Édition du 17 décembre 2024

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Environnement

Les inondations en Alberta sont-elles un signe des changements climatiques ?

Il ne se passe pas une semaine sans que nous n’entendions des climatologues ou des spécialistes dire : « Il est difficile de lier un événement météorologique particulier avec le réchauffement climatique, mais... ». Cela a été le cas cette semaine alors que les communautés de Calgary et du sud-ouest de l’Alberta ont dû être évacuées face aux précipitations extrêmes et à la montée des eaux.

Le « mais », bien sûr, est que nous savons que la combustion des énergies fossiles et l’injection de dioxyde de carbone et autres gaz à effet de serre piégeant la chaleur dans l’atmosphère a pour conséquence une élévation de la température moyenne de surface de la Terre. Ce réchauffement conduit aux changements climatiques, ce qui génère une augmentation des événements extrêmes liés au climat. Ces événements, selon la Déclaration sur l’état du climat mondial en 2012 de l’Organisation météorologique mondiale, incluent, « de grandes vagues de chaleur et des températures extrêmes, des sécheresses et des feux de forêts, des précipitations et des inondations majeures, de fortes chutes de neige et des froids extrêmes ainsi que des cyclones tropicaux ».

Comme le souligne le rapport, « la variabilité naturelle du climat a toujours donné lieu à de tels extrêmes, mais les caractéristiques physiques des phénomènes météorologiques et climatiques sont de plus en plus façonnées par les changements climatiques. »

À bien des égards, les changements climatiques induisent aussi le changement du cycle de l’eau. Pour chaque degré d’augmentation de la température, la capacité de l’atmosphère à retenir l’eau augmente de 7. Des quantités importantes d’eau provenant des glaciers en train de fondre sont libérées alors que l’évaporation des océans, qui recouvrent 70 % de la surface de la Terre, est en augmentation. Dans le même temps, une plus grande instabilité de l’atmosphère et des courants-jets déverse de plus grandes quantités de précipitations et augmente la fréquence des événements extrêmes comme les tornades et les ouragans.

En dépit de ce que nous savons sur les changements climatiques, et malgré le fait que moins de 1 % des scientifiques du climat contestent la recherche dominante au sujet de l’origine humaine du réchauffement, nous voyons encore les organes de presse, l’industrie et d’autres, essayer de nous convaincre que ce n’est pas le cas ou que ce n’est pas une grosse affaire. Nous voyons également les gouvernements refuser d’agir de manière significative.

Comme je l’ai mentionné dans un récent article, « quand des gens partout sur la planète appliquent des méthodes rigoureusement scientifiques afin d’étudier nos actions et leurs impacts sur ce qui nous maintient en vie et en santé - l’air pur, l’eau, les sols et la biodiversité des plantes et des animaux - nous devrions les écouter, non seulement sur la question climatique, mais aussi sur toute une série de problématiques. »

L’air, l’eau et la terre sont intimement reliés entre eux et d’une façon si complexe que nous avons encore du mal à la comprendre. Durant des années, le secteur des assurances nous a alerté que l’explosion des coûts des indemnisations reliées au climat devait être conditionnel à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. À la lumière de cela, il est choquant, après tant d’années de déni sur la réalité de l’origine humaine des changements climatiques, d’entendre certains experts réclamer une politique d’adaptation plutôt que d’exiger un programme massif pour ralentir les changements climatiques.

Pouvons-nous dire que les récentes inondations et les phénomènes météorologiques extrêmes dans le sud de l’Alberta et de la Colombie-Britannique ont été causés par le réchauffement climatique ? Peut-être pas, mais nous pouvons affirmer que nous devrions nous attendre à voir plus souvent ce genre de choses - voire pire si nous ne faisons rien pour contrôler nos émissions. Comme de nombreux scientifiques nous le répètent, les changements climatiques n’arrivent pas, ils sont déjà là. Nous pourrions être en mesure de nous adapter et de faire face à certains effets présents, mais cela s’avérera de plus en plus difficile si nous continuons à ignorer la nécessité de nous sevrer des combustibles fossiles, en étant sobres sur le plan énergétique et en passant aux énergies propres.

David Suzuki

Militant écologiste canadien.

http://www.davidsuzuki.org/fr/

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