À l’heure où tous les Québécois subissent l’austérité et des coupures, dépenser plus de 500 millions de fonds publics dans un projet minier dont la rentabilité financière et la viabilité environnementale n’ont pas été démontrées s’avèrerait un gaspillage honteux.
Le projet appartient majoritairement à Investissement Québec. On est en droit de se demander si autant d’argent ne serait pas mieux investi ailleurs dans l’économie du Québec.
Le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) a critiqué sévèrement le projet Mine Arnaud en le qualifiant de « non acceptable » pour des raisons de santé, de sécurité et d’environnement. Le BAPE a également remis en question la viabilité économique du projet dans un contexte de baisse mondiale des prix du phosphate et de l’offre abondante sur les marchés internationaux.
Les plus récentes prévisions de la Banque mondiale vont dans le même sens, avec une baisse anticipée du prix du phosphate pour les dix prochaines années.
Mine Arnaud prétend que son phosphate est « si pur » qu’il n’est pas assujetti à la loi des marchés internationaux, un argument qui ne tient pas du tout la route et qui a aussi été mis en doute par Le BAPE.
Mine Arnaud affirme que sa production serait achetée par la multinationale Yara International. Or, aucun contrat de vente n’a été confirmé à ce jour. Et dans le contexte actuel du marché baissier, Investissement Québec est dans une très mauvaise posture pour négocier un prix de vente avantageux, ce qui risque d’affecter davantage la rentabilité du projet.
Sur le plan environnemental, imaginez : situées à proximité de la ville et de la Baie de Sept-Iles (eaux du Saint-Laurent), la fosse de 3,5km de longueur et les millions de tonnes de résidus miniers générés pourraient facilement assoir près de 50 stades olympiques !
Le BAPE craint en particulier les impacts qu’entraînerait un glissement de terrain ou un déversement minier sur les résidences, les infrastructures et les eaux de la Baie de Sept-Îles, tous situés à quelques centaines de mètres en aval du site.
Selon le BAPE, un bris des infrastructures serait « catastrophique » pour la sécurité de la population régionale (l’unique route d’accès bloquée), voire pour l’ensemble du Québec (courant des lignes électriques Churchill et La Romaine interrompu). Le BAPE craint également les impacts de la mine à ciel ouvert sur les eaux souterraines et la contamination à long terme.
Mine Arnaud refuse de rendre publiques les nouvelles études économiques et environnementales réalisées depuis le rapport très critique du BAPE en février 2014.
Malgré ces lacunes importantes et la division sociale engendrée par le projet, les pressions sur le gouvernement se sont intensifiées depuis que la mine de fer Lac Bloom de la compagnie Cliff Resources a récemment annoncé sa fermeture à cause des prix baissiers du fer.
Les tenants du projet, les « Go Arnaud », profitent d’un ralentissement économique régional pour forcer la main du gouvernement Couillard à signer un décret d’autorisation.
Armés d’un sondage largement influencé par une campagne de promotion payée à grands frais par des commerçants de Sept-Îles, les « Go Arnaud » demandent maintenant aux élus et au gouvernement d’autoriser le projet sans poser de question.
Nous nous opposons à ce type de manœuvre politique et de décision précipitée.
Nous n’accepterions pas que nos élus et le gouvernement se pincent le nez et plongent les yeux fermés dans ce qui pourrait être un dangereux précipice financier et environnemental.
Investissement Québec a encore beaucoup de réponses à fournir, surtout dans le contexte des coupures que subissent tous les Québécois et de la nécessité d’assurer un développement viable de nos ressources pour les générations futures. Là comme ailleurs, il n’y a pas de place pour de l’improvisation.
Les signataires
Ugo Lapointe, cofondateur et porte-parole de la Coalition pour que le Québec ait meilleure mine. Marc Nantel, premier vice-président de la Centrale des syndicats du Québec. Christian Simard, directeur général de Nature Québec.