Tiré de MondAfrique. Caricature par le dessinateur « Z »
Zabaïed, autrement dit le président Kaïs Saïed (1), qui a réussi son pari de faire tomber tous les contre pouvoirs, vient de tomber sur un os : L’UGTT(2), la puissante centrale syndicale tunisienne.
Celle-ci vient d’organiser une grève générale le 16 Juin qui a été suivie sur tout le territoire. Bien que l’UGTT avait soutenu « le coup de force » du 25 Juillet 2021 (considéré aujourd’hui comme le coup d’Etat de Zabaïed), le syndicat s’est ravisé lorsqu’il s’est retrouvé exclu du prétendu dialogue national promu par le Président. Mais c’est une circulaire (la Circulaire 20, interdisant au syndicat de mener des négociations directes avec les ministères) qui a fait déborder le vase et qui a mis fin à la brève lune de miel entre le président et l’UGTT.
Saied pas encore si « Sissi »
Zabaïed n’est plus à un coup d’essai près. C’est un antidémocrate compulsif ne supportant pas l’adversité. Mais lui manque encore ce tout petit rien, ce petit pas qui officialisera enfin sa stature de « Sissi » Tunisien, le chef d’état égyptien : il lui faut faire taire les derniers journalistes libres et en finir une bonne fois pour toutes avec l’arrogance des ces foutus syndicats. Mais si Zabaïed ne franchit pas encore le Rubicon, c’est parce qu’il a besoin de la centrale syndicale : la Tunisie est aux abois. Et pour négocier un prêt du FMI, la signature d’un accord avec l’UGTT est indispensable. Enfin c’est ce qui se raconte..
.
En tous cas, cette grève du 16 Juin fut un véritable succès. Elle démontre qu’un véritable contre-pouvoir résiste encore et toujours au bulldozer du président. Cette résistance n’est pas sans nous rappeler la fameuse grève de l’UGTT à Sfax en Janvier 2011. Grève historique qui participa à la chute de Ben Ali.
Il est d’ailleurs très troublant de voir ressurgir en ce moment-même les démons du passé, tel Mezri Haddad (voir sa photo ci dessus), un des plus fervents défenseurs de Zaba, le surnom de l’ex président Ben Ali. Ce nostalgique de la dictature qui rentre enfin au bled après dix ans d’exil doré, vient à la rescousse du président et accuse les syndicats « de haute trahison » comme au « mauve-vieux »(3) temps. Notons que le retour de Haddad au bercail est un signe qui ne trompe pas.
Rendez vous avec l’Histoire
Malgré toutes ces agitations ; Kaïs Saïed reste muet. La Tunisie attend avec impatience un énième discours enflammé contre les traitres de la Nation. Tous les ingrédients sont pourtant réunis, mais le président se fait discret…Il a la tête ailleurs…Zabaïed a plus urgent que l’UGTT, le FMI, la chute du dinar, la crise du blé, la crise du gaz et la fermeture de nos frontières avec l’Algérie. Saïed est au-dessus du temps politique. Il a rendez-vous avec L’Histoire.
Avec Sadok Belaïd, président de l’instance nationale consultative chargée de l’élaboration de la Constitution, Kaïs Saïed travaille jour et nuit sur un nouveau exte. Il ne lui reste que jusqu’au lundi 21 juin, a annoncé le Palais de Carthage, pour rendre sa copie…et voir gravé son nom dans une encyclopédie…de droit constitutionnel.
Notes
(1) ZABAIED est la contraction de ZABA ( acronyme de Zine El Abidine Ben Ali, l’ancien dictateur, et de SAIED, l’actuel président tunisien accusé d’autoritarisme
(2) L’Union Générale Tunisienne des Travailleurs
(3) Le « mauve-vieux temps » est une allusion à la dictature de l’ex Président Ben Ali qui avait fait du mauve la couleur fétiche du régime.
Un message, un commentaire ?