Rappelons que 80 % des femmes ayant une déficience intellectuelle seront victimes d’une agression, principalement sexuelle, au cours de leur vie ; bon nombre le seront plus d’une fois, et dans 90% des cas, c’est une personne de leur entourage qui commettra l’agression : intervenant, membre de la famille et, dans une faible proportion, une autre personne ayant une déficience intellectuelle.
Les facteurs de risque sont nombreux : rapport de pouvoir entre une personne handicapée et une personne qui ne l’est pas, manque de connaissances des codes sociaux, difficulté à s’affirmer, exclusion, pauvreté, manque de services, lacunes dans l’éducation à la sexualité et préjugés entourant la déficience intellectuelle.
Pour l’AQIS, cette journée constituait le premier jalon pour lutter contre la violence et les abus sexuels envers les personnes ayant une déficience intellectuelle ; les hommes aussi en sont victimes, on parle d’un sur trois. Il faut donc continuer à en parler et prendre toutes les tribunes qui le permettent.
Parmi les personnes invitées à faire une présentation, il y avait une représentante du Regroupement des CALACS, une intervenante du CALACS de Lévis, une autre du Centre de santé des femmes de Montréal. La mère d’un garçon de 11 ans qui a été intimidé a livré un témoignage touchant lors du panel ; un travailleur social du CIUSSS Centre-Sud-de-l’Ïle-de-Montréal et une intervenante de l’Association pour l’intégration sociale, région de Québec, complétaient cette liste de personnes-ressources d’expérience dont les propos ont permis d’alimenter les échanges.
L’objectif de la journée était de faire en sorte que les personnes concernées prennent la parole. Elles ont parlé, elles ont exprimé leur désarroi et leurs attentes. Soulignons que les personnes ayant une déficience intellectuelle composaient environ le tiers des personnes présentes. Un panel, des ateliers et des plénières ont confirmé les torts causés par les agressions, les besoins en termes d’information, de soutien, de sensibilisation et d’éducation. Des parents comme des intervenantEs ont insisté sur la nécessité de cours d’éducation sexuelle dès l’école primaire, d’autres ont rappelé l’importance de sensibiliser la population et de faire en sorte que les services de soutien existants soient en mesure d’accueillir les personnes qui ont une déficience intellectuelle.
En fait, il faut que la société prenne conscience de ce fléau ; il est temps que les dispensateurs de services et les décideurs prennent des mesures concrètes pour protéger ces personnes. Par ailleurs, dans le contexte d’austérité qui prévaut actuellement, il y a lieu de craindre que les compressions budgétaires n’affectent les services offerts aux personnes qui ont une déficience intellectuelle et que la vigilance en ce qui concerne la violence et les abus sexuels envers elles ne s’en trouve réduite.
Comme organisatrice de l’événement, je peux vous dire que le déroulement de la journée, la qualité des présentations, la participation et la prise de parole ont dépassé tous les objectifs que nous nous étions fixés. Comme mère d’une fille de 34 ans ayant une déficience intellectuelle, j’en ai retiré beaucoup d’espoir quant à la possibilité d’avoir un environnement plus sécuritaire. Ce qu’il faut, c’est une volonté sociale et politique.
Cette activité était organisée par l’AQIS et le Réseau d’action des femmes handicapées du Canada avec la collaboration de la troupe Atout-Cœur dont les comédienNEs sont des personnes qui ont une déficience intellectuelle.