À main levée, qui est inquiet au sujet de la dérèglementation du climat ?
Quelques informations :
On sait qu’on se dirige vers une augmentation de 3 à 4 degrés d’ici la fin du siècle. 3 degrés, c’est une diminution de 30 à 50% des récoltes mondiales. 4 degrés, c’est 75% de la population du globe qui est exposée régulièrement à des vagues de chaleur mortelle. Ajoutez à ça l’explosion des conflits liés à la raréfaction des ressources, les tensions liées aux migrations climatiques, la multiplication des pandémies…
Ça, c’est l’avenir. Un avenir pas si éloigné. Tout ce que je viens de vous décrire devrait se produire vers la fin du siècle. Qui a des enfants ici ? Des petits-enfants ?
Ce que je viens de décrire, vos enfants vont le vivre. 3 degrés, pour l’instant, c’est prévu pour 2090.
Aujourd’hui, on est à 1,1 degré de réchauffement. Déjà, on a vu des incendies hors de contrôle en Australie et sur la côte ouest américaine. On se souvient de la petite ville de Lytton, en Colombie-Britannique, qui a été rasée par le feu l’été dernier après que la température y ait atteint 49 degrés Celsius. Au Québec, les événements extrêmes (sécheresses, inondations, gel/dégel) affectent déjà les récoltes. Le Canada se réchauffe deux fois plus vite que la moyenne du globe, alors nous ne serons pas épargnés, loin de là. En ce moment, en Inde et au Pakistan, les températures tournent autour de 50 degrés. Les récoltes sont sévèrement touchées et l’Inde, deuxième pays producteur de blé, vient d’en interdire l’exportation pour prioriser la consommation interne.
Je le répète, nous ne sommes qu’à 1,1 degré de réchauffement. L’accord de Paris, que nous ne sommes absolument pas partis pour respecter, vise 1,5 ou 2 degré. Je vous laisse imaginer ce qui nous attend, dans le meilleur des cas. 1,1 degré, c’est des sécheresses, des feux, des famines. 1,5 degré, ça va être pire. 2 degrés, ça va être terrible… mais ça va être viable. C’est pour ça qu’on se bat : garder un monde minimalement viable.
TJC a été créé parce que nous croyons que les syndicats sont la seule force organisée qui puisse faire contrepoids aux lobbys pétroliers et gaziers, pour forcer l’État à sortir rapidement des énergies fossiles. Nos syndicats sont des institutions démocratiques, alors à nous de nous servir de nos instances pour voter des résolutions fortes, qui vont nous donner une chance de survie. Nous sommes en discussion avec le mouvement étudiant et le mouvement communautaire depuis novembre, et nous visons à ramener la mobilisation climatique au niveau où elle était avant la pandémie, pour ensuite l’amener beaucoup, beaucoup plus loin.
Pour l’instant, nous avons lancé un appel à une grève climatique d’une journée, le 23 septembre qui vient. Jusqu’ici, deux fédérations (une de la CSN et une de la CSQ) et un conseil régional (le conseil central des Laurentides) ont appuyé le mouvement. Un premier syndicat s’est doté d’un mandat de
grève, trois autres voteront dans les prochaines semaines et plusieurs ont annoncé leur intention de se prononcer à l’automne. Le plancher a été annoncé à 20 syndicats, 10 000 membres.
TJC demande deux choses :
- Une sortie complète des énergies fossiles d’ici 2030. C’est ambitieux, mais nécessaire. Les études les plus récentes nous disent que, pour avoir 50% de chances de ne pas dépasser le 1,5 degré, les pays riches doivent cesser complètement leur production de pétrole et de gaz au plus tard en 2034. Au Québec, compte tenu de notre production hydroélectrique et de notre potentiel éolien, nous sommes un des endroits au monde où une sortie rapide des énergies fossiles serait le plus facilement envisageable. Mais ça demanderait une mobilisation énorme de tous les secteurs de la société civile.
– Un réinvestissement massif dans les services publics et le filet social. Parce qu’une transformation de société aussi rapide et aussi importante, ça pourrait laisser beaucoup de personnes dans une situation de grande précarité, et c’est ce qu’on doit éviter à tout prix. La lutte pour le climat est indissociable de la lutte pour une plus grande justice sociale.
Vous vous en doutez, l’appui d’une deuxième fédération, une fédération qui n’est pas une fédération de l’enseignement, pourrait contribuer fortement à faire grandir le mouvement. On connaît les risques associés à la grève sociale. Ce qu’on sait, par contre, c’est que le nombre est notre meilleure protection. Plus nous serons nombreux à nous mobiliser, plus la répression sera coûteuse politiquement. On sait que tous les gains sociaux importants auxquels les syndicats ont contribué ont passé par des mouvements de grève : la semaine de 40 heures, l’interdiction du travail des enfants, les normes de sécurité… rien de tout ça n’aurait été gagné sans de longues grèves, toutes illégales. Surtout, on sait aussi que si on ne fait rien, nos enfants vont grandir dans un monde qui n’a pas grand-chose à voir avec celui que nous connaissons. La pandémie nous a donné un avant-goût de ce que c’est, un monde en crise. Ce qui nous attend est bien pire.
En terminant, je voulais dire quelques mots à propos de la résolution qui vous sera soumise. On parle d’un appui aux revendications, rien de plus. D’autres fédérations ou conseils centraux sont allés plus loin, mais je comprends que pour l’instant, vous n’avez pas ce mandat-là de vos membres. À la FNEEQ, par exemple, une résolution très ambitieuse a été adoptée, mais ça a été fait parce que la base poussait : plusieurs syndicats membres sont sur le point de voter une journée de grève. Alors dans votre cas, si vous avez envie d’aller plus loin, invitez-nous dans vos assemblées. Laissez-nous présenter la mobilisation à vos membres. On sait que ça doit venir d’eux.
Présentation rédigée par : François Geoffroy Krystèle Marylène Papineau Félix-Étienne Caron
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