Objectif emploi « s’attaque » à tous les assistés sociaux du Québec.
Le ministre affirme que les opposants au projet de loi 70 insinuent que les changements législatifs prévus viseront l’ensemble des personnes assistées sociales. M. Blais, nous sommes biens conscient.E.s que le programme Objectif emploi ne touchera que les primo demandeurs d’aide sociale considérés sans contrainte à l’emploi. Or, comme vous le mentionnez, cela représente annuellement près de 17 000 personnes au Québec. Exposer 17 000 personnes à une réduction de leur prestation mensuelle de 623 $ à 399 $, si elles ne sont pas en mesure de participer aux mesures d’employabilité, n’est-ce pas suffisant pour s’indigner ? Il s’agit de plusieurs milliers de citoyen.E.s qui se retrouveront potentiellement dans une misère et un dénuement encore plus grand, ce qui est profondément inacceptable dans une société riche comme la nôtre.
Le ministre soutient que les primo demandeurs sont plus faciles à mobiliser pour un retour en emploi, à condition qu’on leur offre les ressources nécessaires et que l’État adopte une approche coercitive. Justement, parlons en des ressources nécessaires pour s’en sortir ! Comment le gouvernement Couillard peut-il prétendre offrir les ressources dont les gens ont besoin pour se sortir d’une situation de vulnérabilité, alors que ses mesures d’austérité sont en train d’anéantir notre filet de protection sociale ? Et en ce qui concerne la réussite des approches coercitives de réinsertion à l’emploi, de nombreuses études prouvent au contraire que les mesures volontaires sont plus efficaces. Près de 300 professeurs et chargés de cours universitaires le lui ont d’ailleurs rappelé la semaine dernière. Comme quoi le ministre n’utilise que les « faits » qui l’arrangent.
Objectif emploi va appauvrir les plus pauvres.
Le ministre ose ensuite affirmer que son projet de loi n’appauvrira pas les plus pauvres, puisque les personnes qui participeront aux mesures obligatoires d’employabilité recevront des montants supplémentaires. Or, il omet de mentionner que les personnes qui ne participeront pas à ces mesures verront leur maigre chèque mensuel de 623 $ amputé d’un montant pouvant s’élever jusqu’à 224 $. Pour plusieurs raisons, bon nombre d’individus ne seront pas disposés à participer de façon continue aux mesures obligatoires, et seront placés en position d’échec. Pensons par exemple aux personnes aux prises avec des troubles de santé mentale non diagnostiqués, des difficultés liées à la toxicomanie ou en situation de ruptures de toutes sortes. Couper les prestations de ces personnes, c’est en quelque sorte les jeter à la rue. Qui peut, en 2016, combler ses besoins de base avec 399 $ par mois ?
Objectif emploi nourrit les préjugés envers les assistés sociaux.
Le ministre affirme que son projet de loi n’est pas basé sur des préjugés. Pourtant, dans sa lettre, il dit lui même que « plusieurs d’entre eux n’ont jamais eu la chance de grandir dans un milieu leur fournissant un encadrement suffisant pour réussir leur vie ». Ceci est un préjugé ! Il est faux de croire que les primo demandeurs sont majoritairement des jeunes issus de familles dysfonctionnelles. Les trajectoires de vie sont multiples : perte d’emploi, séparation, immigration récente, etc.
La démarche d’Objectif emploi est essentiellement punitive et vise à faire des économies sur le dos des plus pauvres.
Nous sommes bien d’accord sur le fait de bonifier les prestations et l’accompagnement pour les personnes qui participent à des mesures d’employabilité. Par contre, nous sommes totalement opposés à la démarche punitive inclue dans le programme Objectif emploi. Le montant de base déjà insuffisant ne doit être amputé d’aucune façon. Historiquement, ce type de mesures a démontré son inefficacité et ses nombreux effets pervers. Eh oui, ce projet de loi vise à faire des économies sur le dos des plus pauvres. Nous nous demandons pourquoi le ministre s’entête à vouloir sauver quelques millions de dollars, au péril de la santé et de la dignité des personnes assistées sociales, plutôt que de lutter, par exemple, contre l’évasion fiscale.
Objectif emploi est contraire aux chartes des droits nationales et internationales.
M. Blais affirme que le projet de loi 70 ne porte pas atteinte aux droits de la personne. Pourtant, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse n’est pas de cet avis. Rappelons que les prestations actuelles d’aide sociale pour une personne seule sans contrainte à l’emploi reconnue ne permettent de couvrir que 49 % des besoins de base. Autant dire que les droits à la vie, à la sécurité et à la santé se trouvent déjà bafoués, et que le projet de loi 70 viendra encore aggraver la situation. Nous avons pourtant ratifié des traités internationaux tels que le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ainsi que la charte québécoise des droits de la personne, ce qui implique des obligations pour l’État d’instaurer progressivement le droit à un niveau de vie suffisant pour tous et toutes. Nous sommes loin du compte.
Pour conclure, le ministre ne vient pas rétablir les faits, il tente plutôt de justifier l’inacceptable. Ce dernier fait de plus en plus cavalier seul, alors que de nombreuses franges de la société se lèvent pour demander le retrait du projet de loi 70. Disons non au projet de loi 70, et oui à la dignité des personnes assistées sociales !
Liste des signataires :
Françoise Laforce-Lafontaine, pour le Regroupement des femmes sans emploi du nord de Québec
Yann Tremblay Marcotte, pour le Front commun des personnes assistées sociales du Québec
Maxime Roy-Allard, du Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec
Serge Petitclerc, pour le Collectif pour un Québec sans pauvreté
Sylvie Lévesque, pour la Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec
Pierre-Olivier Gravel, pour l’Association des travailleurs et travailleuses de rue du Québec
Anne-Valérie Lemieux-Breton, pour le Regroupement en éducation populaire et action communautaire autonome de Québec et Chaudière-Appalaches
Mario Gagnon, pour le Regroupement des organismes communautaires de la région 03
Sahar irfani, pour le Regroupement des groupes de femmes de la Capitale-nationale
Émilia Castro et Renée Fortin, pour la Coordination du Québec de la Marche mondiale des femmes
Denyse Thériault, pour le Collectif Québécois de Conscientisation
Véronique Salmon, pour l’Association pour la Défense des droits sociaux Québec métropolitain
Marie-Ève Duchesne, pour le Comité populaire St-Jean Baptiste
Jonathan Carmichael, pour le bureau d’information et d’animation logement du Québec métropolitain
Caroline Paquin, du Comité d’aide aux femmes sourdes de Québec
Isabelle Boily, pour le Centre Femmes d’aujourd’hui
Maxime Couillard, pour la Clinique d’accompagnement juridique Droit de cité
Nathalie Igonène, pour Violence Info
Lucie Gosselin, pour Atout-Lire
Caroline Tremblay, Maison communautaire Missinak
Élisabeth Germain, du Collectif régional Léa-Roback de la Fédération des femmes du Québec
Sébastien Harvey, pour la Ligue des droits et libertés- section de Québec
Marie-Michèle Dubeau pour S.O.S. Grossesse
Francine Genest, pour Auto-psy région de Québec
Ariane Gauthier-Tremblay, pour le Centre ressources pour femmes de Beauport
Curby Charette Graveline, pour la Maison de Marthe
Rose Sullivan, pour le Collectif d’aide aux femmes exploitées sexuellement
Robin Allard, pour Centre Multi-Services Le Complice
Joyce Harvey, pour Allaitement Québec
Éric Martin, du Comité des citoyens et citoyennes du quartier St-Sauveur
Ariane Giroux, pour le Relais la Chaumine
François Décary, Association coopérative d’économie familiale - Appalaches-Beauce-Etchemins
Lise Aubin, pour le Centre Femmes l’Ancrage
Denis Paquet, pour Action populaire Rimouski-Neigette
Jacques Patenaude, pour Action Dignité Lanaudière
Chrystyan Jacques, pour le Regroupement d’Entraide des personnes assistées sociales de Rouyn-Noranda
Mario Paquet pour le Regroupement des assistés sociaux du Témiscouata
Danielle Girard, pour l’Association pour la défense des droits sociaux Montréal Metro
Sylvain Bergeron, pour Lieux d’actions et de services travaillant dans l’unité avec les sans emploi
Ginette Dionne, pour les Gens oubliés d’Héberville
Lucie Forand, pour le Regroupement des sans emploi de Victoriaville
Anne Rousseau, pour le Regroupement des assistés sociaux du Bas-Richelieu
Dominic Marceau, pour l’Association de défense des droits sociaux de la Rive-Sud
Alexandre Lebel, pour l’Association de défense des droits sociaux de la Vallée de l’Or
Chantale Constantineau, pour le Regroupement des assistés sociaux de Mont-Laurier
Guy Fortier, pour le Carrefour de participation ressourcement et formation
Sylvie Bousquet, pour l’association des locataires des Bois-Francs
Serge Gilbert, Association de promotion et d’éducation en logement
Martin Blanchard, pour le Comité logement de la Petite Patrie
François Roy, pour Logemen’Occupe
Vincent Frenette, pour la Chaudronnée
Yvon Dinel, pour le Comité logement Ahuntsic-Cartierville
Dominic Gosselin, Action Logement Pierre de Saurel
Sylvie Dalpé, Action dignité de Saint-Léonard
Sébastien Laliberté, pour le Comité logement Rosemont
Carole Boucher, pour le Comité logement du Plateau Mont-Royal
Stéphane Gagné, pour l’Organisation pour la santé mentale oeuvrant à la sensibilisation et à l’entraide