Ce brusque retournement d’une situation bloquée depuis 2007, après la victoire électorale du Hamas remise en cause par la direction du Fatah, est la conséquence directe de l’accélération de l’histoire dans tous les pays du monde arabe.
Comment ne pas voir dans la décision des deux directions politiques ennemies l’urgence de prévenir une vague de contestation populaire inédite. À Gaza, privée de tout, assiégée, bombardée depuis quatre ans par l’armée sioniste, administrée par un Hamas omniprésent et peu sensible aux aspiration démocratiques de la jeunesse, en Cisjordanie dont la population est harcelée quotidiennement par les colons et l’armée d’occupation, humiliée par le mur de séparation raciste érigé par Israël, administrée par une autorité aux pratiques contestées, le peuple palestinien exprime lui aussi son désir de changement.
Cela s’est traduit par de multiples rassemblements, encore faibles en nombre de participants, systématiquement réprimés par le Hamas à Gaza et par l’Autorité palestinienne en Cisjordanie. Sur la place Manara à Rammalah, une tente occupée par de jeunes « blogueurs » surmontée d’un calicot « Le peuple veut la fin de la division » exprime clairement le ras-le-bol général d’une situation devenue insupportable.
Pour autant, il serait bien hasardeux de penser que les deux administrations, aussi fortement contestées, puissent, par on ne sait quel coup de baguette magique, trouver un terrain d’entente qui dépasse un simple accord de gestion économique. Les divergences politiques sont si profondes, le contentieux entre le Hamas et le Fatah si lourd, qu’un gouvernement commun apolitique, composé de technocrates, a peu de chances de régler les problèmes fondamentaux que sont la création d’un État palestinien souverain bénéficiant d’une continuité territoriale avec Jérusalem pour capitale, la libération des prisonniers et le droit au retour des réfugiés.
La satisfaction de ces revendications fondamentales du peuple palestinien passe par une mobilisation populaire de grande ampleur, une nouvelle Intifada, appuyée par un contexte international favorable. Le projet d’organiser dans un an des élections présidentielles puis législatives ne se situe évidemment pas à un tel niveau.
Cependant, l’annonce par le ministre des Affaires étrangères égyptien de la réouverture prochaine de la frontière avec Gaza, la décision de l’ONU d’une reconnaissance en septembre d’un « État palestinien » ajoutés à l’accord de réconciliation, constituent des points d’appui pour « désenclaver » la lutte du peuple palestinien et lui redonner sa place centrale dans le combat anti-impérialiste.
Les dirigeants d’Israël l’ont bien compris et multiplient les déclarations visant à s’opposer par avance à toute évolution de la situation et prennent de nouvelles mesures de rétorsion. Une grande journée de mobilisation du peuple palestinien doit se tenir le 15 mai prochain, sachons lui apporter tout le soutien et toute la solidarité qu’elle mérite.