Le Parlement de Wallonie a adopté une résolution qui, après de longs développements, demande au Gouvernement wallon (extrait) :
1. d’agir auprès du Gouvernement fédéral en vue :
– de solliciter l’avis de la Cour de justice européenne (CJE) sur la compatibilité de l’accord avec les Traités européens sur la base de l’article 218 (11) du TFUE pour éviter qu’un accord incompatible avec les Traités européens soit conclu et de ne pas procéder à la ratification de cet accord tant que la CJE ne s’est pas prononcée ;
– de plaider au sein du Conseil pour que le CETA soit qualifié d’accord mixte, ce qui implique que les États membres doivent donner leur accord ;
– de refuser toute mise en oeuvre provisoire du CETA mais d’attendre que toutes les procédures de ratification nationales soient clôturées, afin d’entendre la voix des citoyens européens, avant une éventuelle entrée en vigueur de l’accord ;
– de donner la priorité, dans le cadre du CETA, à un mécanisme de règlement des différends d’État à État sur base des juridictions publiques existantes ;
2. de ne pas accorder les pleins pouvoirs au Gouvernement fédéral pour la signature du CETA entre l’Union européenne et le Canada ;
3. d’agir auprès des institutions européennes afin de veiller à ce que tous les accords commerciaux conclus par l’Union européenne avec des pays tiers, prévoient le respect des balises suivantes, qui ne se retrouvent malheureusement pas dans le CETA :
– l’inclusion d’une clause sur les droits de l’homme, juridiquement contraignante et suspensive, afin de garantir le respect plein et entier des normes de l’Union dans le domaine des droits fondamentaux ;
– l’ajout d’une clause générale juridiquement contraignante applicable à l’ensemble des accords, afin de garantir le respect complet et sans ambiguïté de la convention de l’UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles ;
– l’instauration dans l’accord d’un principe « d’exception agricole » – à l’instar de l’exception culturelle – qui pourra être invoqué si l’augmentation des importations d’un produit risque de causer un préjudice important à la réalisation des objectifs suivants : la sécurité alimentaire, la sauvegarde de la vie et des sociétés rurales, la protection de la nature et de la biodiversité ;
– l’inclusion de normes contraignantes sur le développement durable afin de soutenir les efforts en matière de lutte contre le changement climatique en veillant à ce qu’aucun accord commercial n’entraîne pas une augmentation des émissions de gaz à effet de serre et puisse avoir « un bilan carbone neutre, ou positif » ;
– l’adoption des « listes positives » dans le domaine de la libéralisation des services mentionnant expressément les services à ouvrir aux entreprises étrangères et excluant les services d’intérêt général et services d’intérêt économique général actuels et futurs afin que les autorités nationales et, le cas échéant, locales conservent le droit plein et entier de faire exécuter, d’organiser, de financer et de fournir des services publics afin de garantir aux citoyens européens un accès universel aux services publics ;
– la possibilité d’inclure des clauses sociales et environnementales dans les marchés publics et de privilégier les circuits courts ;
– l’inclusion de mécanismes de coopération pour le renforcement des réglementations financières et bancaires, l’échange de données et la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales ;
– l’inclusion d’un chapitre spécifique pour les petites et moyennes entreprises en prévoyant notamment des dispositions pour leur faciliter l’accès aux échanges ;
– la réalisation d’études d’impact indépendantes approfondies pour chaque État membre ainsi qu’une évaluation de la compétitivité des secteurs avec une attention particulière sur les effets économiques et réglementaires de ces accords sur les PME ;
– l’ouverture de ces accords à d’autres partenaires qui pourraient se joindre à une négociation plurilatérale sur base de conditions claires et prédéfinies afin d’aboutir progressivement à un cadre multilatéral au sein de l’Organisation mondiale du commerce ;
– la mise en œuvre et le respect de dispositions contraignantes en matière de droit du travail ;
– l’inclusion de normes en matière de travail et d’environnement qui ne soient pas limitées aux chapitres sur le commerce et le développement durable mais figurent aussi dans d’autres volets des accords, tels que ceux consacrés aux investissements, au commerce des services, à la coopération réglementaire et aux marchés publics ;
– le respect du principe de précaution tel qu’inscrit dans l’article 191 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne en tant que principe fondamental de la politique européenne de protection de l’environnement, de la santé et des consommateurs ;
– la transparence dans les négociations des futurs accords de libre-échange qui, compte tenu de leurs enjeux, doivent impérativement donner lieu à l’information nécessaire au contrôle démocratique.
On s’en rend compte la majorité constituée par le PS, les chrétiens-démocrates, les écologistes et la gauche radicale a parfaitement mesuré les dangers du CETA (comme du TAFTA et du TISA). En application de la Constitution fédérale de la Belgique, le Gouvernement wallon, par la voix de son Ministre-Président Paul Magnette, s’est engagé à refuser au Gouvernement belge le droit de signer le CETA, ce qui bloque la ratification de ce traité lequel exige l’unanimité des Etats membres de l’UE.
Depuis lors, des pressions gigantesques sont exercées pour que la Wallonie revienne sur sa décision. Elles viennent des organisations patronales (à l’exclusion de celles qui défendent les PME, hostiles au CETA comme au TAFTA), des partis de la coalition gouvernementale nationale et maintenant de l’apprenti caudillo qui sévit à la tête du Gouvernement français et qui prétend faire changer d’avis le Parlement de Wallonie.
Le gouvernement Valls qui se dit hostile au TAFTA se déclare favorable au CETA alors que dans les deux textes on trouve les mêmes dispositions funestes. Mais on sait que le mensonge est la méthode privilégiée du gouvernement français.
On voudrait faire avaler à la Wallonie la couleuvre d’une « déclaration interprétative » qui aurait la même valeur juridique que le traité. Mais alors, pourquoi ne pas tout simplement modifier le traité dans le sens demandé par le Parlement de Wallonie ? Ce traité n’est ni signé, ni ratifié. On peut donc remettre le travail sur le métier.
Celles et ceux qui se battent depuis deux ans pour faire comprendre à nos populations les dangers de ce CETA (comme du TAFTA et du TISA) doivent se mobiliser dans les heures et les tout prochains jours pour exprimer leur soutien à la décision de la Wallonie.