais le nombre de décès très différent : 87 contre 749…[20]
Une immunité acquise ?
Une quatrième hypothèse suggère que la population indienne aurait acquis un degré d’immunité supérieure à celui des pays occidentaux, en raison de la récurrence de problèmes sanitaires auxquels elle a fait face, même s’ils se sont atténués aujourd’hui : le choléra jadis, puis la malaria et la tuberculose qui a rendu le BCG obligatoire, ce qui semble avoir aux yeux de certains analystes un effet bénéfique (sans justifier pour autant, aux yeux de l’OMS, de préconiser le BCG dans la lutte contre le contre le Covid-19).
L’histoire des maladies transmissibles de ces dernières décennies (HIV à la fin des années 80, peste pulmonaire au Gujarat en 1994, virus Nipah au Kerala en 1998 et 2018) témoigne en outre des capacités des gouvernements n’ayant pas oublié les leçons des derniers défis à prendre des mesures efficaces.[21] Nous ne sommes plus aux temps où la peste bubonique arrivée à Bombay en 1896 avait fait quelque 8 millions de morts en plus d’une décennie, et la grippe dite espagnole de 1918 entre 10 à 20 millions de morts, faisant de l’Inde britannique d’alors le pays le plus touché au monde.[22]
L’argument des savoirs « civilisationnels »
Sont aussi avancées les hypothèses portant sur les effets spécifiques des médecines indiennes traditionnelles, en particulier ayurvédiques, pour conforter une immunité au jour le jour. En charge de ce domaine, le ministère AYUSH, en charge de ces médecines et distinct du ministère de la santé, n’a pas manqué de souligner les vertus de certaines pratiques traditionnelles auprès de tous les Etats indiens. [23] Le ministère de la santé a de son côté encouragé les recherches scientifiques sur les effets réels de ces produits traditionnels. Le Niti Aayog a lui aussi répertorié sur son site (fut-ce avec la mention « opinion personnelle), préparations et pratiques traditionnelles confortant l’immunité. [24] Un think tank proche du mouvement nationaliste hindou a de même invoqué la sagesse des préceptes civilisationnels indiens, des Védas à Gandhi, et les mérites du respect du dharma en général — cette loi universelle unissant l’homme à la nature dans les cycles du cosmos — et du dharma de la nourriture, bhojana dharma, en particulier, dont les principes « semblent de moins en moins pertinents pour certaines sections de la société mondiale de plus en plus matérialiste ».[25] L’OMS et certains gouvernements d’Etats ont toutefois mis en garde très tôt contre les rumeurs faisant de l’ail, de l’huile de sésame ou de l’urine de vache des traitements du Covid-19[26], et le Conseil Indien pour la Recherche Médicale a pour sa part refusé de donner suite à une proposition transmise par le Ministère en charge des ressources en eaux et du nettoyage du Gange de conduire des recherches sur les pouvoirs curatifs des eaux du fleuve sacré.[27]
IV – La politique d’équipement et de recherche
Au-delà du domaine des médecines traditionnelles, recherches médicales et technologiques se multiplient, sous des formes diverses. Service de recherche du ministère de Défense (DRDO), très réputés Instituts indiens de technologie (IIT), laboratoires universitaires, et initiatives privées rivalisent pour fabriquer, à des coûts très inférieurs à ceux du marché mondial, qui un laboratoire mobile de virologie, qui des ventilateurs mobiles, qui des équipements de tests. [28] Le Premier ministre put ainsi souligner, dans son discours du 12 mai, que l’Inde pouvait désormais produire 200 000 équipements de protection individuelle et 200 000 masques N-95 par jour. [29]
Mais les certifications du Conseil Indien de la Recherche Médicale sont nécessaires pour passer à la production en chaîne, et en dépit d’avancées remarquables, tout ne fonctionne pas toujours au mieux : des équipements de tests ultrarapides ont parfois donné des résultats douteux. Côté recherche médicale, en Inde comme ailleurs, de multiples pistes sont suivies : recherches sur les particularités éventuelles des souches virales connues en Inde et sur leur évolution, thérapie du plasma de malades guéris, recherche de vaccins. L’ICMR est en première ligne, mais n’échappe pas aux problèmes : l’un des cinq groupes mis sur pied par le Conseil dans le cadre de la « Task Force Nationale » contre le Covid-19, celui sur « Recherche développement sur vaccins et médicaments » a été dissous un mois environ après sa mise en place. [30]
L’Inde, qui aime se présenter comme la « pharmacie du monde », joue à cet égard sur deux tableaux. Elle mène d’une part une « diplomatie médicale » active, d’abord dans la région, mais aussi bien au-delà, jouant sur l’hydroxychloroquine dont elle est le principal fabricant mondial : elle en distribue aux petits pays voisins, et en vend aux grands demandeurs, Etats-Unis ou Brésil. Plus stratégiquement, certains de ses laboratoires, publics et privés, ont signé des contrats avec de grandes compagnies pharmaceutiques étrangères, tel le Californien Gilead pour des vaccins anti-Covid 19, qui table sur la capacité indienne de production et de diffusion à prix abordables, le jour venu : l’Inde n’est-elle pas le premier producteur de vaccins au monde ?[31] Entreprise privée, le seul Serum Institute au India, de Pune — la ville qui héberge l’Institut National de Virologie, rattaché à l’ICMR— produit 1,5 milliard de doses par an de vaccins. Bharat Biotech, autre firme privée de Hyderabad, a pour sa part l’expérience des vaccins H1N1 et Zika.[32]
A New Delhi, le ministère de la santé, dans ses bulletins quotidiens, ne manque pas de mettre en valeur les résultats obtenus. Le 21 mai, il dresse ainsi un bilan positif de l’action conduite :
« Par son action graduée, préemptive et proactive, le Gouvernement indien a pris plusieurs mesures, en liaison avec les Etats, pour prévenir, contenir et gérer le Covid-19. (…). 45 299 patients sont guéris (…), le taux de guérison s’améliorant continuellement est à présent de 40,32%. L’Inde compte actuellement 63 624 cas actifs. Tous sont sous supervision médicale. Seulement 2,94% de ces cas actifs sont en soins intensifs (…). Le taux de mortalité en Inde est de 3.06%, bien moindre que la moyenne mondiale de 6.65%. Ce qui souligne nos efforts en direction d’une identification en temps voulu des cas et de leur gestion clinique appropriée ».
Ce constat d’autosatisfaction précise aussi que les victimes décédées sont masculines à 64%, et que 85% d’entre elles ont plus de 45 ans (dont 50,5% pour les plus de 60 ans), 73 % des victimes présentant des comorbidités. [33]
V – Centralisation et fédéralisme dans la gestion de la pandémie
La référence aux Etats indiens dans le bulletin ministériel ne doit pas masquer la difficulté qu’il peut y avoir, dans une fédération qui compte en 2020 28 Etats et 8 Territoires de l’Union, à gérer pareils défis. Bien des Etats se sont plaints de n’avoir pas été consultés avant l’annonce du confinement général annoncé le 24 mars. Beaucoup aussi ont pris des mesures distinctes des instructions générales en matière de calendrier du confinement, de son degré, de la fermeture de leurs « frontières » intérieures, définissant ainsi ce qu’un observateur a appelé « un moment régional »[34]. Peu à peu, les impératifs locaux ont été entendus (d’où la carte des districts rouges, oranges et verts), le degré de pertinence des actions étant du reste souvent à une échelle infra-districts, particulièrement dans le traitement des foyers identifiés. Les questions financières ont aussi été sources de tensions, nombre d’Etats se plaignant de la mise en place d’une TVA panindienne en 2017, qui les prive d’une part notable des taxes locales dont ils auraient bien besoin en ces temps difficiles.
Des interrogations ont été portées aussi sur la nécessité de créer un Fonds central, établi le 28 mars, pour attirer des donations, sous l’acronyme explicite de PM CARES (Prime Minister’s Citizen Assistance and Relief in Emertgency Situation Fund), avec photo omniprésente du Premier ministre. [35] Tous les Etats, on l’a dit, n’ont pas déployé une égale vigilance ou une égale capacité à mettre en place la quarantaine des voyageurs, l’identification et le suivi des individus à haut risque et de ce que l’on a pu appeler la « surveillance communautaire » fondée sur les liens entre responsables politiques ou administratifs et le tissu social local. Enfin, inévitablement, la politique n’oublie pas ses droits : les tensions entre le pouvoir central et le Kerala dirigé par une coalition communiste, ou entre le pouvoir central et le Bengale Occidental où le BJP ne cache pas ses ambitions électorales, en sont l’illustration, tout comme la réticence du gouvernement BJP d’Uttar Pradesh à mettre en œuvre le plan d’accompagnement des migrants proposé par la direction du parti du Congrès, aux frais du parti. [36]
VI – Urgence sociale, défi économique, nouvel ordre mondial
Le monde de demain, objets de tant de débats en Inde et ailleurs, commence aujourd’hui : en Inde, l’urgence sanitaire a fait naître une urgence sociale, rendue particulièrement visible par le sort des migrants intérieurs, mais aussi une urgence économique, le Covid-19 ne pouvant qu’aggraver une situation déjà problématique avant la pandémie. Mais les urgences, en un sens, ne font que traduire des questions structurelles. Il est un domaine, toutefois, où les spéculations sur l’avenir vont bon train : celles du nouvel ordre mondial qui pourrait éventuellement naître de la crise. Nous évoquerons ici brièvement ces quelques points avant de revenir, pour conclure, à la pandémie elle-même et à ce qu’elle pourrait nous dire.
Une catastrophe sociale : les migrants du secteur informel
En sus de l’impérieux combat contre la pandémie, le premier défi, urgent, résulte de la part du secteur informel dans les statistiques de l’emploi : 90% en 2017-18 (agriculteurs et ouvriers agricoles inclus) . [37] Le confinement, annoncé le 24 mars sans préavis (comme l’avait été en 2016 la démonétisation des gros billets), a jeté sur les routes, seuls ou en famille, des millions de travailleurs migrants, sans protection sociale, privés tout à coup de revenus urbains et soucieux de rentrer au village, fut-ce à pied et à des centaines de kilomètres, au risque d’y apporter la pandémie. Les liaisons inter-Etats et les moyens de transports ayant été d’abord bloqués, avant d’être organisés a minima, c’est une catastrophe sociale qui s’est ajoutée au défi sanitaire, catastrophe largement couverte par les médias, indiens et internationaux. [38] Au-delà de l’opposition, de nombreuses voix se sont élevées contre l’impréparation de la politique de confinement à cet égard, et sur ce qu’elle dévoile de l’invisibilité, ici aussi, des « premiers de corvée ».
Débat sur le plan de relance
Comme tous les autres gouvernements des pays frappés par la pandémie, le gouvernement indien a dû faire face au dilemme résultant du double défi sanitaire et économique.[39] Défi d’autant plus aigu que l’économie indienne, avant même la pandémie, était entrée dans une phase délicate : une croissance en baisse continue, la Reserve Bank of India prévoyant, avant la pandémie, 5% pour 2019-2029, le chiffre le plus bas depuis la crise financière mondiale de 2008-2009. Le grand plan de relance des infrastructures annoncé par le Premier ministre lors de la fête de l’Indépendance, le 15 août 2019, laissait nombre d’experts sceptiques sur les capacités de son financement, tant par le Centre que par les Etats et le secteur privé.[40] S’y ajoutaient les problèmes structurels de l’agriculture affectant le monde rural, les données officielles recensant plus de 330 000 suicides de paysans entre 1995 et 2016.
C’est finalement à la mi-mai que le gouvernement a annoncé son programme économique et social face aux conséquences du confinement, d’abord par la voix du Premier ministre, puis par cinq conférences de presse de la ministre des Finances détaillant les grands axes d’un plan de relance, baptisé Atmanirbhar Bharat Abhiyan (ANBA), une formulation sanscrite que l’on peut traduire par « Campagne pour une Inde auto-suffisante », qui a suscité aussitôt de nombreux débats.
Dans son discours du 12 mai, le Premier ministre mit en lumière l’esprit d’une nouvelle doctrine visant à accroître l’autonomie économique indienne, tout en précisant le sens à donner à self-reliance (ce vocable des temps nehruviens si critiqués par le pouvoir et soudainement redécouvert). Mais il s’agit aussi, conformément à la politique gouvernementale pre-Covid-19, de jouer la carte de la technologie, des infrastructures, des réformes économiques attirant entre autres les capitaux étrangers : « local » est le nouveau mantra, mais l’autosuffisance invoquée « prépare aussi le pays pour une rude compétition sur la chaîne d’approvisionnement mondial ». [41] Le défi de coronavirus est ainsi présenté comme une opportunité pour faire du XXIe siècle « le siècle de l’Inde ».
Quand, dans les jours qui suivent, les cinq axes du plan de relance sont dévoilés, leur ambition est large, et se structure ainsi : i)-des mesures pour soutenir les micro- et petites entreprises affectées par le confinement : elles emploient plus de 100 millions de personnes et comptent pour près de 30% du PNB ; ii)-des mesures d’aide aux migrants et aux vendeurs des rues ; iii)- des mesures en faveur du monde agricole et du secteur primaire ; iv- des mesures en faveur des activités minières, industrielles et technologiques : charbon et minerais, industries de défense, aviation, espace, etc… ; v)-enfin, en matière d’emplois, renforcer l’appui au programme de garantie d’emploi minimal pour chaque famille rurale le souhaitant (le programme MGNREGA lancé par le parti du Congrès en 2005). [42]
En fait, derrière la relance aux indispensables objectifs sociaux, le pouvoir se saisit de l’opportunité pour avancer avec prudence certaines réformes, telle que consolider quelques entreprises publiques dans des secteurs stratégiques tout en souhaitant en privatiser de nombreuses autres, et pour conforter ce qui fut depuis 2014 le mantra économique du gouvernement Modi : le slogan Make in India, cherchant à attirer les investissements industriels étrangers et les transferts de technologie, sans y voir de contradiction avec l’objection désormais affiché de self-reliance. L’objectif est bien de relancer la croissance, fut-elle en partie verte, pas de repenser vraiment le logiciel économique et financier dominant le monde d’aujourd’hui.
Les partisans du régime ont bien entendu salué l’ampleur historique d’un tel programme, en particulier les diverses mesures d’aide financière aux personnes défavorisées, mais au-delà des critiques venues aussi bien de la gauche (pas assez de social, le plan de relance table sur l’offre, non sur la demande qui doit être beaucoup plus soutenue) que des tenants du libéralisme économique (pas assez de mesures en faveur des entreprises privées, pas assez de réformes de l’Etat), le débat s’est aussi nourri des chiffres annoncés par le Premier ministre : 260 milliards de dollars, soit près de 10% du PNB. En fait, amputé des mesures déjà prises par la Banque centrale, et des annonces antérieures du gouvernement, des analystes économiques, et pas seulement l’opposition congressiste, estiment que les fonds nouveaux qui pourront être réellement injectés représenteraient 1% et non 10% du PNB, doutant ainsi de la capacité à faire face au choc économique de la pandémie, et à la baisse attendue du PNB en 2020. [43] A titre d’estimation, 122 millions de personnes auraient perdu leur emploi en avril, tandis qu’en ce même mois, les services se seraient effondrés. [44] Les grandes agences de notation estiment pour leur part que l’économie indienne devrait se contracter de 5% pour l’année fiscale 2020-21, soit la baisse la plus forte depuis la crise économique de 1979, liée au second choc pétrolier.[45]
Quelle politique de santé publique ?
Un critique des mesures affichées après le 12 mars pose cette question simple, mais perturbante : où est la santé dans le plan de relance ? [46] La catastrophe sanitaire annoncée par les Cassandre en mars n’a pas eu lieu, mais la politique de santé publique n’en reste pas moins un défi permanent pour l’Inde. Si des progrès considérables ont été accomplis après l’indépendance, et si de multiples projets spécifiques ont été mis en œuvre par le gouvernement précédent comme par le gouvernement Modi, les chiffres soulignent la faible priorité donnée à ce domaine.
Le dernier rapport du ministère indien de la santé fait osciller, selon ses innombrables tableaux, la dépense publique pour la santé entre 0.9 et 1.17% du PNB en 2016 : un des plus bas chiffres au monde, inférieur même à la moyenne des pays classés « à bas revenus » par la Banque mondiale. Ce même rapport dénombre, au 1er janvier 2018, moins de 1,15 million de médecins allopathiques dans le pays, en sus de quelque 800 000 praticiens AYUSH (pour l’essentiel ayurvédiques et homéopathes). Le ratio dans les services de santé publique est d’un médecin allopathe pour 11 000 personnes, et les cliniques privées ne sont pas à la portée de toutes les bourses. [47] Une évaluation pour l’année financière 2019-2020 hausse la part des dépenses publiques de santé à 1,29% du PNB, tandis que la part de la santé dans le budget du gouvernement central pour l’année financière 2020-2021 n’était que de 2,2 %.[48] Même s’il convient d’y ajouter les modestes contributions consacrées à la santé dans le budget des différents Etats, beaucoup reste à faire…
L’Inde dans le monde de demain
Alors qu’en Inde comme ailleurs, les analystes tentent d’imaginer ce que sera la nouvelle géopolitique post-pandémie, et en particulier le sort du multilatéralisme (et la place croissante de la Chine, qui définira en partie les marges de manœuvre de l’Inde, jugées incertaines par de vieux routiers des affaires internationales, [49] le gouvernement de New Delhi joue de son côté la carte d’une puissance indienne accrue dans le monde d’après pandémie, soulignant la volonté et la capacité du pays à assumer un rôle dans la gestion globale du Covid-19. [50] Sans surprise, le Premier ministre, nationalisme oblige, lie le sort du monde à la prospérité de l’Inde, en invoquant l’héritage de la tradition philosophique indienne : « Quand Bharat Bhumi (la Terre de l’Inde, en sanscrit) devient auto-suffisante, la possibilité d’un monde prospère en découle. Le progrès indien a toujours été lié au progrès du monde ». [51] Sans surprise, Alice Wells, la sous-secrétaire d’Etat américaine en charge de l’Asie du Sud et de l’Asie centrale, voit une fenêtre d’opportunité pour l’Inde post-pandémie, si « un peu de dé-globalisation et le renforcement des productions nationales critiques » s’accompagnent « de politiques plus ouvertes, de baisse des tarifs permettant aux industriels en Inde de rejoindre les chaînes d’approvisionnement globales ». [52] Le libéralisme ne semble pas mort dans le monde de demain…
Conclusion : prudence et questionnements
Prenant la parole lors de la Journée nationale de la Technologie, le 11 mai, la « Scientifique en chef » de l’OMS, Soumya Swaminathan, spécialiste de la tuberculose et du VIH qui avait été, avant de rejoindre Genève, Directrice générale du Conseil Indien de la Recherche Médicale, a félicité le gouvernement de son pays « pour avoir limité jusqu’à maintenant la pandémie du Covid en Inde et pour avoir maintenu très bas le nombre de cas et le nombre de morts, comparés à d’autre pays ». Mais elle mettait aussi en garde : « C’est un marathon que nous courrons, pas un sprint, et l’Inde, comme en fait le monde entier, doit être préparée à faire face à une transmission croissante de l’infection, pour de très nombreux mois, et peut-être pour des années à venir ». Elle souligna aussi que le moment venu, le vaccin pour tous ne sera pas possible sans la participation des laboratoires pharmaceutiques indiens, et sans un système de distribution et de structures de santé adéquates. [53] La mise en garde est bienvenue. Non seulement parce que des autorités médicales envisagent la hausse des cas jusqu’en juin ou juillet,[54] et que le relâchement pas à pas du confinement par les autorités, reprise économique oblige, peuvent, comme partout, être facteurs de risques. Mais aussi parce que nombre d’épidémiologistes indiens appellent à que les stratégies d’urgence de gestion de désastres soient complétées par des politiques de santé publiques à long terme ».[55]
Reste la grande question évoquée plus haut, celle d’une éventuelle exception indienne. Pour y répondre, c’est à une autre échelle qu’il faut replacer son cas. Dans son contexte régional, l’Inde n’est pas un cas exceptionnel. Le Pakistan voisin, 220 millions d’habitants, comptait officiellement 37 000 cas, et 791 morts au 14 mai, les chiffres se haussant à 53 000 cas et 1123 morts au 23 mai. La pandémie se poursuit, et risque de croître avec le relâchement décidé du confinement pour raisons économiques, mais les chiffres, relativement plus élevés que ceux de l’Inde, restent très mesurés par rapport aux données de l’Europe de l’Ouest. Le Bangladesh, 164 millions d’habitants, compte au 23 mai 32 078 cas (dont 6486 guéris) et 452 morts.[56]
On peut certes, là aussi, mettre en doute l’exactitude des chiffres officiels, et souligner que la courbe des cas augmente vite (le Bangladesh ne comptait, neuf jours plus tôt, que 18863 cas et 283 décès). Mais dans aucun de ces pays, pas plus qu’en Inde, une hécatombe massive n’aurait échappé aux médias nationaux et aux observateurs internationaux. Même en décuplant les chiffres officiels, l’Asie du Sud resterait très loin des chiffres de l’Europe de l’Ouest et des Etats-Unis. L’Afrique, avec les mêmes réserves statistiques, offre des chiffres étonnamment voisins de ceux de l’Inde : une population égale (1 330 million), 104 279 cas, 41 717 guéris, 3185 morts au 23 mai.[57] Des africanistes de l’Institut de recherche pour le Développement (IRD) ont du reste souligné que le Covid-19, pour l’heure, mettait à mal les clichés occidentaux sur l’Afrique.[58]
Un planisphère illustrerait-il , dès lors, ce que l’on pourrait appeler une inversion du monde, les pays « avancés » étant les plus touchés, et de loin, l’ancien Tiers monde faisant beaucoup mieux , même en intégrant de fortes marges d’erreur ? L’Amérique latine semble toutefois compter une autre histoire, puisque le Mexique, avec deux fois moins de cas déclarés que l’Inde, compte presque deux fois plus de morts, et que le Brésil de Bolsonaro, avec 310 000 cas, compte 20 000 morts au 22 mai, une létalité très supérieure à celle de l’Inde, ou à celle de la Russie : 326 000 cas et 3250 morts.[59] Alors que les pays les plus touchés d’Europe voient leur courbes plafonner, puis baisser, avec le fameux indice Ro passant sous 1, et freinant donc la contamination, l’Inde et ses voisins, comme l’Afrique, voient leur courbe continuer à croître — le Ro indien est resté constant, à 1.23 du 13 avril au 10 mai [60]— mais la similitude statistique entre Inde et Afrique, et leur différentiel commun avec l’Europe occidentale, restent saisissants. Le « mystère », puisque mystère il y a, ne se limite donc pas à la nature du virus et aux moyens d’y faire face. Sa géographie contre-intuitive appelle, elle aussi, à analyse, si la multiplication des tests ne vient pas, à l’avenir, bouleverser le tableau actuel de la pandémie.
Jean-Luc Racine
Notes
[1] Vidhya Krishnan, « Coronavirus threatens catastrophe in India », Foreign Affairs, 25 mars 2020. www.foreignaffairs.com
[2] « Coronavirus shutdown : No Foreign Flights Starting from Sunday, Work from Home for Most », www.ndtv.com, 20 mars 2020.
[3] « PM’s address to the nation on vital aspects relating to the menace of Covid-19 ». www.india.gov.in, 24 mars 2020
[4] Coronavirus. India Tracker. The Hindu, 23 mai 2020
[5] Johns Hopkins University Coronavirus Center : Cases and mortality by country. Consulté le 22 mai. https://coronavirus.jhu.edu/data/mortality
[6] Alexandra Ulmer & Sumit Khanna : « The mystery behind India’s lower death rates during coronavirus lockdown », Livemint, 24 avril 2020. www.livemint.com. Soutik Biswas : « Coronavirus : The ‘mystery’ of low Covid-19 death rates », 28 avril 2020. BBC, www.bbc.com, entre autres…
[7] Anu Sharma : ICMR tests over 20 lakh people for Covid-19, daily testing crosses 90 000 mark. CNBC TV18, 16 mai 2020. www.cnbctv18.com
[8] L’épisode, comparable à la réunion des Evangélistes de Mulhouse, a marqué les esprits en étant le premier gros foyer de contagion médiatisé (400 personnes hospitalisées, 240 testées positives, une dizaine de morts). Le Tablighi Jamaat étant une société de prédication salafiste, les militants ultra-nationalistes hindous n’ont pas manqué de dénoncer les musulmans comme étant responsables du coronavirus en Inde, voire de les accuser de mener un « corona jihad ». A.A. Mahaprashasta : « When Even a Pandemic is Communalised », The Print, 1er avril 2020 ; « Tablighi event : Shoba smells ‘Corona jihad’, The Hindu, 4 avril 2020.
[9] « Dharavi sees a dip in Covid-19 cases », The Hindu, 20 mai 2020
[10] Source pour la population estimée par Etat en 2019 : National Commission on Population, Ministry of Health and Family Welfare, New Delhi, novembre 2019. https://nhm.gov.in
Source pour les données Covid : Coronavirus. India tracker. The Hindu. 23 mai 2020
[11] CV-IND-19 Study Group : « Predictions and role of interventions for Covid-19 oubreak in India ». www.medium.com;@covind—19/, 22 mars 2020. Le groupe compte 13 chercheurs (dont neuf d’origine indienne) pour la plupart biostatisticiens de l’Université du Michigan.
[12] S. Rukmini : « At current rate, India can see 30 000 Covid-19 death by May ; no hospital bed by June », The Print, 23 mars 2020. www.theprint.in
[13] Santosh Ansumali & Aloke Kumar, « Covid-19 projections for India », Mesoscale Lab, Jawaharlal Nehru Centre for Advanced Scientific Research, Bangalore. https://github.co/mesoscalelab. Modélisation du 7 mai 2020
[14] Jacob Koshy, « No new COVID-19 new cases after May 16, says study », The Hindu, 26 avril 2020. La structure Niti Aayog a succédé à la Commission du Plan en 2015.
[15] Deepika Khurana ; « 63% of COVID-19 deaths in India are 60+ age group », Health Statistica Asia, 10 avril 2020. www.ha-asia.com
[16] Countries by Median Age 2018, https://worldpopulationreview.com/countries/median-age/
[17] Par exemple Simran Khosla, World Median Ages Map, 8 septembre 2014. www.pri.org
[18] Sidharth Yadav : « Indore surpasses Delhi, Mumbai in death rate », The Hindu, 7 avril 2020
[19] Le concept d’EAG States a été défini au début des années 1990, ces Etats étant l’objet de politiques publiques en principe intensifiées en matière de santé et de nutrition. Ils comprennent une part notable de la population tribale indienne. On y ajoute parfois l’Assam.
[20] Mes calculs sont élaborés à partir des données démographiques par Etats du recensement de 2011 compilées par la Commission du Plan en décembre 2014 : « Census 2011 (PCA Final Data) », tableau 1, www.planningcommission.gov.in et pour le Covid, des données quotidiennes fournies par The Hindu, « Coronavirus India Tracker » le 21 mai.
[21] Sumit Ganguly : « Can India Avert a Health Apocalyse ? », Foreign Policy, 17 mars 2020. www.foreignpolicy.com
[22] Sifra Lentin, « Lessons from the Bombay Plague », Gateway House, 7 mai 2020, www.gatewayhouse.in et Ajai Srivastava : « Why 1918 matters in India’s corona war » ? Livemint, 13 mars 2020 www.livemint.com
[23] Ministry of AYUSH : « Advisory for meeting the challenge arising out of the spread of coronavirus in India », 6 mars 2020. www.ayush.gov.in. AYUSH est l’acronyme de Ayurveda, Yoga & Naturopathy, Unani, Siddha, Sow-Rigpa and Homeopathy. L’Unani est une médecine d’origine arabo-persane héritière de la médecine grecque ; la médecine Siddha est originaire de l’Inde du Sud ; Sow-Rigpa est la médecine tibétaine. Le département AYUSH a été élevé au rang de Ministère (en fait, secrétariat d’Etat indépendant) en 2014, après le retour du BJP au pouvoir.
[24] Jitendra Kumar, « 19 traditions and practices to boost immunity against Covid-19 », Niti Aayog. www.niti.gov.in
[25] Gunjan Pradhan Sinha : « What the World Needs to Revise ? Lessons from Repository of Indian Civilisation’s Thought and Praxis », Vivekananda International Foundation, 30 avril, www.vifindia.org
[26] Jyoti Shelar : WHO busts myths and fake messages on coronavirus », The Hindu, 6 février 2020
[27] Rahul Sampal : « Can Gangapal treat Covid-19 ? Modi Govt wants a study. ICMR says no », The Print, 6 mai 2020. www.theprint.in
[28] Depuis début avril, le bureau du CNRS à New Delhi répertorie ces initiatives dans une lettre hebdomadaire : Special News Bulletin on Coronavirus India. www.cnrsindia.com
[29] Prime Minister Office : « PM Modi’s address to the Nation on issues related to Covid-19 », 12 mai 2020. www.pmindia.gov.in
[30] Jacob Koshy : « ICMR panel on vaccines dissolved », The Hindu, 10 mai 2020
[31] Restera à voir si Gilead changera sa politique de profit maximum : après le scandale du prix exorbitant initialement donné au sofosbuvir contre l’hépatite C en 2013, la firme avait concédé une licence de génériques pour certains pays, dont l’Inde.
[32] Himani Chanda ; « How India can be a world leader in making Covid vaccine and Keeping it cheap too », The Print, 6 mai 2020
[33] Ministry of Health and Family Welfare, Updates on COVID-19, 21 mai 2020. www.pib.gov.in
[34] A.K. Ghosh : « India : Assessing the political messaging in view of Covid-19 », South Asia Weekly Report, New Delhi, Observer Research Fondation, XIII-14, 7 avril 2020. www.orfonline.org
[35] Parth Maniktala : « Diluting Federalism in the Fight agaisnt COVID-19 Pandemic, Outlook, 27 avril 2020. www.outlookindia.com
[36] Web Bureau : « Bitter War of Words between Congress and Yogi Govt over Buses Keeps Migrants Labourers Waiting », Outlook. 19 mai 2020. www.outlookindia.com
[37] S.V. Ramana Murthy : Measuring Informal Economy in India. IMF, 2019, table 3, p. 3. www.imf.org
[38] Neeta Lal, « Covid-19 and India’s People of Nowhere », The Diplomat, 1er avril 2020. www.thediplomat.com. Pour une étude détaillée « à chaud » de cette débâcle : Ranabir Samaddar (ed) : Borders of an Epidemic. Covid-19 and migrants workers. Mahanirban Calcutta Research Group, avril 2020. www.mcrg.ac.in
[39] Debjani Ghosh : « Lives and livelihoods : The two critical imperatives for India’s Economy », The Economic Times, 15 avril 2020, www. economictimes.indiatimes.com
[40] A.K. Bhattacharya : Indian Economic Review/January 2020, Ananta Centre, New Delhi, 28 janvier 2020. www.anantacentre.in. Pour un état de l’économie indienne au début de la pandémie : Christophe Jaffrelot, L’économie indienne face au choc du coronavirus , Institut Montaigne, Paris, Policy Brief, 27 mars 2020
[41] Prime Minister Office : « PM Modi’s address to the Nation on issues related to Covid-19 », 12 mai 2020. www.pmindia.gov.in
[42] FE Online :« Atmanirbhar Bharat : Break-up of 20 lakh crore package announced in five tranches by FM Sitharaman », The Financial Express, 17 mai 2020. www.financialexpress.com
[43] Udit Misra : « Why the Atmanirbhar Bharat Abhiyan economic package is criticised », The Indian Express, 18 mai 2020. www.indianexpress.com
[44] Anirban Nag : « World Worst PMI signals 15% contraction in India’s Economy », Bloomberg Quint, 7 mai 2020. www.bloombergquint.com
[45] K.S. Kumar : Goldman Sachs sees contraction of Indian Economy », Asia Times, 20 mai 2020. www.asiatimes.com
[46] A.K. Shiva Kumar : « Where is heath in the stimulus package ? », The Hindu, 18 mai 2020.
[47] Ministry of Health and Family Welfare : National Health Profile 2019, New Delhi, 2019, pp. 192-193 ; p. 220, p. 252. http://www.cbhidghs.nic.in
[48] Ministry of Finance : Key Highlights of Union Budget 2020-2021. Press Information Bureau, tableau p. 12, 1er février. www. pib.gov.in
[49] Voir par exemple les analyses de deux anciens National Security Advisers : M.K. Narayanan : « The spectre of a post-Covid-19 World », The Hindu, 4 avril 2020, et Shivshankar Menon : « Looking at the Post-Covid World : the China Dimension », conférence vidéo pour l’Institute of Chinese Studies, New Delhi, 6 mai 2020. www.youtube.com
[50] Ambassade de l’Inde en France : Indian Contribution to Global Mangement of COVID-19 , Note du 7 mai 2020.
[51] Prime Minister Office : « PM’s address to the Nation on 12 .5. 2020 ».12 mai 2020. www.pmindia.gov.in
[52] Press Trust of India : « Post-coronavirus world provides window opportunity to India, says Alice Wells », The Financial Express, 21 mai 2020. www.financialexpress.com
[53] Press Trust of India : « Commendable that India has been able to keep Covid-19 cases low compared to other nations : WHO’s chief scientist », The Hindu, 11 mai 2020
[54] « AIIMS director says cases likely to hit peak in June July », The Hindu, 7 mai 2020. L’All India Institute of Medical Sciences de New Delhi est le CHU indien le plus réputé.
[55] K. Kularan, G.V. Krishnaveni et al. « Covid-19 and the path ahead », The Hindu,
[56] Pakistan : Coronavirus in Pakistan, Dawn, 14 et 23 mai 2020. Bangladesh : Coronavirus Figures, The Daily Star, 14 et 23 mai 2020. www.thedailystar.net
[57] Africa Centre for Disease Control and Prevention : Daily Updates Covid-19, 23 mai 2020. www.africacdc.org
[58] Fred Eboko et al. : « Le catastrophisme, reflet de notre vision de l’Afrique », Le Monde, 14 mai 2020
[59] Coronavirus Resource Center Dashboard, Johns Hopkins University, 22 mai 2020. www.coronavirus.jhu.edu
[60] « India’s Covid-19 reproduction rate holds steady », The Times of India, 13 mai 2020. www.timesofindia.indiatimes.com
• Jean-Luc Racine est chercheur Senior à Asia Centre. Directeur de recherche émérite au CNRS (Centre d’études de l’Inde et de l’Asie du Sud, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales)
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