Québec, le 14 mai 2008
Monsieur Gregory C. Wilkins
Président et directeur général
Barrick Gold Corporation
Brookfield Place
TD CanadaTrust Tower
161, rue Bay, suite 3700, C.P. 212
Toronto (Ontario) M5J 2S1
Monsieur,
Cette lettre a pour objet de vous témoigner de la profonde déception du Syndicat de la fonction publique du Québec (SFPQ) relativement à la poursuite de six millions de dollars que votre compagnie, Barrick Gold, a intentée contre Les Éditions Écosociété et les auteurs du livre Noir Canada, Pillage, corruption et criminalité en Afrique, ouvrage collectif rédigé sous la direction d’Alain Deneault, politologue et philosophe.
Monsieur Wilkins, le Canada est une société démocratique qui a adopté la Charte canadienne des droits et libertés laquelle stipule à l’article 2 que « chacun a les libertés fondamentales suivantes », notamment « la liberté de pensée, de croyance, d’opinion et d’expression ». Pour sa part, la Charte des droits et libertés du Québec stipule de son côté à l’article 3 que « toute personne est titulaire de libertés fondamentales telles (…) la liberté d’opinion, la liberté d’expression ». Ces droits ne peuvent être brimés que par « une règle de droit dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d’une société libre et démocratique ».
Le Syndicat de la fonction publique du Québec étant une organisation syndicale représentant quelque 43 000 membres craint que l’objectif d’une telle poursuite soit de ruiner une petite maison d’édition québécoise. Si tel était le cas, il s’agirait pour nous d’une utilisation abusive des institutions judiciaires, et ce, afin de protéger un intérêt privé au détriment du bien commun.
Dans le cadre du dossier qui nous préoccupe, soit celui de la liberté d’expression, au lieu d’engager une poursuite judiciaire, la compagnie Barrick Gold Corporation aurait dû discuter publiquement des allégations contenues dans ce livre, allégations fortement documentées par un ensemble de recherches de manière à ce que la population puisse se faire sa propre idée. En d’autres mots, permettre à la population d’entendre les arguments des auteurs du livre et de votre compagnie.
Pour le SFPQ, il n’est pas trop tard pour réparer cette atteinte à la liberté d’expression. Aussi, nous invitons votre compagnie à retirer cette poursuite contre Les Éditions Écosociété et les auteurs du livre Noir Canada, Pillage, corruption et criminalité en Afrique et à ouvrir le dialogue.
Nous vous prions de recevoir, Monsieur, nos salutations distinguées.
La Présidente générale,
Lucie Martineau